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Traversée de la Manche: ce que l'on sait du naufrage qui a fait cinq morts au large de Wimereux

Cinq migrants sont morts dans la nuit de samedi 13 à dimanche 14 janvier alors qu'ils tentaient de traverser la Manche. Deux autres ont été blessés, dont un gravement.

Le premier drame meurtrier de 2024 dans la Manche. Cinq personnes sont mortes au large de Wimereux (Pas-de-Calais) dans la nuit de samedi 13 à dimanche 14 janvier, alors qu'elles tentaient de rejoindre une embarcation pour traverser la mer et se rendre au Royaume-Uni.

· Une tentative de traversée, des heures de recherches

Les faits se sont déroulés vers 1h45, dans une eau à 9°C. Un bateau a été mis à l'eau à distance du rivage à Wimereux (Pas-de-Calais) dans la nuit de samedi à dimanche, a indiqué le parquet de Boulogne-sur-Mer à l'AFP.

"12 à 15 personnes étaient à bord, d'autres s'apprêtaient à monter" quand il "a basculé" à cause de "la houle et de la marée montante".

"Plusieurs naufragés tentent de rejoindre la plage. Les forces de sécurité intérieure présentes sur place interviennent pour secourir les personnes les plus proches du bord", a détaillé la préfecture maritime de la Manche et la mer du Nord.

Un remorqueur d'intervention a alors été déployé "en patrouille dans la zone" et l'équipage a aperçu trois personnes inanimées en mer vers 2 heures du matin. Deux d'entre elles ont pu être récupérées par le remorqueur alors que la troisième l'a été par les services terrestres, en bord de plage.

Une quatrième personne inanimée a été aperçue dans les rochers près de la plage puis hélitreuillée et prise en charge par les secours. Deux autres personnes ont ensuite été secourues, une inanimée évacuée en urgence absolue vers l'hôpital de Boulogne-sur-Mer et une autre en hypothermie sévère, prise en charge sur place.

Enfin, "vers 08h45, une sixième personne inanimée a été retrouvée au bord de la plage de Wimereux. Cette personne n'a malheureusement pas pu être réanimée", termine la préfecture maritime.

Un remorqueur d'intervention, d'assistance et de sauvetage, un hélicoptère et deux moyens de la SNSM (une vedette et un semi-rigide) ont été déployés en tout sur l'intervention.

· Cinq morts, deux blessés, 32 rescapés

Cinq personnes sont mortes lors de cette tentative de traversée. Une sixième a été transférée en urgence absolue à l'hôpital de Boulogne-sur-Mer et une septième a été légèrement blessée. Le parquet indique que les victimes seraient des jeunes hommes d'origine syrienne, une information "à confirmer".

La préfecture maritime a également fait état de 32 rescapés qui ont été conduits dans un hangar de Calais, a constaté une journaliste de l'AFP. Le lieu a été mis à disposition des migrants dans le cadre du plan grand froid.

"Des familles entières avec des enfants, dont certains en bas âge" figurent parmi eux, selon une des personnes chargées de leur accueil, qui ne souhaite pas donner son nom.

Une enquête a été ouverte, notamment pour "homicides involontaires aggravés", "aide au séjour d'étrangers en situation irrégulière en bande organisée" et "association de malfaiteurs".

· La "colère" du maire de Wimereux

Invité de BFM Grand Lille lundi 15 janvier, Jean-Luc Dubaële, maire de Wimereux, est revenu sur ce naufrage mortel qu'il juge "scandaleux". Surtout, il a pointé du doigt la responsabilité des Anglais.

"C'est une grande tristesse et une colère vis-à-vis des Anglais. À un moment donné, il faut que les Anglais prennent leur responsabilité", a-t-il affirmé sur BFM Grand Lille.

"Si les migrants veulent aller en Angleterre c'est pour une bonne raison, ils sont bien accueillis, ils peuvent travailler sans contrat de travail, des dispositions contraires à la France. C'est pour cette raison qu'on a un gros problème migratoire", a-t-il ajouté.

Avant de terminer: "Au niveau des Anglais, je les tiens responsable. Au niveau des passeurs, ce sont des criminels, des assassins qui profitent de cette situation, de cette misère humaine. C'est un trafic d'hommes, de femmes et d'enfants."

Le maire de Wimereux, qui estime qu'il faut revoir les accords du Touquet signés en 2003 par Nicolas Sarkozy, a eu Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur, au téléphone dimanche. Il lui a notamment parlé de la nécessité de travailler "ensemble" avec les Anglais.

· Une nouvelle "déchirante" pour David Cameron

Auprès de la BBC, David Cameron, le chef de la diplomatie britannique, a affirmé que cette nouvelle "déchirante" lui "bris(ait) le cœur". Elle "montre aussi à quel point nous devons stopper les bateaux, stopper ces trafics et les êtres humains qui sont derrière".

"Dans un monde idéal, nous renverrions juste ces personnes en France, et le trafic s'effondrerait. Mais ce n'est pas possible, et c'est pour cela que nous poursuivons cette politique avec le Rwanda", a-t-il continué.

Les députés britanniques doivent se prononcer cette semaine sur le projet de loi permettant d'expulser vers le Rwanda les migrants arrivés illégalement au Royaume-Uni.

· La mise au point du préfet du Pas-de-Calais

Le préfet du Pas-de-Calais, Jacques Billant, a tenu un point presse dimanche dans la journée. Il a affirmé que ce naufrage mortel "démontre une nouvelle fois l'importance de notre mission de lutte contre les réseaux de passeurs et contre les traversées maritimes".

"Ce sont là des réseaux criminels qui font courir des risques inconsidérés aux populations migrantes. Prendre la mer dans une eau à 7°C, c'est aller à la mort. Avec une durée de vie limitée à 10 minutes en cas de chavirage", a-t-il ajouté.

En tout, 182 personnes ont été secourues au large par des moyens français au cours de la nuit de samedi à dimanche et dans la journée de dimanche, d'après le bilan de la préfecture maritime.

En 2023, 29.437 migrants ont rejoint illégalement les côtes anglaises, contre 45.774 en 2022, année record, selon des chiffres du ministère britannique de l'Intérieur. Douze migrants ont perdu la vie l'année dernière.

Marine Langlois avec AFP