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Afrique

Démission du président en Centrafrique: les cris de joie des habitants

Des jeunes anti-Séleka manifestent leur joie vendredi à Bangui, après les démissions au sommet.

Des jeunes anti-Séleka manifestent leur joie vendredi à Bangui, après les démissions au sommet. - -

Le président centrafricain Michel Djotodia a démissionné vendredi à N'Djamena sous la pression des dirigeants d'Afrique centrale qui l'y avaient convoqué pour un sommet extraordinaire. Les habitants se reprennent à espérer.

Bangui laisse éclater sa joie. Lorsque la nouvelle de la démission du président centrafricain Michel Djotodia est parvenue dans la capitale, des milliers d'habitants en liesse sont descendus dans les rues. Dans les grandes artères de la ville, ils chantaient ou hurlaient en courant "C'est fini, c'est fini, la paix va revenir!". Ce nouvel épisode politique sonne pour eux comme une délivrance, car beaucoup accusaient le dirigeant de passivité face aux massacres entre chrétiens et musulmans.

Le Premier ministre, Nicolas Tiangaye, avec qui Michel Djotodia entretenait des relations notoirement mauvaises contribuant à paralyser toute action publique face aux tueries à grande échelle, a également démissionné. Les deux hommes se trouvaient toujours à N'Djamena vendredi.

La situation dans la capitale le soir demeurait néanmoins "tendue mais sous contrôle", selon une source militaire française, qui a fait état de tirs sporadiques et de tentatives de pillage. "Il y a eu un regain de tension cet après-midi. Nous nous sommes réarticulés auprès des sites sensibles et notre but est de contenir tout embrasement de la situation sécuritaire. Nous sommes en état d'alerte et d'attention maximale".

Ce qu'il va se passer désormais

La Constitution provisoire centrafricaine stipule que le président du CNT assure un intérim, de 15 jours maximum, le temps d'organiser l'élection d'un nouveau président par le Conseil. Le nouveau président de transition exercera ses fonctions jusqu'aux élections générales dont la date n'est pas encore arrêtée. Aux termes d'un accord antérieur, ce scrutin devait avoir lieu dans un délai de 18 mois à compter de l'investiture du président Djotodia en août dernier.

La France, qui a lancé l'opération Sangaris le 5 décembre dernier, et qui a milité pour une intervention internationale afin de faire cesser les violences, a demandé un remplacement "dans les plus brefs délais" de Michel Djotodia. "Il faut que le Conseil national de transition (CNT, Parlement provisoire, ndlr) établisse l'alternative provisoire, parce que le but est d'aller avant la fin de l'année à des élections", a plaidé le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian.

Le secrétaire d'Etat John Kerry s'entretiendra de la République centrafricaine avec son homologue français Laurent Fabius à l'occasion de sa visite à Paris dimanche et lundi, a annoncé vendredi un diplomate américain. Par ailleurs, l'Union européenne a donné vendredi son accord de principe au lancement d'une mission militaire européenne pour soutenir les interventions française et africaine.

La victoire des dirigeants d'Afrique centrale

Les dirigeants de la Communauté économique des Etats d'Afrique centrale (CEEAC), réunis au sommet depuis jeudi à l'initiative du chef de l'Etat tchadien Idriss Déby Itno, "ont pris acte de la démission" du président et du Premier ministre centrafricains. Vendredi peu avant 4 heures, après des tractations marathon, ces dirigeants avaient demandé au CNT de préparer un accord aboutissant à une mise à l'écart de Michel Djotodia et Nicolas Tiangaye, selon des sources proches des négociations, malgré le refus de proches du président.

En ouvrant le sommet, Idriss Déby avait dressé un réquisitoire contre la direction centrafricaine: "un seul constat doit être fait et il est amer: la RCA (République centrafricaine) subit au plus profond d'elle-même les agissements de ses propres fils, plongeant leur pays dans une guerre qui compromet dangereusement son avenir". Le président tchadien a rejeté la responsabilité de la crise sur les politiques centrafricains. "S'il y a eu échec, c'est celui de la classe politique dans son ensemble", a-t-il lancé jeudi soir aux membres du CNT, concluant: "la transition n'a pas fonctionné".

Depuis le renversement en mars 2013 du président François Bozizé par une coalition hétéroclite à dominante musulmane, la Séléka, dirigée par Michel Djotodia, la Centrafrique a été emportée dans une spirale de violences communautaires et interreligieuses sous le regard impuissant des institutions de transition.

A. G. avec AFP