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Attaque au Kenya: la confusion demeure à Nairobi

Des soldats kenyans postés à l'une des issues du centre commercial Westgate de Nairobi, lundi 23 septembre 2013.

Des soldats kenyans postés à l'une des issues du centre commercial Westgate de Nairobi, lundi 23 septembre 2013. - -

La prise d'otages et l'exécution de civils kényans et étrangers dans un centre commercial luxueux de Nairobi s'est poursuivi toute la journée de lundi. Dans la soirée, le gouvernement kényan a indiqué un dénouement "proche". Mais la confusion demeure.

Cela fait désormais plus de trois jours que des assaillants sèment la terreur dans un centre commercial de Nairobi, au Kenya, où ils retiennent en otage des civils de différentes nationalités, après avoir exécuté de sang-froid de nombreuses victimes qui tentaient de fuir. Lancées à leur poursuite dans les dédales de ce luxueux centre commercial, les forces armées kényanes, épaulées par des forces spéciales israéliennes, se livrent à un terrible jeu de cache-cache.

Lundi soir, le ministère de l'Intérieur kényan a affirmé que les forces kényanes contrôlent le centre commercial. De son côté, le gouvernement indique que le siège approche de la fin. Mais la confusion règne quant à la réalité de la situation sur place et la précaution est de mise. BFMTV.com fait le point.

>> Revivez ici les événéments de la journée de lundi

> Vers la fin du siège?

Le gouvernement kényan a indiqué, tard dans la soirée de lundi, que le siège du centre commercial Westgate, à Nairobi, commencé samedi après-midi et qui a fait au moins 62 morts, serait "proche de la fin". Les forces spéciales kényanes "nettoieraient" le centre commercial sans rencontrer de "résistance", a ainsi indiqué le porte-parole du gouvernement, Manoah Esipisu, précisant que tous les otages auraient été évacués.

Quelques instants plus tard, le ministère de l'Intérieur kényan a affirmé que les forces nationales "contrôlent" le centre commercial. "Nous contrôlons le Westgate", a ainsi simplement déclaré le ministère sur son compte Twitter.

Mais selon l'envoyé spécial de BFMTV au Kenya, François-Xavier Ménage, la situation est loin d'être si claire sur place, les médias locaux relayant ces dernières informations avec beaucoup de précautions. Les forces de sécurité interrogées n'évoquent pas de dénouement imminent. La confusion continue donc de régner.

> Que s'est-il passé?

Samedi, à la mi-journée, une dizaine d'hommes armés et masqués font irruption dans le centre commercial bondé de Westgate à Nairobi. Ils ouvrent le feu à l'arme automatique et à la grenade sur une foule cosmopolite de clients et sur le personnel. Ils progressent dans les lieux, sur quatre étages, et exécutent tous les clients sur leur passage.

Les forces de l'ordre, arrivées trente minutes après les premiers tirs, pénètrent à leur tour et se déploient dans le centre, tandis que les assaillants retiennent un nombre indéterminé d'otages, dans différents endroits. Plus tard dans la soirée, les islamistes shebabs somaliens revendiquent l'attaque. 

Dimanche soir, alors que près de 200 blessés ont pu être évacués, les assaillants, leurs otages, et les forces spéciales entament une seconde nuit d'horreur. Lundi midi, de fortes explosions sont entendues dans le centre commercial. Depuis, une épaisse colonne de fumée noire s'élève constamment des toits. Un membre des forces spéciales évoque "une partie de cache-cache" avec les assaillants. Lundi en début de soirée, l'opération est présentée comme proche de la fin.

> Combien de victimes?

Selon un dernier bilan de la Croix-Rouge kényane, l'attaque a fait au moins 62 morts, 63 disparus, et environ 200 blessés. Parmi eux figurent plusieurs étrangers, dont deux Françaises, quatre Britanniques, un Sud-Africain, une Sud-Coréenne, une Néerlandaise, un Péruvien, deux Indiens et deux Canadiens, ainsi qu'un célèbre poète et homme d'Etat ghanéen, Kofi Awoonor.

Les deux Françaises sont Corinne et Anne Duchauffour, une mère et sa fille. La mère, artiste-sculpteur originaire de Nice, vivait à Nairobi depuis 2001 avec son époux, propriétaire d'un hôtel. La fille, elle, était âgée d'une vingtaine d'années et avait rejoint le Kenya il y a quelques mois.

La justice française a décidé d'ouvrir une enquête préliminaire pour assassinat et tentative d'assassinat en lien avec une entreprise terroriste.

> Qui sont les forces qui interviennent face aux assaillants?

Les policiers kenyans ont rapidement été rejoints par l'armée, peu après le début des opérations. Selon une source sécuritaire, des agents israéliens, ultra-entraînés, interviennent à leurs côtés. Rien d'étonnant à cela pour le chercheur Philippe Hugon, interrogé par BFMTV.com. "Israël fait partie du jeu de lutte contre le jihadisme en Afrique. Il était logique qu'il envoie en renfort ses forces spéciales".

Dimanche en fin de journée, le président kényan Uhuru Kenyatta a aussi indiqué avoir reçu des offres d'aide de plusieurs autres "pays amis", tout en assurant que l'opération restait pour l'instant une "opération kényane".

La progression des militaires est rendue très difficile par la complexité des lieux. Il faut sauver le maximum d'otages et trouver les assaillants, qui profitent des nombreux magasins pour se cacher, tout en étant prêts à mourir lors du dénouement.

> Y a-t-il des étrangers parmi le commando islamiste?

C'est l'une des interrogations de cette affaire. Selon l'armée kényane, les assaillants sont de différentes nationalités. Washington a dit enquêter sur des informations non confirmées faisant état de la présence d'au moins trois ressortissants américains.

La police kényane, elle, se penche sur la possible présence de la Britannique Samantha Lewthwaite, veuve d'un des kamikazes qui s'étaient fait exploser lors des attentats du 7 juillet 2005 à Londres, et membre des Shebabs.

Un responsable shebab présenté par la BBC sous le nom d'"Abou Omar" a cependant parlé de rumeurs "infondées", affirmant que les islamistes ne "demandaient pas à leurs soeurs de mener des attaques militaires de ce type". Il a aussi affirmé qu'aucun étranger ne figurait parmi le commando.

Alexandra Gonzalez et Adrienne Sigel avec AFP