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Intempéries

"On a subi sept fois la montée des eaux": le désarroi des sinistrés des inondations dans le Pas-de-Calais

À Esquerdes, Blendecques ou encore Thérouanne, l'Aa et la Lys ont débordé dans les rues et dans les maisons. Déjà touchés par les intempéries de novembre, certains habitants n'excluent plus de déménager.

L'impression d'un cauchemar qui se répète. À Esquerdes, commune du Pas-de-Calais de moins de 2.000 habitants, on vit au gré des humeurs de la météo et de la montée des eaux. Comme en novembre dernier, les fortes pluies des derniers jours ont poussé l'Aa en dehors de son lit. Le cours d'eau est placé en vigilance rouge crues ce mercredi 3 janvier.

Lucas Evrard, père de trois enfants, commence à avoir l'habitude d'être sinistré. Le rez-de-chaussée de son domicile est aujourd'hui tout bonnement "impraticable", à moins de porter des bottes hautes.

"Heureusement pour nous, on a une chambre à l'étage, où on peut au moins se reposer et être au sec. Heureusement, sinon on devrait quitter le domicile", relate-t-il sur l'antenne de BFMTV.

Un répit de courte durée

Depuis le 3 novembre 2023, "on a subi sept fois la montée des eaux dans la maison", assure-t-il. Si les premières inondations ont entraîné une "période très, très dure, très, très longue", ses proches et lui-même ont trouvé le moyen de savourer la période des fêtes. Un répit de courte durée.

"Là, le début d'année est catastrophique." Et d'insister: "De la nuit du 31 décembre à maintenant, c'est chaotique".

En plus de la maison et des assurances, il doit prendre soin de ses enfants, en pleine période de vacances scolaires: "Ce n'est pas facile de les occuper".

"On a songé plusieurs fois à partir", reconnaît sans ambages Lucas Evrard. Mais il n'a pour l'heure jamais sérieusement considéré cette possibilité.

"Je n'ai plus envie"

La question taraude bon nombre d'habitants des villes bordées par l'Aa et les autres cours d'eau en phase de crue, à l'instar de la Canche, la Lys ou la Liane. Pascaline pourrait prochainement dire adieu à Blendecques, elle qui vit dans le même quartier depuis 20 ans.

"Je n'ai plus envie. Je ne peux pas dire que ce sera définitif. On verra bien les jours qui vont suivre", souffle-t-elle, tôt dans la matinée de ce mercredi 3 janvier.

Sa nuit a été interrompue par l'un de ses voisins, vers 2 heures du matin. "Il nous a réveillés parce qu'on était en alerte, ça débordait derrière la maison déjà, dans une rue", rembobine-t-elle. La sinistrée a heureusement pu trouver refuge chez sa fille, à l'autre bout de la rue.

Comme Lucas Evrard, elle avait dû surélever ses meubles au mois de novembre et circonscrire sa vie à l'étage de son domicile, sauf pour faire la cuisine. À l'heure actuelle, "le frigidaire est encore dans l'eau, il est tombé". "Ce n'est pas une vie. Ce n'est plus possible", s'attriste Pascaline.

"On tient le coup, mais jusqu'à quand?"

À Blendecques, la montée des eaux est telle que les accès à la ville ont été coupés tôt dans la matinée. Dans la nuit noire, Joffrey est venu constater le niveau de l'eau dans la rue, lampe frontale sur la tête.

Sa maison, bâtie non loin de l'Aa, est pour l'heure épargnée. Mais pas son jardin: "la nappe phréatique commence à monter". "On a bien calfeutré. Pour l'instant, on tient le coup. Mais jusqu'à quand, on ne sait pas", évacue-t-il.

Lui aussi garde un souvenir vivace des intempéries de novembre. "C'est monté aussi haut. Mais pas aussi loin dans la rue", illustre cet habitant de Blendecques.

"On ne s'attendait pas à avoir une inondation comme celle-ci dès à présent. (...) Maintenant, on est impuissants face à l'eau. Si ça monte trop haut, on ne pourra rien faire."

Des tracteurs pour transporter les sinistrés

Protection civile, Croix-Rouge, sapeurs-pompiers: les sinistrés ne sont pas seuls, même si beaucoup sont plongés dans un profond désarroi. Ils peuvent fort heureusement compter sur la solidarité des autres habitants de leur commune ou des alentours.

À Thérouanne, Romain traverse les flots d'eau de la Lys qui recouvrent les rues à bord de son tracteur, à la recherche de quiconque aurait besoin d'un moyen de locomotion pour atteindre la partie plus sèche de la ville.

Deux autres véhicules agricoles ont été mobilisés pour soutenir les sinistrés. Pour Romain, ce coup de main est on ne peut plus naturel: "Il faut quand même s'aider. On habite dans le même village. Il faut comprendre les personnes qui sont inondées".

Florian Bouhot Journaliste BFM Régions