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Europe

Ukraine: symbole de la révolte, le Maïdan de Kiev démonté par la population

Le camp Maïdan est démonté dans la violence, à Kiev.

Le camp Maïdan est démonté dans la violence, à Kiev. - -

Six mois après la chute de Viktor Ianoukovitch, les habitants de Kiev ont décidé de démonter les barricades du Maïdan, où étaient encore installés, jour et nuit, les manifestants les plus radicaux. Un démontage dans la violence.

C’est ici que la crise ukrainienne a débuté. Là où la police avait échoué, la population l'a fait: plusieurs centaines d'Ukrainiens ont démonté, ce samedi, les barricades et tentes qui occupaient toujours le Maïdan, la place de l’Indépendance, à Kiev. Un grand ménage, qui intervient près de six mois après la chute du président Viktor Ianoukovitch, au milieu de bagarres et de pneus en feu.

Dans une ambiance tendue, les services communaux soutenus par des habitants de la capitale ukrainienne sont arrivés en début de matinée sur la place de l'Indépendance, et le boulevard Khrechtchatik qui la traverse, cœur de la protestation pro-européenne de l'hiver.

Kiev's main street may be clear for the first time today since December pic.twitter.com/e4LGoBbD0X
— pete_leonard (@pete_leonard) 9 Août 2014

"Aider l'armée" au lieu de "rester sur le Maïdan"

Quelques heures plus tard, la chaussée était prête à être rendue à la circulation, coupée depuis presque neuf mois. Seules quelques tentes restaient en place dans l'après-midi sur l'esplanade piétonne, tandis que des camions bennes se remplissaient d'amas hétéroclites de matelas, palettes de bois, lits superposés....

"Mes deux fils combattent dans l'est. Ceux qui restent sur le Maïdan au lieu d'aider l'armée alimentent la propagande des médias russes et de Poutine", a expliqué Serguiï Zakovinski, 57 ans.

Occupé jour et nuit au plus fort de la contestation pro-européenne par des dizaines de milliers de manifestants dont d'influents artistes, dignitaires religieux et représentants de la classe moyenne, le Maïdan a connu ces derniers mois une nette dégradation.

Un Maïdan "discrédité"

Maidan's Molotovs being gathered up for disposal #Kiev #Ukraine pic.twitter.com/ilmawGhVP4
— pete_leonard (@pete_leonard) 9 Août 2014

Ne restaient que les représentants les plus radicaux de groupes d'"autodéfense". Les réactions de rejet de la population allaient croissant, après des bagarres entre militants alcoolisés, voire des fusillades entre factions de manifestants.

"Ils discréditent le Maïdan et doivent partir au plus vite", a ajouté Serguiï Zakovinski, avant de poursuivre, désignant une boîte pleine de cocktails Molotov: "Contre qui comptent-il les utiliser?" 

Les occupants ne se sont pas laissé faire et de nombreuses bagarres ont éclaté. Ils ont mis le feu à un tas de pneus, provoquant un épais dégagement de fumée. Comme au plus forts des affrontements, au début de l’année. "Nous devons continuer à contrôler le pouvoir", s'est justifié Mykola, 27 ans, batte de baseball à la main.

Happening now: #Maidan is on fire again. New authority in #Ukraine, but the old methods remain -Elena Elinova FB|EMPR pic.twitter.com/msCRJTWqTf
— Euromaidan PR (@EuromaidanPR) 9 Août 2014

Au moins trois blessés

La police a fait état de trois blessés et l'atmosphère restait tendue dans l'après-midi. De vifs éclats de voix retentissaient au milieu des attroupements sur la chaussée, devant la scène où leaders politiques d'opposition et artistes venaient soutenir et haranguer la foule pendant l'hiver par des températures bien en dessous de zéro.

Le Maïdan est devenu en novembre 2013 l'épicentre de la contestation pro-européenne ukrainienne, qui a débouché, après trois mois de confrontation de plus en plus tendue avec le pouvoir, sur la chute de Viktor Ianoukovitch. Les affrontements dans les jours précédant sa destitution et sa fuite en Russie ont fait environ cent morts.

Depuis, l'avenir du site fait l'objet d'un débat acharné entre d'un côté ceux qui y voient un sanctuaire inviolable et le garant des idéaux du mouvement de contestation de l'hiver, et de l'autre ceux qui pensent que le centre de Kiev doit retrouver une vie normale et que le combat se situe dans l'Est. Des contestataires en treillis continuaient de monter la garde aux barricades et d'occuper le village de tentes.

L'appel du maire Vitali Klitschko

L'ancien boxeur et maire de Kiev, Vitali Klitschko
L'ancien boxeur et maire de Kiev, Vitali Klitschko © -

Depuis son élection à la mairie fin mai, l'ex-boxeur Vitali Klitschko, l'un des leaders de la contestation, ne cachait pas son impatience, souhaitant voir la vie à Kiev reprendre son cours normal.

Une première tentative de nettoyer la place jeudi a échoué, après des heurts entre forces de l'ordre et manifestants, qui ont résisté à coups de pavés voire de cocktails Molotov.

Présent samedi, Vitali Klitschko a expliqué aux contestataires qu'il était temps de partir. "Ce n'est plus l'EuroMaïdan", surnom du mouvement pro-européen, a-t-il justifié. "Nous avons construit ces barricades pendant plusieurs mois, maintenant il est temps de les démonter".

Jé. M. avec AFP