BFM Immo
Prix immobilier

Immobilier: il n'y a plus que des cadres et des retraités qui peuvent encore acheter à Paris

Selon le portrait robot des acheteurs parisiens publié par Century21, la part des cadres et des professions libérales est écrasante avec plus de 83% des ventes. La part des jeunes et des ouvriers baisse encore, celle des retraités augmente.

Paris est une ville de plus en plus inaccessible malgré la légère baisse des prix observée en 2021. Avec un prix moyen de plus de 10.000 euros/m² qui semble d'ailleurs être un palier pour l'instant, les ménages qui peuvent acheter dans la capitale sont ceux qui présentent les revenus les plus élevés ou qui disposent d'un bon niveau d'apport personnel, majoritairement des cadres ou professions libérales qui représentent plus de 80% des acheteurs en 2021 selon le réseau immobilier Century21.

A Paris, le budget médian constaté par les notaires de France s'élève à 485.000 euros. Au sein du réseau Century21, il est légèrement plus élevé et atteint 511.700 euros. Et pour emprunter cette somme ou s'en rapprocher, les salaires doivent dépasser 6.000 euros selon nos estimations du salaire nécessaire pour un crédit de 500.000 euros.

De plus en plus de cadres

En 2021, les cadres moyens comptabilisent 41,4% des achats et les cadres supérieurs et les professions libérales 42,5% selon Century21. Ainsi, face au niveau de revenus nécessaires pour acquérir un logement à Paris, la part des acheteurs de moins de 30 ans est en baisse de 8% en 2021, pour atteindre 15,9% des clients du réseau d'agences immobilières. Dans le même temps, la proportion des retraités est en augmentation sans discontinuer depuis 5 ans pour représenter 8,3% des acheteurs selon le réseau.

>> Estimez le prix de votre bien immobilier avec notre simulateur gratuit

"Le niveau des prix à Paris écarte les plus modestes du marché", résume Laurent Vimont, président de Century21.

"Les employés et les ouvriers voient leur part baisser de 4% en 2021, alors qu'elle avait déjà reculé de 6% en 2020 par rapport à 2019. En revanche, les cadres moyens augmentent de 2% et les cadres supérieurs de 2,5%", poursuit-il. Les employés et les ouvriers représentent ainsi 4,3% des opérations du réseau et les commerçants et les artisans 3,6%. Certains arrondissements (19e, 18e et 13e) qui n'ont pas encore dépassé la barre de 10.000 euros/m² en moyenne sont alors des marchés prisés par les acquéreurs aux budgets les plus serrés, notamment pour des petites surfaces.

Il s'agit ici d'une spécificité des grandes métropoles et en particulier de la capitale. À l'échelle nationale, les acquéreurs employés ou ouvriers représentent 35,3% des acquéreurs, contre 25,2% de cadres moyens et 16,5% de cadres supérieurs et professions libérales. Les notaires de France constatent également des écarts qui se creusent entre les employés et les cadres puisque ces derniers représentent 58% des acquéreurs à Paris selon leur bilan de l'année 2021. Même constat à Lyon où ils représentent 52% des achats, une proportion plus élevée qu'à Nantes (44%) ou Toulouse et Grenoble (43%).

Peu de marges de manœuvre pour les plus modestes

Les budgets varient en fonction de ces différentes villes, mais les nouvelles normes du Haut conseil de la stabilité financière (HCSF) pèsent sur les plus jeunes et les plus modestes. Selon Artémis Courtage qui a présenté son bilan de l'année 2021, un vieillissement des emprunteurs est à noter (25% des emprunteurs ont entre 30 et 34 ans en 2021 contre 32% en 2020) avec un recul du nombre de primo-accédants: 40% des dossiers du réseau en 2021, contre 44% en 2020.

"Les contraintes HCSF, devenues normes en 2022, avec le désormais célèbre taux d'endettement de 35%, ont plus d'impact sur les primo-accédants qui n'ont pas les mêmes latitudes que les ménages avec des revenus plus confortables ou un apport plus élevé", souligne Ludovic Huzieux co-fondateur du courtier en prêt immobilier.

Constat encore plus vrai en Ile-de-France. "On observe un désamour des emprunteurs pour l'Ile-de-France et Paris puisqu'ils bénéficient d'une marge de manœuvre moins élevée en raison du taux d'endettement limité et de prix plus élevés. Et la part dérogatoire de 20% (les banques ont le droit de ne pas respecter les critères d'endettement et de durée des prêts pour 20% de leur production, mais sous certaines conditions, NDLR) ne suffit pas à solvabiliser tous les primo-accédants", ajoute Ludovic Huzieux. Le courtier constate des hausses des montants empruntés (3%), du niveau de revenus (6%) et de l'apport (1,3%) en 2021 par rapport à l'année précédente. Conséquence des prix élevés et des règles pour emprunter, les durées des prêts augmentent pour atteindre 20 ans, et de façon plus marquée pour les primo-accédants avec une hausse de 6 mois de la durée d'emprunt moyenne constatée en 2021 pour cette typologie d'acquéreurs pour atteindre 23 ans et 1 mois.

Report du projet ou éloignement

Ainsi, les acquéreurs les plus modestes et les jeunes doivent trouver des solutions pour réaliser un achat immobilier dans un contexte de hausse généralisée des prix partout en France. Présenter un bon niveau d'apport, ou une épargne de sécurité, n'est pas toujours suffisant pour acheter dans les grandes villes. Et certains reportent leur projet ou s'éloignent pour accéder à la propriété... Paris n'étant tout simplement pas à portée de toutes les bourses.

Il n'est donc pas étonnant de constater une hausse de l'activité immobilière dans les régions à moins de deux heures de Paris. Des régions qui allient cadre de vie privilégié et prix plus abordables. Le classement 2022 de Meilleurtaux et MeteoJob révèle d'ailleurs que Mulhouse, Dijon et Orléans sont les villes les plus attractives en termes de prix et d'emplois en CDI.

"Les prix des logements vont être un sujet majeur de l’année, marquée par l’élection présidentielle: prix dans l’ancien, mais aussi prix de la construction en forte hausse, et la pression constante du volet énergétique sur le budget des ménages (factures d’énergie et pression sur la rénovation énergétique)", estime Pierre Chapon, président du courtier Pretto. Pour lui, la clé pour réussir son projet, quelle que soit la ville visée, est de bien préparer son étude de financement et de présenter une épargne suffisante avec des revenus stables.

Marion Marten-Pérolin