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Violation de propriété, dégradations... À Minorque, les habitants d'un village menacent de le fermer aux touristes

Photo du village de Binibeca Vell au sud de l'île de Minorque (Espagne), publié le 7 septembre 2018 sur Instagram.

Photo du village de Binibeca Vell au sud de l'île de Minorque (Espagne), publié le 7 septembre 2018 sur Instagram. - Andrea Fergola - Instagram

Victime de son succès, le célèbre village de Binibeca Vell, situé sur l'île de Minorque, envisage de fermer ses rues aux touristes dont l'attitude jugée inconvenante excède les habitants.

Trônant au-dessus de la baie, le village de Binibeca Vell situé au sud de l'île de Minorque (Espagne), attire de plus en plus de touristes. Rues pavées, maisons blanches et balustrades en bois, ce petit quartier pittoresque, surnommé par les médias locaux le "Mykonos espagnol", ne cesse de faire parler de lui sur les réseaux sociaux.

Mais alors que sa notoriété augmente, les habitants de Binibeca Vell menacent de fermer définitivement l'accès au village, excédés par les innombrables selfies et le manque de savoir vivre de certains touristes.

"Le problème, ce ne sont pas les touristes"

Chaque année, plus de 800.000 touristes arpentent les rues étroites de Binibeca Vell, indique le quotidien espagnol El Economista. Une popularité qui outrepasse la tranquillité des quelque 200 habitants qui vivent au sein du petit village de pêcheurs.

Face à la généralisation des incivilités, les résidents envisagent même une fermeture définitive du village aux touristes, qui devra être soumise à un vote lors d'une assemblée générale le 10 août prochain, selon El Economista.

Pour Oscar Monge, représentant de la communauté de Binibeca Vell, "le problème, ce ne sont pas les touristes". Le Minorquin pointe du doigt, au contraire, les autorités locales qui ont selon lui abandonné les habitants livrés au défilé constant des visiteurs et aux détritus qui s’accumulent quotidiennement dans les rues de la ville.

Derrière la menace de fermeture du village par ses habitants se cache en réalité un accord caduc avec les responsables locaux. En effet, chaque année le Conseil de Minoque et la mairie de Sant Lluis versent un peu plus de 25.000 euros par an pour aider les propriétaires des 165 maisons à peindre, nettoyer et entretenir cette image de carte postale de Binibeca Vell.

Cependant, selon El Economista cette aide financière n'a pour l'instant pas été renouvelée pour l'été 2024, les deux parties se rejetant mutuellement la faute. Le désaccord a atteint un tel point que la Communauté des propriétaires de Binibeca Vell a demandé à rencontrer le président de l’île Adolfo Vilafranca jeudi 9 mai.

Interviewé par le journal espagnol El Diario, la responsable du tourisme du gouvernement minorquin Begoña Mercadal a déclaré que le village était tout à fait en droit de demander sa fermeture au public.

"Nous reconnaissons pleinement qu’il s’agit d’une propriété privée et par conséquent s’ils veulent la fermer, c’est leur droit", a-t-elle estimé.

Les visites limitées de 11 heures à 20 heures

En attendant une décision définitive, la Communauté des propriétaires de Binibeca Vell a d'ores et déjà imposé un créneau de visite aux touristes qui s'étend de 11 heures à 20 heures, depuis le 1er mai.

Elle rappelle également aux visiteurs qu'il est indispensable de rester silencieux et respecteux de l'environnement et qu'il est interdit de pénétrer dans les maisons des résidents et de prendre des photos à l'intérieur de leur maison.

"Lorsque vous nous rendez visite, n'oubliez pas que vous êtes entré dans une propriété privée et que vous devez respecter la vie privée des voisins", peut-on lire sur le site.

Pieds sur les murs, affalés dans leurs escaliers ou assis sur leurs terrasses, les résidents de Binibeca Vell n'ont pas non plus hésité à afficher sur le site de la communauté quelques exemples de touristes jugés désinvoltes et un peu trop à l'aise. S'adressant au journal El Diario, en avril dernier, une habitante a confié que certains touristes n'hésitaient pas à entrer dans leurs demeures et à "organiser des beuveries".

"Si ce n'est pas réglementé, cela se produira chaque été", a-t-elle affirmé.

Si la menace de fermeture de Binibeca Vell pourrait bien être mise à exécution, Oscar Monge a reconnu auprès d'El Diario qu'elle nuirait certainement à l'économie locale. "Bien sûr, c’est une décision difficile, mais nous y sommes poussés", a-t-il déclaré.

Orlane Edouard