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Seine-et-Marne: le tribunal administratif suspend la période complémentaire de chasse du blaireau

Un blaireau (image d'illustration).

Un blaireau (image d'illustration). - Sam Yeh © 2019 AFP

En France, la loi autorise ce déterrage uniquement pendant la période de chasse, du 15 septembre, au 15 janvier.

Le tribunal administratif de Melun a annoncé la suspension en référé de l'arrêté du 2 juin 2023 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a autorisé l’ouverture d’une période complémentaire de vénerie du blaireau du 1er juillet au 16 septembre et du 15 mai au 30 juin 2024.

En France, la loi autorise ce déterrage uniquement pendant la période de chasse, du 15 septembre, au 15 janvier. Mais la décision revient aux préfets quant à la permission de périodes complémentaire. Dans une note qu'a pu consulter BFM Paris Ile-de-France, le tribunal administratif indique qu'"il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision" du préfet.

"Dix fois moins de terriers en Seine-et-Marne" qu'en France

Le blaireau est un animal qui fait l'objet d'une protection par la Convention de Berne, qui vise à assurer la protection de la faune et de la flore. Pour justifier la décision, le magistrat indique que "la destruction de blaireautins fait courir un risque pour la biodiversité, que la décision ne s’appuie pas sur des données relatives aux populations de blaireaux en Seine-et-Marne"

"Les seules données sur les prélèvements étant insuffisantes à établir l’état de la population de cette espèce, il y a dix fois moins de terriers en Seine-et-Marne que sur l’ensemble du territoire français, selon l’étude d’AgroParisTech. Le taux moyen de terrier par kilomètre carré est de 0,17 alors qu’en moyenne la densité oscille entre 1,4 et 2,2 terriers par kilomètre carré. Il faut donc faire cesser la pression de chasse sur cet animal", a-t-il ajouté.

Pour les avocats du cabinet Géo Avocat, spécialisé dans le droit de l'environnement, qui représentaient les associations Aves France et One Voice, cette "suspension résulte des effets irréversibles de l’arrêté".

"Le préfet n’établissant notamment pas l’existence des dommages aux récoltes et aux élevages en Seine-et-Marne et n’établissant pas davantage l’existence de dégâts aux talus routiers et ferroviaires qui seraient causés localement par les blaireaux", ont-ils argumenté auprès de BFM Paris-Ile-de-France.

Et d'ajouter: "À cela s’ajoute l’irrégularité de la procédure de participation du public compte tenu de l’insuffisance de la note de présentation publiée", expliquent-ils.

Il n'existe pas "d'intérêt général"

Le tribunal administratif reconnaît que la "condition d'urgence" du référé est caractérisée. Notamment parce que "la période complémentaire de vénerie sous terre du blaireau a déjà débuté et produit des effets irréversibles, que compte tenu des autres modes de régulation du blaireau, il n’existe pas d’intérêt général à prévoir l’ouverture d’une période complémentaire de vénerie sous terre; les battues administratives seront toujours possibles".

Le magistrat note que "les dégâts causés par cette espèce dans le département de Seine-et-Marne ne sont pas établis, que la nécessité de l’arrêté en litige alors que la chasse est ouverte de septembre à fin février n’est pas établie".

Dans son avis du 2 juin 2016, le conseil scientifique du patrimoine naturel et de la biodiversité affirme "qu’aucune information scientifique ne permet d’établir que le blaireau serait à l’origine de dommages".

"Le risque d’accident de talus routier ou ferroviaire est faible compte tenu de la profondeur des terriers et il n’a jamais été démontré qu’une période complémentaire de vénerie sous terre du blaireau aurait une incidence sur les dommages", conclut la justice. Qui plus est, la préfecture de Seine-et-Marne devra verser 1200 euros aux associations Aves France et OneVoiceAnimal.

Nicolas Dumas et Martin Regley