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Séisme au Maroc: combien de temps peut-on espérer retrouver des survivants dans les décombres?

Des volontaires à la recherche de survivants après le séisme, dans le village de Talat N'Yacoub au Maroc, le 11 septembre 2023

Des volontaires à la recherche de survivants après le séisme, dans le village de Talat N'Yacoub au Maroc, le 11 septembre 2023 - Fadel SENNA / AFP

Un peu plus de 48 heures après le tremblement de terre, les secours s'attellent à retrouver des rescapés au Maroc. Ils disposent cependant de peu de temps, alors que les habitats, fragiles, laissent peu d'espoir.

L'espoir après le drame. Plus de 48 heures après le séisme qui a fait plus de 2497 morts, les secouristes et les habitants recherchent des survivants dans les décombres, alors que de nombreuses personnes n'ont toujours pas été retrouvées. Mais le temps presse.

"Chaque heure est importante"

"On est sur une course contre la montre, chaque heure est importante", assurait samedi sur BFMTV le docteur Jean-François Corty, de l'association "Médecins du Monde", environ 24 heures après le séisme.

Aucun décompte du nombre de disparus n'a été fourni par les autorités marocaines, mais selon la télévision publique, "plus de 18.000 familles ont été affectées" par le séisme dans la province d'Al-Haouz, particulièrement touchée par le séisme.

Alors que le Maroc a annoncé avoir accepté l'aide de l'Espagne, de la Grande-Bretagne, du Qatar et des Émirats arabes unis, secouristes marocains et étrangers et membres des forces armées recherchent des rescapés avec l'aide des habitants. Quelques secouristes français sont aussi présents sur place, malgré l'absence de feu vert de Rabat.

De 24 à 72 heures

Caroline Holt, directrice mondiale des opérations pour la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge tirait la sonnette d'alarme peu après le séisme.

"Les prochaines 24 à 48 heures seront décisives pour sauver des vies", affirmait-elle dans un communiqué.

Le professeur Ilan Kelman, chercheur en catastrophes naturelles à l’University College de Londres (UCL), en février dernier, après le séisme en Turquie et en Syrie déclarait auprès de l'AFP de son côté que "plus de 90 % des rescapés des tremblements de terre sont secourus dans les trois jours suivant la catastrophe". S'il était un peu plus optimiste, le chercheur rappelait bien que le temps est toujours compté.

Cibler des "zones de survies"

C'est pourquoi, les secours sur place tentent de perdre le moins de temps possible dans leurs recherches. "La priorité, c'est d'envoyer, dans les zones où il y a potentiellement des victimes, des chiens de recherche (...) qui sont là pour dire s'il y a des victimes vivantes ou non", explique à BFMTV Christophe Bezzazi, sapeur-pompier volontaire du SDIS07, envoyé au Maroc.

"C'est très rapide, on passe deux chiens et en moins de 5 minutes il vous dit s'il y a quelqu'un ou non", précise-t-il.

Outre cet appel aux chiens, les secours ciblent les zones où ils ont le plus de chances de trouver des rescapés. "On essaye de trouver des bâtisses où il y a des lieux de survie", explique notamment à BFMTV le secouriste Patrick Villardry, arrivé dans la nuit de samedi à dimanche au Maroc.

Dans ces espaces, souvent très réduits, les survivants disposent de suffisamment d'espace pour respirer et parfois d'un peu d'eau pour survivre.

Une météo plus favorable qu'en Turquie

"En général, ce ne sont pas les séismes qui tuent les gens, mais les effondrements des bâtiments", rappellait toutefois en février le professeur Ilan Kelman.

Les personnes prises dans les décombres sont de fait souvent blessées par les morceaux de bâtisses qui leur tombent dessus et doivent être rapidement pris en charge par des médecins. D'autres sont écrasés par des débris et manquent d'air. Là aussi, leur chance de survie diminue rapidement avec le temps.

Pour retrouver des rescapés, "il y a le facteur chance", reconnaît le secouriste Patrick Villardry, mais aussi la météo. Cette fois, au Maroc, "il n'y a pas le froid, comme en Turquie (touchée par un séisme en février dernier, NDLR), donc on a la possibilité de retrouver des vies", veut-il croire.

Si le froid n'est pas source d'inquiétude, la chaleur en est une, alors que le thermomètre devrait atteindre les 33°C ce lundi au Maroc. Le taux de survie sans boire est baisse en effet drastiquement après trois jours et surtout quatre jours.

Des habitations fragiles et difficiles d'accès

Pour autant, les difficultés sont nombreuses au Maroc, alors que le séisme a frappé des zones montagneuses, où il est complexe d'accéder. "On a de nombreux morts et blessés sur un territoire étendu, qui va de Marrakech à la ville de Taroudant", explique sur BFMTV le docteur Jean-François Corty.

"Il y a beaucoup d'habitations en pisé (terre crue NDLR) et en pierre dans des zones reculées qui sont difficiles d'accès", précise-t-il.

De fait, ce type de maisons, fragiles et ne répondant pas aux normes sismiques, laisse craindre un bilan encore à la hausse. "Les petites maisons qui sont faites avec de la terre, de la pierre, ne sont pas aptes à répondre à ces séismes", explique à RMC l'architecte Patrick Coulombel, cofondateur de la "Fondation Architectes de l'urgence".

D'autant que "beaucoup (de Marocains) ne peuvent payer des architectes et finissent par construire leurs maisons eux-mêmes", ajoute Omar Farkhani, ex président de l'ordre national des architectes du Maroc.

Pour autant, le secouriste Patrick Villardry assure avoir toujours de l'espoir de retrouver des survivants. "En Turquie, au mois de février, on a sauvé deux personnes huit jours après. Et quand on est partis, quinze jours après, ils ont trouvé une autre personne", se souvient-il.

Juliette Desmonceaux