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Crash en Egypte: la revendication de Daesh est-elle crédible?

La branche égyptienne du groupe Etat islamique a revendiqué ce samedi le crash de l'avion Airbus A321 russe dans le Sinaï, où l'intégralité des 224 passagers a perdu la vie. Une hypothèse rapidement balayée par la Russie, mais qui étonne, de l'aveu de plusieurs spécialistes de Daesh.

C'est une annonce à appréhender avec la plus grande précaution. Et avec tout autant de sérieux. La branche égyptienne du groupe jihadiste Etat islamique (EI) a affirmé ce samedi être responsable du crash de l'avion charter russe dans le Sinaï, dans l'est de l'Egypte, faisant 224 morts. Une revendication fermement rejetée du côté de la Russie, mais qui soulève beaucoup de questions. Instrumentalisation d'une catastrophe, acte de propagande, ou réel attentat? Elements de réponse.

Twitter comme outil de communication

Tout a commencé quand la branche égyptienne du groupe jihadiste Etat islamique (EI) a affirmé sur Twitter être responsable du crash de l'avion, sans préciser par quel moyen:

"Les soldats du Califat ont réussi à faire tomber un avion russe dans la province du Sinaï transportant plus de 220 croisés qui ont tous été tués".

Le message est alors rapidement authentifié et relayé par plusieurs experts, comme le journaliste David Thomson de RFI. Tous, dès lors, rappellent une chose: à chaque fois que Daesh a communiqué de la sorte, c'était de manière officielle. Jamais le groupuscule de l'EI a fait une revendication dans le vent.

Représailles aux "bombardements" russes en Syrie, dit l'EI

Dans son communiqué, l'EI dit agir en représailles aux "dizaines de morts (causés) quotidiennement par les bombardements" des avions russes en Syrie. Très vite, Moscou a contesté cette revendication, qui "ne peut être considérée comme exacte", a évacué le ministre russe des Transports Maxime Sokolov.

Depuis la destitution par l'armée du président islamiste Mohamed Morsi en juillet 2013, les jihadistes ont multiplié les attentats visant les forces de sécurité, notamment dans le nord de la péninsule du Sinaï, où des centaines de policiers et de soldats ont été tués dans des attaques spectaculaires.

Toutefois, plusieurs experts militaires estiment que les insurgés de l'EI, dont le nord du Sinaï est le bastion, ne disposent pas de missiles capables d'atteindre un avion à 30.000 pieds, mais n'excluent pas la possibilité d'une bombe à bord ou qu'il ait été atteint par une roquette ou un missile alors qu'il redescendait à la suite de défaillances techniques.

"Tout est possible" 

"Tout est possible", résume à ce stade Mathieu Guidère, spécialiste de l’islam, interrogé ce samedi sur BFMTV.

"L’organisation de l’Etat islamique ne revendique pas à la légère. Il en va de sa crédibilité".

"L'organisation de l'Etat islamique, dans sa province du Sinaï, contrôle plusieurs tribus. Elle est probablement infiltrée à la fois dans les aéroports, parmi le personnel, et donc il est parfaitement possible que l'avion n'ait pas été abattu par un missile en plein vol, mais saboté au départ, ou au début du vol, voire carrément par un kamikaze en plein vol", juge cet expert.

"Le commandant de bord aurait eu le temps d'envoyer un message"

La piste terroriste, balayée dès la découverte des débris sur le site du crash au Sinaï avant d'être réactivée par les militants de l'Etat islamique, semble peu probable selon le consultant en aéronautique de BFMTV, l'ancien pilote Jean Serrat:

"Le commandant de bord aurait eu le temps d’envoyer un message à Charm el-Cheik, pour dire: 'j’ai un problème technique', sans aller au-delà, en demandant de revenir"", a-t-il ainsi rappelé sur notre antenne, relayant plusieurs informations dévoilées dès ce samedi matin par plusieurs sources égyptiennes. "On n'est pas dans le cas du 'Mayday', il n'a pas parlé de destruction, il a dit 'j'ai un grave problème je fais de demi-tour'".

Le contact avec le charter de la compagnie russe Kogalymavia, plus connue sous le nom de Metrojet, a été perdu 23 minutes après son décollage à l'aube de l'aéroport de Charm el-Cheikh, au bord de la mer Rouge, alors qu'il volait à une altitude de plus de 30.000 pieds (9.144 mètres) et après que le capitaine de bord s'est plaint d'une défaillance technique des équipements de communication, selon un responsable de l'autorité de contrôle de l'espace aérien en Egypte.

L'examen des boîtes noires, retrouvées assez rapidement par les enquêteurs sur place, permettra d'y voir plus clair. A ce titre, plusieurs agents français du BEA seront dès ce dimanche sur les lieux du drame.

La rédaction avec AFP