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"Mes propos ont été déformés": Justine Triet dénonce la misogynie des détracteurs après son discours cannois

La Française Justine Triet a remporté samedi la Palme d'or à Cannes pour "Anatomie d'une chute", devenant la troisième réalisatrice sacrée de l'histoire du Festival.

La Française Justine Triet a remporté samedi la Palme d'or à Cannes pour "Anatomie d'une chute", devenant la troisième réalisatrice sacrée de l'histoire du Festival. - CHRISTOPHE SIMON / AFP

La réalisatrice, dont le discours au Festival de Cannes sur l'exception culturelle française a fait polémique, défend ses propos et dénonce la misogynie de ses détracteurs.

Trois mois après avoir suscité la polémique au Festival de Cannes en critiquant l'action du gouvernement et la "marchandisation de la culture", la réalisatrice Justine Triet est revenue sur ses propos, estimant ce jeudi dans les colonnes du magazine Elle qu'ils ont été "déformés".

"Au tout début, ça a été assez violent. Mes propos ont été déformés. J'essayais d'avoir une pensée solidaire à l'égard de tous ceux qui avaient manifesté contre la réforme des retraites, ce qui représentait une majorité de Français", commence par dire la réalisatrice, qui a reçu la Palme d'Or pour Anatomie d'une chute (en salles le 23 août).

Alors qu'elle recevait la récompense suprême du 7e Art, la cinéaste avait vivement dénoncé la manière dont le gouvernement français avait "nié de façon choquante" la protestation contre la réforme des retraites. Et elle avait étendu sa critique au système de financement du cinéma, estimant que le pouvoir cherchait aussi à "casser l'exception culturelle sans laquelle (elle) ne serai(t) pas là aujourd'hui".

En conférence de presse, elle avait persisté, critiquant une "tendance qui va vers la rentabilité" des aides publiques au cinéma, et pointant le danger que ces aides aillent aux "plus gros films" au détriment du cinéma de création indépendant et de l'immense diversité des productions françaises.

Misogynie

"On m'a reproché ma supposée ingratitude, mais je ne parlais pas de moi. Je parlais d'un système à défendre pour la jeunesse qui arrive", insiste aujourd'hui Justine Triet, avant de préciser qu'elle n'a rencontré le succès qu'avec son deuxième film, Victoria. "Si j'avais été contrainte par une logique de rentabilité, j'aurais été freinée extrêmement vite."

"Mon discours, je ne l'ai pas sorti de mon chapeau, ça fait des années que tout le monde parle de ça dans le milieu", assure-t-elle encore. "Heureusement, j'ai aussi été soutenue par beaucoup de gens, notamment du métier, qui se sont reconnus et ont été solidaires de mes mots. Je pense qu'un endroit comme Cannes est aussi fait pour cela."

La réalisatrice estime avoir été victime de misogynie, citant une situation similaire avec Ken Loach il y a huit ans: "Quand Ken Loach fait son discours en 2016 et qu'il cite trois fois le mot 'néolibéralisme' en disant ses inquiétudes pour le monde qui arrive, on l'applaudit."

"Moi, je dis des choses qui ne sont franchement pas révolutionnaires, dans une forme d'empathie, d'altruisme, de solidarité, et je suis conspuée et traitée d'enfant gâtée. Je pense que c'est l'expérience de misogynie la plus grande que j'aie jamais rencontrée jusqu'ici", conclut-elle.

Anatomie d'une chute retrace le procès d'une autrice allemande (Sandra Hüller) accusée aux assises du meurtre de son mari, dans leur chalet des Alpes françaises. En l'absence de témoin, si ce n'est leur fils malvoyant, la justice va disséquer la vie du couple dont les disputes étaient enregistrées par le mari.

https://twitter.com/J_Lachasse Jérôme Lachasse Journaliste BFMTV