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Charlie Hebdo: les caricaturistes et le monde de la BD en deuil

Le dernier numéro de Charlie Hebdo, publié le 7 janvier 2015.

Le dernier numéro de Charlie Hebdo, publié le 7 janvier 2015. - Bertrand Guay - AFP

VIDEO - L'attaque contre Charlie Hebdo a coûté la vie à quatre des plus grands dessinateurs de presse français: Wolinski, Cabu, Tignous et Charb. Un drame qui bouleverse le petit milieu du dessin de presse.

Wolinski (80 ans), Cabu (76 ans), Tignous (57 ans) et Charb (47 ans): l'attentat contre Charlie Hebdo a décimé une rédaction et coûté la vie à quatre des plus grands dessinateurs de presse français, militants de l'irrévérence. Parmi les victimes, deux maîtres de toute une génération de caricaturistes: Cabu et Wolinski.

Ces deux-là faisaient partie des derniers représentants d'une famille de dessinateurs qui revendiquaient le droit de se moquer de tout, et qui comptait aussi Reiser, Fred, Gébé, Topor, toute la joyeuse bande de Hara-Kiri, journal "bête et méchant" ancêtre de Charlie Hebdo. Tous aujourd'hui disparus.

Les dessinateurs de presse bouleversés

Les derniers membres de cette génération, comme Siné (85 ans), Willem (73 ans), ainsi que leurs héritiers comme Plantu, le dessinateur du Monde, celui du Parisien, Olivier Ranson, ou encore le dessinateur de BD Philippe Geluck, tous étaient révoltés mercredi par ce drame sans précédent dans le petit milieu du dessin de presse.

Siné, bouleversé, et qui est actuellement hospitalisé, a dit avoir "l'impression d'avoir reçu un immeuble de six étages sur la tronche". "A mon âge j'avais déjà eu l'occasion de perdre quelques bons copains ... mais quatre d'un coup, assassinés par des fous, c'est abominable, inhumain", a-t-il déclaré dans un communiqué lu par sa femme à l'AFP.

Pour Willem, qui collabore aussi à Charlie, "c'est toute la presse qui est sous intimidation, il ne faut pas se laisser faire. C'est un journal qui a été décapité, comme en Syrie, en Irak. C'est unique au monde qu'un journal soit tué comme ça".

Sur Twitter, Plantu a dessiné une pancarte en lettre de sang, pour rendre hommage à ses confrères tués, avec cette seule phrase: "de tout coeur avec Charlie Hebdo".

"Ceux qui tuent les caricaturistes, tuent ceux qui les obligent à réfléchir. L'outrance est censée obliger les gens à réfléchir sur eux-mêmes, comme un miroir. C'est le boulot du dessinateur. Ceux qui tuent les caricaturistes ne veulent pas voir le réel", a commenté Olivier Ranson.

"Avec Cabu nous avons perdu un génie de la caricature, et moi un grand ami", a déclaré Michel Gaillard, patron du Canard Enchaîné, l'autre journal satirique où travaillait souvent Cabu.

"Je suis effondré, je ressens à peu près les mêmes choses que j'ai pu ressentir le 11 septembre lors des attentats de New York. J'ai l'impression qu'il y aura un avant et un après 7 janvier. Cabu et Wolinski ont fait des choses extrêmement gonflées, ils ont provoqué mais c'est la noblesse de la presse satirique. C'est toute la liberté d'expression qui est blessée", a résumé Philippe Geluck.

Le monde de la BD pleure des "maîtres"

"Au siège de Charlie Hebdo, des hommes sont morts pour avoir été des dessinateurs, des esprits libres", a déclaré de son côté le délégué général du Festival de la BD d'Angoulême, pleurant les victimes de l'attentat.

Tout comme les éditions Glénat. "Parmi les 12 personnes assassinées à la rédaction de Charlie Hebdo, quatre auteurs proches des éditions Glénat sont morts parce qu'ils défendaient leurs idées, leur vision du monde, leur bonheur de toujours dessiner notre vie quotidienne", a dit la maison d'édition qui a adopté le logo "Je suis Charlie". Le PDG des éditions Glénat, Jacques Glénat, qui débuta comme garçon de courses à Charlie Hebdo, "pleure ses maîtres Wolinski et Cabu et leurs jeunes disciples Tignous et Charb". "Ils sont morts au champ d'honneur de la liberté de la presse", ajoute l'éditeur.

De son côté, Franck Bondoux, le délégué général du Festival international de la bande dessinée d'Angoulême a rappelé que certains des dessinateurs morts lors de l'attentat "nous étaient très familiers, en particulier Georges Wolinski, Grand Prix du Festival 2005". "Tous nous étaient proches, car ils avaient ce même talent de savoir tout dire en quelques traits, pour nous donner à penser", a-t-il souligné. "Parce que c'est notre vocation, grâce aux auteurs de BD qui nous montrent la voie, nous continuerons de penser, avec eux et par nous-mêmes, pousuit-il. "Et avec une certitude: le dessin est éternel et, dans nos coeurs, les dessinateurs disparus de Charlie Hebdo le seront toujours aussi. Le dessin et ses dessinateurs sont éternels."

La bande dessinée, en quelques décennies, s'est emparée de l'actualité du monde. C'était d'ailleurs le thème principal de l'édition 2014 du Festival. La 24e édition se déroulera du 29 janvier au 1er février.

V.R. avec AFP