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Pollution aux perfluorés à Pierre-Bénite: le maire porte plainte pour mise en danger de la vie d'autrui

Un reportage a récemment mis en avant les taux anormalement élevés de polluants invisibles, les substances perfluoroalkylées, en région lyonnaise. Ces rejets impliquent deux usines de la Vallée de la chimie.

Il promet de "la transparence" sur cette affaire. Invité sur BFM Lyon ce jeudi soir, le maire (LR) de Pierre-Bénite Jérôme Moroge a annoncé avoir déposé plainte contre X pour mise en danger de la vie d'autrui en raison de la pollution aux perfluorés qui touche sa commune.

"On nous a menti"

Il y a deux semaines, la diffusion d'une enquête réalisée par "Vert de Rage" et diffusée sur France 2 révélait une grave pollution aux substances perfluoroalkylées (PFAS), des produits hautement toxiques, dans la commune de Pierre-Bénite, près de Lyon. Réalisés autour de deux usines, Arkema et Daikin, les prélèvements ont révélé des traces de ces polluants "éternels" dans l'air, l'eau, les sols et lait maternel.

"On nous a menti depuis un certain nombre d'années s'il y en a dans l'air. Donc: pourquoi on nous a menti? Qui nous a menti?", s'interroge Jérôme Moroge sur le plateau de BFM Lyon.

Face à ce problème de santé publique, l'élu rhodanien a décidé de prendre les choses en main. Il explique s'être intéressé à la question dès l'été 2020 à la suite de premières révélations de Libération sur la présence de PFAS dans les eaux alentours de sites d'entreprises installées à Pierre-Bénite.

"Nous cherchons des réponses auprès de l'État, auprès des industriels et ces réponses vont toujours dans le même sens: 'Non, il n'y a pas grand chose à signaler sur le site de Pierre-Bénite et a priori il n'y a rien à craindre'. (...) Après avoir visionné ce reportage, on se dit: 'Ce que vous nous dites depuis un certain nombre d'années c'est faux", pointe-il.

Des études lancées

Pour en avoir le cœur net, Jérôme Moroge a déjà lancé plusieurs actions. Un comité local scientifique a été monté afin d'aider à mesurer la quantité de perfluorés dans l'air et les sols. "On a vu des spécialistes de la question, ces 15 jours ont été très bénéfiques pour nous", se réjouit-il.

Des études indépendantes sur l'état des sols et des aliments ont aussi été lancées par le maire, en collaboration avec d'autres villes voisines craignant également des taux de perfluorés potentiellement anormaux sur leur territoire.

"Nous les menons nous-mêmes pour être certains des chiffres que nous aurons", promet le maire de Pierre-Bénite, qui espère obtenir les résultats d'ici un ou deux mois.

Le préfet renforce les contrôles

Ce mercredi, la préfecture du Rhône a annoncé avoir pris deux arrêtés afin de renforcer la surveillance des rejets de PFAS dans l'eau des usines Arkema et Daikin. Un contrôle "inopiné" des déchets de Daikin a déjà été effectué le 18 mai dernier.

Le maire de Pierre-Bénite s'est satisfait de ces mesures et assure que les choses vont "plus vite" depuis la diffusion du reportage de "Vert de Rage". Jusqu'à présent, l'édile regrettait le manque de "relais au niveau de l'État et des parlementaires" sur cette question.

En attendant d'en savoir plus sur le taux de perfluorés à Pierre-Bénite, le maire a également tenté de rassurer les habitants de sa commune, certains étant inquiets pour leur santé depuis la diffusion de l'enquête.

"L'inquiétude principale était liée à la consommation d'eau potable. Et là, j'ai tout de suite rassuré l'ensemble des habitants de Pierre-Bénite puisqu'ils ne boivent pas l'eau du Rhône. Elle vient d'une nappe phréatique qui est située au nord-est de la métropole", explique-t il.

Le stade de football avait aussi été identifié comme lieu de contamination dans le reportage. Des taux de perfluorés 86 fois supérieurs aux standards y ont été identifiés. Mais le terrain de sport, d'abord fermé pendant une dizaine de jours, a été rouvert par la Ville.

"Selon les scientifiques, il n'est pas prouvé encore que ces perfluorés, nous puissions les inhaler. Des poussières qui seraient sur un stade pour l'instant, on ne sait pas si c'est dangereux ou pas et on ne connaît pas encore vraiment leur concentration", justifie Jérôme Moroge.

"Qu'est-ce qu'on attend ? "

L'élu rappelle également que les PFAS sont déjà présents dans la vie quotidienne de l'ensemble des Français, notamment dans leur alimentation et ce indépendamment de leur lieu de vie. Ils sont utilisés pour leurs propriétés imperméabilisantes, ignifuges, antiadhésives.

"Une étude toxicologique a prouvé que tous les Français avaient des perfluorés dans le sang, plus ou moins", souligne-t-il.

À l'heure actuelle, aucune restriction européenne n'est en vigueur sur la question des perfluorés. Les PFAS ne seront intégrés aux analyses sanitaires de l'eau de consommation qu'en 2026. Jérôme Moroge appelle toutefois à aller beaucoup plus vite et à appliquer dès que possible des normes de limitation au niveau français.

"Si c'est mauvais pour la santé en 2026, ça doit déjà l'être en 2022. Donc, à un moment: qu'est ce qu'on attend? ", s'exaspère-il.

Gauthier Hartmann