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Affaire Weinstein: un scandale mondial en cinq points

Harvey Weinstein entouré entre autres de Ben Affleck et Bradley Cooper.

Harvey Weinstein entouré entre autres de Ben Affleck et Bradley Cooper. - Christopher Polk / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP

Depuis l'article coup de tonnerre jeudi dernier dans le New York Times, les témoignages de femmes affluent concernant les agissements présumés du producteur américain Harvey Weinstein, accusé de nombreux harcèlements sexuels, agressions sexuelles et de trois viols. Beaucoup des victimes présumées sont des actrices hollywoodiennes. En l'espace d'une semaine, le scandale est devenu mondial.

Harvey Weinstein, l'un des producteurs américains les plus puissants d'Hollywood, est tombé de son piédestal il y a une semaine. Jeudi dernier, le New York Times publiait un papier faisant état de nombreuses accusations de harcèlements sexuels et d'agressions sexuelles dont se serait rendu coupable au fil des ans cet homme bien installé dans le monde du cinéma depuis les années 90.

Trois femmes, parmi lesquelles l'actrice Asia Argento, ont même dit avoir été victimes de viols. Le scandale est mondial, tant par les nationalités des figures intervenant dans ce dossier que par le retentissement de ce qui semble une des crises les plus profondes traversées par le cinéma américain et international. Deux enquêtes ont d'ores et déjà été ouvertes ce jeudi: l'une à New York pour une agression sexuelle présumée dans la ville en 2004, l'autre au Royaume-Uni concernant une agression sexuelle qui aurait été commise dans les années 1980 dans la région de Londres. 

Américaines, Européennes, les actrices sortent du silence

D'Asia Argento à la comédienne Lucia Stoller, en passant entre autres par Rosanna Arquette, Rose McGowan et Gwyneth Paltrow, mais aussi par des femmes à la notoriété moindre ou anonymes, les témoignages accablants pleuvent sur Harvey Weinstein. 

Et le dossier est loin de se cantonner aux dimensions d'une affaire seulement américaine. En plus de l'Italienne Asia Argento, plusieurs vedettes françaises ont fait entendre leur voix. Emma de Caunes et Judith Godrèche ont été les premières à relater leur expérience. Mercredi, dans une tribune écrite pour le Guardian, Léa Seydoux a fait de même. "Nous parlions sur le canapé quand il a soudainement sauté sur moi et a essayé de m’embrasser. J’ai dû me défendre. Il est grand, et gros, alors j’ai dû résister vigoureusement", a-t-elle posé, décrivant ce qui était sa première rencontre avec cet homme longtemps incontournable dans le milieu artistique.

Ce jeudi, dans les colonnes du Parisien, l'actrice Florence Darel a évoqué le contenu d'une discussion avec le producteur en 1995. Devant les avances de ce dernier, elle a d'abord répondu qu'elle était "très amoureuse de son compagnon". "Il m'a répondu que ça ne le gênait pas du tout et m'a proposé d'être sa maîtresse quelques jours par an. Comme ça, on pourrait travailler ensemble. En gros, si tu veux continuer en Amérique, passe par moi", a-t-elle poursuivi. Elle avait pu s'enfuir. 

Des témoignages accablants de toutes parts

Ces dernières heures, Kate Beckinsale et Cara Delevingne, notamment, se sont ajoutées à cette longue liste de plaignantes. Cara Delevingne a raconté mercredi sur Instagram qu'au début de sa carrière cinématographique, Harvey Weinstein l'avait appelée lui demandant si "elle couchait avec les femmes avec lesquelles on la voyait s'afficher". "Un an ou deux plus tard", se trouvant à nouveau face à lui, Cara Delevingne a entendu le producteur tenter de la pousser à embrasser une autre femme présente dans la pièce. "Il m'a raccompagnée, puis est resté devant moi. Il a essayé de m'embrasser sur les lèvres. Je l'ai arrêté et j'ai réussi à sortir", a-t-elle ajouté. 

Une autre intervention médiatique pourrait peser lourd contre Harvey Weinstein: celle de son frère et associé dans l'industrie du cinéma, Bob Weinstein. Comme le note le site de NBC News, ce dernier a écrit dans un communiqué, au sujet d'un homme qu'il qualifie de "grand malade": "Il a dit qu'il irait chercher de l'aide et il doit encore le faire. Il a déjà prouvé qu'il était un menteur de classe mondiale et à présent, plutôt que de chercher de l'aide il cherche à rejeter la faute sur d'autres".

  • Des stars internationales accusées d'avoir appuyé l'omerta

Le mot d'"omerta" parcourt sans cesse la presse américaine ces jours-ci. Comment, si les faits allégués sont avérés, Harvey Weinstein a-t-il pu agir ainsi en toute impunité? Le silence observé par des hommes-clés du monde du cinéma, eux aussi des célébrités internationales, est désormais sur le devant de la scène publique. 

Ainsi, après avoir fait circuler sur Facebook sa "tristesse et sa colère", Ben Affleck a été sèchement taclé par Rose McGowan. Celle-ci a estimé que l'interprète et réalisateur "mentait" dans la mesure où il lui avait laissé entendre être au courant par le passé. Matt Damon, lui, a été accusé d'avoir tenté de décourager une journaliste d'enquêter plus avant sur les agissements de Weinstein. Chose que la star a vigoureusement niée auprès de Deadline: "Pour votre information, je n’essaierais jamais, au grand jamais, de tuer une histoire comme ça. Je ne ferais pas ça. Ce n’est pas quelque chose que je ferais pour qui que ce soit". 

Dans un autre registre, Leonardo DiCaprio a partagé sa position sur Facebook: "Il n'existe aucune excuse au harcèlement sexuel ou à l'agression sexuelle - peu importe qui vous êtes, ce que vous faites. J'applaudis le courage et la force de ces femmes qui ont fait entendre leur voix".

L'émotion des dirigeants du festival de Cannes 

C'est en effet le monde du spectacle tout entier qui se trouve éclaboussé par le scandale. L'institution cinématographique la plus prestigieuse a aussi livré son mot sur l'affaire. Mercredi, le président et délégué général du festival de Cannes, Pierre Lescure et Thierry Frémaux, ont inscrit leurs réflexions dans une déclaration commune. 

"C'est avec consternation que nous avons découvert les accusations de harcèlement et de violence sexuelle récemment portées contre Harvey Weinstein, professionnel du cinéma dont l'activité et la réussite sont connues de tous, qui lui valent de séjourner à Cannes depuis de nombreuses années et d'avoir de nombreux films sélectionnés au Festival International du Film dont il est une figure familière. Ces faits relèvent d'un comportement impardonnable qui ne peut susciter qu'une condamnation nette et sans appel. Notre pensée va aux victimes, à celles qui ont eu le courage de témoigner et à toutes les autres. Puisse cette affaire contribuer à dénoncer une nouvelle fois des pratiques graves et inacceptables", ont-il écrit. 

  • Deux présidents américains et une ex-secrétaire d'Etat à charge

L'ampleur du scandale a redoublé par les mots des figures les plus éminentes de la politique américaine. Le président des Etats-Unis Donald Trump a lancé samedi à des journalistes: "Je connais Harvey Weinstein depuis très longtemps, je ne suis pas du tout surpris de voir cela". Son prédécesseur Barack Obama s'est montré plus disert. "Michelle et moi sommes écœurés par les dernières révélations concernant Harvey Weinstein. Tout homme qui se comporte de manière dégradante avec les femmes doit être condamné et rendu responsable de ses actes, quelles que soient sa richesse et son statut", a-t-il fait observer, comme le relaie ici Europe 1, associant son épouse à sa réprobation. 

Mais une femme politique était particulièrement attendue au tournant: l'ancienne secrétaire d'Etat et candidate à la présidentielle, Hillary Clinton. Et pour cause, Harvey Weinstein est un donateur historique du Parti démocrate, auquel appartient la candidate malheureuse à la présidentielle américaine, et a contribué financièrement à sa campagne. Après avoir gardé le silence cinq jours, Hillary Clinton a informé le public sur Twitter de son "écœurement". "Je suis choquée et écœurée par les révélations sur Harvey Weinstein. Le comportement décrit par les femmes qui s'expriment ne peut être toléré. Leur courage et le soutien des autres est crucial pour mettre un terme à ce genre de comportements". Ne pouvant rembourser directement les sommes perçues, elle a assuré qu'elle les reverserait à des associations caritatives. 

Robin Verner