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"Je n'en peux plus": le combat de Sabine et de sa fille, victime de harcèlement dans un collège du Rhône

Durant la première partie de l'année scolaire, Anaïs a été harcelée, jusqu'à être hospitalisée. Sans sanctions du collège, l'adolescente a dû être déscolarisée en janvier.

"Tout le monde est au courant mais plus rien n'est fait." Depuis le début de l'année scolaire, Anaïs, élève de cinquième au collège Louis Lachenal de Saint-Laurent-de-Mure (Rhône) est harcelée en cours. Cette élève qui adorait l'école s'y est ensuite rendue à reculons.

À l'approche des vacances d'été, aucune réelle solution n'a été trouvée pour venir en aide à l'adolescente. Voulant faire la lumière sur la gravité du harcèlement scolaire, sa mère, Sabine Hirtz, raconte sur BFM Lyon le calvaire qu'a enduré sa fille, sans soutien de l'académie.

"Elle est totalement isolée"

"Ça a commencé de manière anodine", commence Sabine. "Au départ, elle se plaignait d'un certain nombre de choses. Je n'y ai pas trop prêté attention jusqu'à ce qu'un jour elle me dise qu'elle n'en pouvait plus."

Sa fille lui explique alors qu'elle ne pouvait rien dire et Sabine lui propose de s'exprimer par écrit. Sur ce mot, trois phrases.

"Je me demande si ça vaut encore la peine de vivre. J'en peux plus. Si j'avais pas sauté une classe, j'aurais été bien."

En lisant ce mot, Sabine se sent démunie. "C'est horrible. Là je mesure que c'est grave." À partir de là, Anaïs détaille à sa mère le harcèlement dont elle fait l'objet. Ce que Sabine pensait être des querelles d'adolescents se révèlent être un dénigrement perpétuel.

"Je me rends compte que c'est de manière répétée, qu'elle est totalement isolée." Petit à petit, cela est devenu "un calvaire pour l'amener à l'école". La mère d'Anaïs fait maintenant le rapprochement entre son comportement et l'harcèlement qu'elle subit.

"Elle n'a qu'à pas venir en classe"

Dès le lendemain de cette discussion, la mère de famille appelle la cellule anti-harcèlement. Elle prévient également l'établissement et interpelle la principale adjointe à l'extérieur du bâtiment.

Un échange qui a décontenancé la mère d'Anaïs "Elle me répond 'en effet c'est grave, je n'ai pas le temps, allez voir la CPE'." Renvoyée vers la conseillère principale d'éducation, Sabine lui cite le mot écrit par sa fille et se retrouve tout aussi déconcertée par sa réponse.

"Elle me dit 'Je n'ai pas le temps. Oui c'est grave. Bichette, elle est fatiguée, c'est bientôt les vacances, elle n'a qu'à pas venir en classe'."

La jeune fille à l'origine du harcèlement d'Anaïs a eu vent de ces échanges et s'en est prit une nouvelle fois à l'adolescente, l'accusant d'être "allée pleurer chez la CPE et la principale" et d'être "une poucave".

La psychologue scolaire a de son côté reçu deux fois la fille de Sabine, qui reste muette. Après avoir réussi à échanger avec Anaïs à travers des dessins et autres exercices, elle confirme oralement à Sabine le cas de harcèlement.

En parallèle, Sabine et sa fille sont reçues par la référente harcèlement du collège en novembre, qui leur confirme à son tour le harcèlement par mail. Néanmoins, aucune solution n'est présentée pour aider Anaïs.

"On me parle de la méthode pHARe, où on n'incrimine personne et où l'on doit susciter de la bienveillance auprès de ma fille. Normalement, la harceleuse doit être convoquée avec des témoins et des alliés, mais on ne doit jamais parler de harcèlement, malheureusement."

Ce mardi, le ministre de l'Éducation a promi une "grande campagne nationale de prévention" à la rentrée contre le harcèlement, en plus de cette méthode pHARe. La lutte contre le harcèlement scolaire a été érigée en priorité après le suicide très médiatisée de Lindsay, 13 ans, victime de harcèlement scolaire, en mai dernier. Une réponse encore bien trop insuffisante selon Sabine.

Anaïs déscolarisée depuis janvier

Pour Anaïs, les semaines passent, et rien ne change. En début d'année 2023, l'adolescente a dû être hospitalisée deux semaines. Les médecins ont confirmé qu'elle souffrait de "troubles anxieux liés au harcèlement scolaire". Depuis le mois de janvier, Anaïs est entièrement déscolarisée.

"Les entretiens ont été très mal gérés par le collège et cela a généré encore plus de harcèlement, jusqu'à ce que la classe crée un autre groupe de classe [sur les réseaux sociaux, ndlr] excluant ma fille."

Sabine se sent abandonnée. La mère d'Anaïs demande désormais des sanctions contre la ou les harceleurs, puisque la première méthode n'a pas été efficace.

"La seule proposition que me fait l'académie et le collège, c'est que la jeune ne soit pas sanctionnée et que ma fille change de collège", explique-t-elle. "Or, ma fille me dit depuis le début qu'elle ne veut pas changer de collège, 'pourquoi cela serait à moi de partir'."

Une situation qui pousse la jeune fille à culpabiliser et se demander si cela ne serait pas elle "la coupable". À la rentrée, l'avenir scolaire de l'adolescente est encore incertain après cinq mois de déscolarisation. Par manque de place, Anaïs a été refusée au collège privé de la ville.

Deux numéros verts dédiés au harcèlement

Si un élève est victime de harcèlement scolaire, lui ou ses proches peuvent contacter le 3020, le numéro national de référence. La personne ou ses proches peuvent contacter gratuitement ce numéro d'écoute et de prise en charge.

En cas de cyberharcèlement, vous pouvez composer le 3018. Ce numéro est joignable 7 jours sur 7 de 9h à 23h.

Juliette Moreau Alvarez