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Guatemala: la justice accusée de "harceler" des journalistes

Le président du journal El Periodico José Rubén Zamora escorté par la police le 31 janvier 2023, à Guatemala

Le président du journal El Periodico José Rubén Zamora escorté par la police le 31 janvier 2023, à Guatemala - JOHAN ORDONEZ / AFP

Une procédure pénale a été ouverte contre le président du journal El Periodico pour "conspiration pour faire obstruction à la justice" mais aussi contre plusieurs journalistes accusés de "désinformation". Tous démentent les accusations.

Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) a accusé mercredi la justice du Guatemala de vouloir "intimider et harceler" des journalistes qui enquêtent sur des affaires de corruption. Le CPJ demande dans un communiqué de cesser "toute enquête (judiciaire) contre des journalistes et employés" du quotidien d'opposition El Periodico et la libération "sans conditions de son président José Rubén Zamora", âgé de 66 ans. 

José Rubén Zamora est en prison depuis huit mois en attente de jugement sur des accusations de blanchiment d'argent et chantage.

Mardi, un juge a ouvert une nouvelle procédure pénale contre José Rubén Zamora, cette fois pour "conspiration pour faire obstruction à la justice" lors de l'enquête judiciaire lancée contre lui en 2021 pour blanchiment d'argent.

Le juge a également accepté la demande du parquet d'ouvrir une enquête contre plusieurs journalistes d'El Periodico, accusés de "désinformation" dans des articles concernant les procédures lancées contre le président de leur journal.

"Une nouvelle tentative pour criminaliser la liberté d'expression"

Pour le CPJ, les actions de la justice contre El Periodico sont "une tentative évidente des procureurs pour intimider et harceler un journal et des journalistes qui travaillent inlassablement pour révéler la corruption" dans le pays d'Amérique centrale. "Ils ne nous feront pas taire !" a proclamé El Periodico dans un éditorial publié mercredi sur son site internet.

L'association des journalistes du Guatemala a également dénoncé les enquêtes judiciaires ouvertes contre les journalistes du quotidien, dénonçant "une nouvelle tentative pour criminaliser la liberté d'expression".

Le procès pour blanchiment d'argent et chantage contre José Rubén Zamora doit s'ouvrir le 2 mai. Il est accusé d'avoir exigé 37.500 dollars auprès d'hommes d'affaires en échange de la non publication d'informations compromettantes et d'avoir ensuite blanchi ces pots-de-vin.

Le président d'El Periodico clame son innocence et assure qu'il est visé par des poursuites "politiques" fomentées par le président guatémaltèque Alejandro Giammattei et la procureure générale Consuelo Porras afin de faire cesser les publications de son journal sur des affaires de corruption impliquant le pouvoir.

Graves problèmes de corruption

Washington a inscrit en 2021 Consuelo Porras sur une liste de personnes corrompues et qui ont participé au limogeage de l'ancien procureur du parquet spécial anti-corruption Juan Francisco Sandoval.

Une pléiade d'anciens fonctionnaires de la mission anti-corruption de l'ONU au Guatemala (CICIG) et de procureurs anti-corruption guatémaltèques ont été poursuivis et arrêtés depuis l'arrivée au pouvoir de Alejandro Giammattei en 2020.

Le mois dernier, la justice guatémaltèque a annoncé l'ouverture d'une enquête contre le ministre colombien Ivan Velasquez, motivée par de prétendues irrégularités commises durant son mandat à la tête de la CICIG de 2013 à 2019. 

Dans la foulée, le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a exprimé "son inquiétude en raison des nombreuses informations qui suggèrent que ceux qui ont tenté de tirer au clair les affaires de corruption au Guatemala sont l'objet de persécution judiciaire".

S. V. avec AFP