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Iran

Site nucléaire, silence d'Israël... Ce que l'on sait des explosions survenues en Iran ce vendredi

Les systèmes de défense antiaérienne se sont activés ce vendredi matin près d'Ispahan. L'Iran a minimisé l'impact de ces explosions sans accuser directement Israël, qui, de son côté, ne les a pas revendiquées.

Est-ce la riposte israélienne à l'encontre de Téhéran? Tôt ce vendredi 19 avril, plusieurs explosions ont été rapportées près de la ville d'Ispahan, dans le centre de l'Iran, où sont notamment abrités des sites militaires, y compris nucléaires et balistiques.

"J'ai entendu la frappe, je n'ai pas d'informations précises", a témoigné un habitant de la ville.

Rapidement, les yeux se sont tournés vers Israël, qui avait juré de faire payer à l'Iran le prix de son attaque inédite contre le territoire israélien, menée le week-end dernier en représailles à une frappe meurtrière lancée le 1er avril contre le consulat iranien à Damas et imputée à Israël.

• Des explosions près d'un site nucléaire

Tôt vendredi, trois explosions près d'une base militaire à Qahjavarestan, entre la ville d'Ispahan et son aéroport, ont été rapportées par l'agence de presse iranienne Fars, affiliée aux gardiens de la révolution. Elle évoque "trois explosions entendues près de la base de chasse de l'armée à Ispahan" et indique que le système de défense antiaérien a été activé.

Des drones ont été abattus mais il n'y a pas eu d'attaque par missiles "jusqu'à présent", a précisé le porte-parole de l'agence iranienne de l'espace.

La région compte le Centre de technologie nucléaire, plus grand complexe de recherche nucléaire d'Iran, d'après l'institut de recherche américain Nuclear Threat Initiative (NTI), et une usine de production de zirconium, matière utilisée dans le domaine nucléaire.

L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a indiqué dans la foulée que les installations nucléaires étaient "totalement en sécurité" et a confirmé qu'il n'y avait "aucun dégât", réitérant ses appels à la retenue.

• Des sources américaines pointent l'armée israélienne

De hauts responsables américains cités par la presse ont fait état d'une attaque israélienne en représailles aux tirs de drones et de missiles contre Israël le week-end dernier.

Les chaînes américaines NBC et CNN, citant respectivement des sources au fait de la question et un responsable américain, ont rapporté qu'Israël avait prévenu Washington à l'avance de la frappe, sans que les États-Unis n'approuvent l'opération ni ne participent à son exécution.

Selon le journal américain The New York Times, qui cite des responsables iraniens, l'attaque a été menée par de petits drones, possiblement lancés depuis le territoire iranien.

De la même manière, en marge du sommet du G7, le ministre italien des Affaires étrangères Antonio Tajani a également affirmé que "les États-Unis ont été informés à la dernière minute" de ces frappes.

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• Silence d'Israël

Pourtant, de son côté, Israël reste silencieux. "Nous n'avons pas de commentaire pour le moment", a indiqué un porte-parole de l'armée.

En revanche, le ministre de la Sécurité nationale de l'État hébreu, Itamar Ben Gvir, s'est attiré les foudres de ses opposants en publiant un court message sur les réseaux sociaux avec le mot "Dardaleh", pouvant être traduit comme "nul", "faible" ou "minable" en français. Outre qu'il en critique la modération, Itamar Ben Gvir semble donc accréditer l'hypothèse d'une frappe israélienne en Iran ce vendredi.

"On a le sentiment que la riposte a été mesurée", a analysé sur BFMTV Georges Malbrunot, grand reporter au Figaro, spécialiste du Moyen-Orient, ajoutant "qu'Israël avait besoin de restaurer sa dissuasion", après les frappes iraniennes.

"Il faut espérer qu'on en reste là et qu'il y a eu une espèce de match nul à l'issue de cette semaine de tensions très fortes", a-t-il déclaré.

• L'Iran comme si de rien n'était

"Comme vous le voyez, Ispahan est extrêmement calme, les gens vivent leur vie normalement", lance un journaliste dans le centre-ville d'Ispahan sur la télévision d'État iranienne.

Une image diffusée par la télévision d'État iranienne montre une image dite en direct de la ville d'Ispahan tôt le vendredi 19 avril 2024.
Une image diffusée par la télévision d'État iranienne montre une image dite en direct de la ville d'Ispahan tôt le vendredi 19 avril 2024. © IRANIAN STATE TV (IRIB) / AFP

Dès l'aube, la télévision officielle iranienne a dépêché ses journalistes à Ispahan, afin de démontrer que le calme régnait et que la vie quotidienne poursuivait son cours, avec une circulation normale ou des personnes allant pique-niquer vers le fleuve de la ville.

Cette journée "ressemble à un vendredi comme les autres", raconte à BFMTV le correspondant en Iran pour RFI Siavosh Ghazi.

S'exprimant devant plusieurs centaines de personnes dans le nord-est du pays, le président iranien Ebrahim Raïssi n'a pas évoqué les explosions survenues quelques heures auparavant. Dès le début de la journée, des responsables iraniens ont pris la parole pour démentir une attaque contre l'Iran depuis l'extérieur.

"Tout cela pour expliquer qu'il n'y a pas besoin de riposte iranienne car il n'y a pas eu d'attaque de la part d'Israël contre le territoire iranien", explique le journaliste Siavosh Ghazi.

• L'ONU appelle à la "désescalade"

Fidèles alliés d'Israël, les États-Unis, par la voix de leur secrétaire d'État Anthony Blinken, ont assuré ne pas être "impliqués" dans les explosions en Iran. "Je ne vais pas parler de ces événements rapportés par les médias (...). Tout ce que je peux dire de notre côté et de celui de tous les membres du G7 est que notre objectif est la désescalade", a-t-il déclaré.

Même son de cloche du côté de l'ONU qui a exhorté "toutes les parties à prendre des mesures de désescalade".

Oman, pays du Golfe qui a longtemps joué les médiateurs entre Téhéran et les Occidentaux, a condamné dans un communiqué "l'attaque israélienne de ce matin contre Ispahan, en République islamique d'Iran, ainsi que les agressions militaires répétées d'Israël dans la région".

Au Caire, un communiqué du ministère des Affaires étrangères indique que "l'Égypte réitère sa profonde inquiétude face à l'escalade entre l'Iran et Israël et met en garde contre une expansion régionale du conflit", ajoutant "intensifier ses contacts avec les parties concernées ou influentes afin de contenir les tensions et l'escalade en cours".

• D'autres fronts

Des frappes israéliennes ont par ailleurs visé ce vendredi à l'aube également des sites de la défense aérienne de l'armée dans le sud de la Syrie, selon le ministère syrien de la Défense, provoquant des "pertes matérielles".

Toujours ce vendredi, l'armée israélienne a dit avoir frappé dans le sud du Liban frontalier du nord d'Israël une "structure militaire" du Hezbollah ainsi que des combattants de ce mouvement libanais soutenu par l'Iran.

Pendant ce temps, la guerre dans la bande de Gaza assiégée, où les 2,4 millions d'habitants sont menacés de famine selon l'ONU, ne connaît aucun répit. Elle a été déclenchée par une attaque inédite menée le 7 octobre 2023 par des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza dans le sud d'Israël, entraînant la mort de 1.170 personnes, en majorité des civils, selon un bilan établi à partir de données officielles israéliennes.

L'armée israélienne a indiqué ce vendredi poursuivre ses opérations dans le centre du territoire. Ces dernières 24 heures, l'armée rapporte avoir détruit "environ 25 cibles y compris des enceintes militaires, des postes d'observation et d'autres infrastructures militaires".

Salomé Robles avec AFP