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Russie

Mort d'Alexeï Navalny: Ioulia Navalnaïa affirme qu'elle "poursuivra" l'œuvre de son mari

Ioulia Navalnaïa a promis dans une vidéo publiée ce lundi de continuer l'oeuvre de son défunt mari, l'opposant russe Alexeï Navalny. Ce dernier est mort vendredi à 47 ans dans une prison de l'Arctique.

"Je continuerai pour notre pays". La veuve d'Alexeï Navalny, Ioulia Navalnaïa, a promis de poursuivre la lutte contre Vladimir Poutine menée par son mari et appelé ses partisans à la rejoindre, trois jours après le décès en prison de l'opposant dans des conditions obscures.

Dans une vidéo publiée lundi 19 février, Ioulia Navalnaïa, la voix parfois serrée par l'émotion, est revenue sur le parcours et les souffrances de son époux. Et assuré qu'elle reprendra le flambeau.

"Il y a trois jours, Vladimir Poutine a tué mon mari, Alexeï Navalny. Poutine a tué le père de mes enfants (...) Avec lui, (Poutine) a voulu tuer notre espoir, notre liberté, notre futur", a asséné Ioulia Navalnaïa.

Rencontre avec les ministres des Affaires étrangères de l'UE

"Je poursuivrai l'oeuvre d'Alexeï Navalny. Je continuerai pour notre pays, avec vous. Et je vous appelle tous à vous tenir près de moi (...) Ce n'est pas une honte de faire peu, c'est une honte de ne rien faire, c'est une honte de se laisser effrayer", a-t-elle martelé.

"Nous devons nous unir pour frapper d'un seul coup Poutine, ses amis, les voyous en épaulettes, les courtisans et les tueurs qui veulent paralyser notre pays", a-t-elle encore lancé. Ioulia Navalnaïa a assuré que son équipe allait découvrir qui avait commis "ce crime" contre son mari et dans quelles circonstances.

Elle doit par ailleurs rencontrer lundi à Bruxelles les ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne.

Les proches de Navalny demandent un accès sa dépouille

L'adversaire numéro un du président Vladimir Poutine est mort vendredi à 47 ans dans une prison de l'Arctique, du district autonome de Iamalo-Nénétsie, où il purgeait une peine de 19 ans, suscitant une émotion internationale.

Ses proches ont été privés d'accès à sa dépouille lundi pour le troisième jour consécutif, selon son équipe, qui accuse le Kremlin de l'avoir tué et de chercher à maquiller ses traces.

Selon Kira Iarmich, porte-parole de l'opposant, la mère du défunt, Lioudmila Navalnaïa, n'a pas été "autorisée" à pénétrer dans la morgue où il pourrait être conservé à Salekhard, capitale régionale, à une cinquantaine de kilomètres de la prison où est mort officiellement Alexeï Navalny.

"Ils jouent la montre"

Interrogé sur le sujet, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, s'est borné lundi à dire qu'une enquête était en cours et qu'il n'y avait pas de résultats "pour l'instant". Selon Kira Iarmich, le Comité d'enquête, chargé en Russie des principales investigations criminelles, a affirmé que "les vérifications" liées à la mort de Navalny étaient "prolongées", sans précision des délais.

"La cause du décès est toujours 'indéterminée'. Ils mentent, jouent la montre et ne le cachent même pas", a fustigé Kira Iarmich.

D'après Evguéni Smirnov, un avocat de l'ONG spécialisée Pervy Otdel, les enquêteurs peuvent légalement conserver jusqu'à 30 jours le corps d'une personne décédée en prison. Mais, selon lui, même après ce délai, les autorités peuvent décider d'ouvrir une enquête criminelle, procéder "à de nouvelles manipulations" et garder le cadavre "autant qu'ils le veulent".

"Il est très facile de trouver des raisons juridiques pour garder la dépouille des mois, voire encore plus longtemps", a affirmé l'avocat.

Pas de réaction de Poutine

La mère de l'opposant et un avocat se sont rendus dès samedi dans la colonie pénitentiaire N°3, située dans un endroit reculé, à 2.000 kilomètres de Moscou. Selon les services pénitentiaires russes (FSIN), Alexeï Navalny y est mort vendredi, victime d'un soudain malaise "après une promenade".

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Il était emprisonné depuis son retour en Russie début 2021, après un grave empoisonnement, et sa santé s'était détériorée. Il avait passé près de 300 jours en cellule disciplinaire, aux conditions de détention épuisantes.

Vladimir Poutine, qui ne prononçait jamais le nom d'Alexeï Navalny, n'a toujours fait aucun commentaire sur sa mort, qui intervient un mois avant l'élection présidentielle dont l'issue ne fait aucun doute.

Des hommages réprimés en Russie

Le décès d'Alexeï Navalny a suscité une grande vague d'émotion et d'indignation en Russie et en Occident. De nombreux dirigeants occidentaux ont accusé Moscou d'être responsable de sa mort. Le ministère des Affaires étrangères allemand a convoqué l'ambassadeur russe en Allemagne suite à ce décès, a déclaré lundi une porte-parole du gouvernement, qui a appelé à "la libération de tous les prisonniers politiques en Russie". "En l'absence d'information, nous pensons qu'il n'est absolument pas permis de faire des déclarations aussi odieuses", a réagi lundi le Kremlin.

En Russie, les modestes tentatives pour rendre hommage à l'opposant, en pleine répression et campagne d'intimidation contre toute critique depuis le lancement de l'invasion de l'Ukraine en février 2022, ont été réprimées. Ce week-end, la police russe a arrêté dans des dizaines de villes des centaines de personnes venues déposer des fleurs et allumer des bougies en sa mémoire.

Alexeï Navalny était le représentant de l'opposition le plus marquant en Russie, où il avait acquis une importante popularité grâce à ses enquêtes fouillées sur la corruption sous le régime de Vladimir Poutine.

S.C avec AFP