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Têtes couronnées

"Chaque article m'a fait souffrir": ce que le prince Harry a dit lors de son procès contre le Mirror

Le prince Harry sortant de la Haute Cour de Londres ce mardi 6 juin 2023 dans le cadre de son procès contre le Daily Mirror.

Le prince Harry sortant de la Haute Cour de Londres ce mardi 6 juin 2023 dans le cadre de son procès contre le Daily Mirror. - Daniel LEAL - AFP

Le duc de Sussex a été confronté pendant cinq heures ce mardi à un interrogatoire ciselé, mené par l'avocat de l'éditeur du tabloïd britannique Daily Mirror, qu'il accuse de collecte d'informations illégales.

Il s'agissait de la première apparition d'un membre de la famille royale à la barre depuis 1891. Ce mardi, le prince Harry s'est présenté devant la Haute cour de justice britannique pour témoigner dans le cadre d'une plainte contre l'éditeur du tabloïd britannique Daily Mirror, accusé de piratage de messageries téléphoniques.

Exilé en Californie avec son épouse Meghan, le fils cadet du roi Charles III, en froid avec le reste de la famille royale britannique, accuse la presse à scandale d'avoir été responsable de la mort de sa mère Diana, pourchassée par des paparazzi à Paris en 1997. Il lui reproche aussi ce qu'il qualifie de harcèlement envers Meghan et d'avoir une responsabilité dans les mauvaises relations qu'il entretient avec sa famille.

Il a livré plusieurs batailles judiciaires. Dans le procès en cours, qui s'est ouvert le mois dernier, Harry accuse l'éditeur du Daily Mirror d'avoir eu recours à des procédés illicites pour recueillir des informations, y compris en piratant des messageries téléphoniques, entre 1996 et 2010.

"J'ai connu l'hostilité de la presse depuis que je suis né"

Devant la justice, le prince Harry a d'abord dénoncé l'intrusion de la presse dans sa vie et raconté sa souffrance depuis son enfance face aux articles des tabloïds à son sujet. "Chaque article m'a fait souffrir. J'ai connu l'hostilité de la presse depuis que je suis né", a déclaré le duc de Sussex lors de l'audience après avoir prêté serment sur la Bible en tant que témoin.

"D'après mon expérience en tant que membre de la famille royale, chacun d'entre nous se voit attribuer un rôle spécifique par la presse tabloïd. Vous êtes soit le prince playboy, soit le raté (...) ou dans mon cas le tricheur, le buveur mineur, le toxicomane irresponsable et la liste est encore longue. En y repensant aujourd'hui, un tel comportement de leur part est tout à fait ignoble", a-t-il ajouté.

"Combien de sang va encore tâcher leurs doigts avant que quelqu'un ne mette un terme à cette folie?", a interrogé le prince Harry dans sa déposition, communiquée aux médias dans la matinée.

Face à face implacable

Comme le veut la procédure à ce stade dans ce procès au civil, le prince Harry a ensuite été confronté à l'interrogatoire ciselé de l'avocat du Mirror Group Newspaper, Andrew Green.

Ce dernier a d'abord présenté de vive voix les "excuses" du groupe de presse et reconnu "quelques preuves" de collecte illégale d'informations tout en mettant en avant l'ancienneté des faits et récusant certaines accusations du prince Harry.

Lors de ce face à face de cinq heures, Andrew Green, qui connaissait son dossier sur le bout des doigts, n'a pas ménagé son interlocuteur. Dans le détail, l'avocat a cherché à comprendre les liens de causalité qui pouvaient être établis entre les 33 articles mis en cause et les accusations portées par le prince Harry.

Pour ce faire, il a questionné le fils cadet du roi Charles III afin de savoir s'il avait lu ces articles et comment il en avait eu connaissance. Il a ensuite confronté le prince Harry à ses propres incohérences pour tenter de discréditer son témoignage.

L'avocat a notamment pris pour exemple l'un des articles incriminés daté de 1996 et a demandé à Harry pourquoi le Mirror est accusé dans ce cas d'avoir utilisé des techniques d'écoutes téléphoniques alors que le prince n'a pas eu de portable avant 1998.

Des réponses calmes, mesurées et polies

À maintes reprises, Andrew Green a également souligné que plusieurs informations mises en cause dans les articles du Mirror étaient en réalité connues du domaine public et avaient déjà été confirmées et publiées par des médias concurrents avant leurs parutions dans les colonnes du journal du groupe MGN.

"En tant que témoin, je ne pense pas que c'est à moi de déconstruire l'article ou de pouvoir déterminer quelle partie a été obtenue illégalement. Les journalistes devraient faire ça eux-mêmes", s'est défendu le prince Harry.

Malgré l'interrogatoire précis et complexe d'Andrew Green, le prince Harry n'a jamais perdu son calme. Selon les journalistes présents au procès, le duc de Sussex a répondu à toutes les questions de l'avocat et est resté mesuré et poli.

Un gouvernement britannique "au plus bas"

Lors du procès, le prince Harry est toutefois sorti de la réserve habituelle des membres de la famille royale vis-à-vis de la politique, en critiquant mardi une presse et un gouvernement "au plus bas"

"Notre pays est jugé dans le monde entier par l'état de notre presse et de notre gouvernement, qui, à mon avis, sont tous deux au plus bas", a dit le fils du roi Charles III, dans sa déposition de témoin.

"La démocratie échoue lorsque la presse (...) ne demande pas des comptes au gouvernement, mais choisit plutôt de s'allier à lui pour garantir le statu quo", a-t-il insisté.

Ces propos tranchent avec la retenue qu'adoptent en général les membres de la famille royale au même titre que le monarque, qui en tant que chef d'État doit adopter une posture de réserve sur les sujets politiques.

L'audition du prince Harry doit se poursuivre mercredi matin. La précédente apparition du duc de Sussex au Royaume-Uni remonte à son voyage éclair pour le couronnement de son père, le roi Charles III, le 6 mai dernier.

Par Carla Loridan avec AFP