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Allemagne

"Merkel ne cherchera pas la confrontation avec Hollande"

François Hollande et la Chancelière allemande Angela Merkel, ici lors du G20 organisé en Russie en septembre 2013

François Hollande et la Chancelière allemande Angela Merkel, ici lors du G20 organisé en Russie en septembre 2013 - -

L'inverse ne se produira pas non plus, estime Jean-Dominique Guiliani, président de la Fondation Robert-Schuman. Mieux, ce spécialiste des questions européennes espère que la France et l'Allemagne œuvrent dans les trois années à améliorer l'organisation de l'UE.

Le week-end dernier, Angela Merkel a triomphé lors des élections législatives, reconduite pour la troisième fois dans ses fonctions de chancelière. Un succès qui valide les politiques entreprises tant dans son pays qu'à l'échelle européenne.

Le couple franco-allemand, moteur de la construction européenne n'a jamais paru aussi déséquilibré à première vue tant François Hollande est en difficulté au plan national. Jean-Dominique Guiliani, président de la Fondation Robert-Schuman, un think-thank de réflexion sur l'Europe, livre son analyse de la situation et tranche avec certains présupposés.

Réélue largement en Allemagne, Angela Merkel est aujourd’hui la dirigeante la plus puissante d’Europe…

Angela Merkel est surtout la seule dirigeante d’un pays européen majeur, à avoir été reconduite dans ses fonctions, qui plus est avec huit points supplémentaires par rapport à la dernière élection. C’est une validation de sa politique, même si comme partout en Europe des populismes, notamment le parti AFD, émergent.

En France, comme dans certains pays européens touchés dûrement par la crise, on a qualifié la politique de Merkel de politique d’austérité. Force est de constater qu'une majorité des Allemands estime que le modèle défendu par leur pays fonctionne. De plus, l’opinion allemande a, à mon avis, une conscience économique supérieure aux autres pays. Ce qui lui permet de comprendre des décisions nécessaires. Ainsi, Angela Merkel a, en période de crise, enclenché des réformes comme par exemple le recul de l’âge de départ à la retraite.

Mais l’Allemagne, qui a injecté près de 200 milliards d’euros au moment de la crise comme preuve de son engagement européen, a besoin d’imposer une discipline budgétaire à ses partenaires. Alors si les Allemands ne veulent pas diriger l’Europe, ils n’entendent pas payer pour rien non plus.

Quel serait alors le style Merkel qui séduit une majorité d'Allemands?

Le style Merkel, ce serait de prendre le temps de la décision. Cela plait et rassure car cela donne la sensation d’une stratégie à long terme clairement définie. C’est ce qui manque ailleurs et peut, parfois, donner l’impression que l’Allemagne supplante d’autres pays européens.

Maintenant, libérée des échéances électorales, la chancelière Merkel va pouvoir mener une politique légèrement différente, avec plus de considérations sociales et européennes. D'autant plus qu'elle bénéficie d'une belle cote de confiance.

Cette confiance qui manque en France à François Hollande. Le couple franco-allemand n’est-il pas déséquilibré comme jamais?

Il y a quinze ans, c'était l'inverse, la France caracolait en tête et l'Allemagne était à la traine. Encore une fois le scrutin donne raison à la ligne Merkel mais je ne pense pas qu’elle cherche la confrontation avec la France. François Hollande ne la cherchera pas non plus. Il a été le premier à la féliciter, c'est un signe. Chacun sait que si la France et l’Allemagne s’opposent, rien n’est possible en Europe.

Après, du côté de la CDU (le parti d'Angela Merkel) on attend de voir car l’on a ressenti une germanophobie rampante, assimilable à de la jalousie, chez les socialistes français.

François Hollande et Angela Merkel vont donc travailler main dans la main...

Pendant les trois années à venir la France et l'Allemagne peuvent faire progresser la gouvernance européenne. L’imagination française alliée à la stratégie et à la rigueur allemandes a toujours fait bon ménage. La priorité allemande se situe au niveau de l’Eurogroupe et de la mise en place d’une gouvernance économique et fiscale.

De son côté, après un début de mandat très national, François Hollande, qui est un pro-européen, pourrait donner une dimension européenne à sa fin de quinquennat. La compétitivité ou les réformes dont on parle en France passent toutes par l’intégration de leur dimension européenne.

Propos recueillis par Samuel Auffray