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Salaires, chantage: des travailleurs sans-papiers témoignent des conditions d'emploi sur les chantiers des JO 2024

Sur le site du Village des athlètes ou celui du centre aquatique de Marville, plusieurs travailleurs sans-papiers ont été embauchés. Une situation embarrassante, à quelques mois des Jeux olympiques 2024.

Sur les chantiers des futurs Jeux olympiques de Paris, plusieurs travailleurs sans-papiers ont été engagés pour aider à la construction de certaines infrastructures. Une réalité qui a été dévoilée il a plusieurs mois, à la faveur d'une alerte de la CGT, concernant le site du Village des athlètes.

D'autres lieux sont également concernés, comme le centre aquatique de Marville (Seine-Saint-Denis) qui accueillera l'entraînement des équipes de water-polo. Gaye, un Malien sans-papiers, a travaillé à sa construction pendant plusieurs mois, sans recevoir son salaire entier.

"Tu travailles deux mois, mais il ne t'en paie qu'un", explique l'homme qui vit dans une petite chambre avec deux de ses collègues de chantier.

"'Soit tu restes, soit tu prends tes affaires'"

Moussa, qui a lui participé au chantier du Village des athlètes, décrit un système de chantage mis en place par son employeur, concernant les heures supplémentaires: "Il y a des chantiers, j'ai travaillé jusqu'à 20h. Mais si tu dis que tu ne veux pas rester, on te répond: 'Soit tu restes, soit tu prends tes affaires.'"

Jean-Albert Guidou, secrétaire général de l'union locale CGT-Bobigny, souligne qu'il y a des avantages pour des entreprises à embaucher des travailleurs sans-papiers. Car il n'existe pas de congés payés et les heures supplémentaires "ne sont pas payées".

"Or, les heures supp' dans le bâtiment, c'est important, et singulièrement pour les Jeux olympiques car il faut que les choses soient rendues en temps et en heure", explique-t-il.

"Elles ont été immédiatement écartées"

La situation fait tache, plusieurs mois après les scandales sur les conditions de vie des travailleurs au Qatar et alors que les Jeux olympiques de Paris doivent être la vitrine de la France en 2024.

La société de livraison des travaux assure, de son côté, vouloir corriger le tir. Antoine du Souich, directeur de la stratégie et de l'innovation de la Solideo (Société de livraison des ouvrages olympiques), l'établissement public chargé de la construction des sites, l'affirme:

"Quand il y a eu des entreprises fautives, elles ont été immédiatement écartées du chantier. On a décidé de renforcer les actions de prévention du travail illégal."

Une enquête ouverte

Le gouvernement veut créer des titres de séjour dans les "métiers en tension". Jean-Albert Guidou a déjà accompagné une trentaine de travailleurs des JO dans des procédures de régularisations, certaines déjà obtenues.

Signe que le sujet inquiète, l'inspection du travail a créé une unité spécialisée qui a contrôlé près d'un site par jour depuis deux ans.

En juin, le parquet de Bobigny a également ouvert une enquête préliminaire notamment pour "travail dissimulé" et "emploi d'étranger sans titre en bande organisée".

C.Bo. avec AFP