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Environnement

Nord Stream: les graves conséquences écologiques des fuites de gaz en mer Baltique

Bouillonnements en Mer Baltique après trois grandes fuites dans les gazoducs Nord Stream 1 et 2, le 27 septembre 2022

Bouillonnements en Mer Baltique après trois grandes fuites dans les gazoducs Nord Stream 1 et 2, le 27 septembre 2022 - HANDOUT / DANISH DEFENCE / AFP

Le gaz qui s'échappe sans discontinuer depuis mardi des gazoducs en mer Baltique contient surtout du méthane, un gaz à effet de serre plus dévastateur que le dioxyde de carbone.

Des "conséquences dramatiques" pour l'environnement. Les impressionnants bouillonnements à la surface de la mer Baltique depuis mardi sont dus à des fuites des gazoducs Nord Stream, qui semblent avoir été délibérément endommagés. En pleine guerre en Ukraine, ce grave incident tend un peu plus la situation internationale mais inquiète également sur le plan écologique.

Les fuites vont libérer "plusieurs millions de tonnes d'équivalent CO2" dans l'atmosphère, affirme à l'AFP Sascha Müller-Kraenner, de l'ONG environnementale allemande DUH, ce qui aura des "conséquences dramatiques" en matière de réchauffement climatique.

Des millions de tonnes de méthanes libérées dans l'atmosphère

"Le gaz qui était contenu dans les gazoducs était principalement composé de méthane", explique sur BFMTV Anna-Lena Rebaud, chargée de campagne climat chez les Amis de la Terre. Or, le méthane est un gaz à effet de serre "beaucoup plus puissant que le dioxyde de carbone (CO2), cela va avoir un impact direct sur le climat, cela va accélérer la hausse des températures."

Le méthane est "un puissant gaz à effet de serre", écrit en effet l'ONU. Aujourd'hui c'est surtout l'agriculture qui est pointée du doigt pour sa production car elle en est la "source prédominante". Sur "une période de 20 ans, son effet de réchauffement est 80 fois plus puissant que celui du dioxyde de carbone", écrit encore l'ONU.

Or, ces fuites en mer Baltique ont libéré des millions de tonnes de méthane, et tout le gaz contenu dans les pipelines "pourrait avoir le même potentiel de destruction climatique que 30 millions de tonnes de dioxyde de carbone", selon une estimation de l'ONG Greenpeace, soit l'équivalent "des émissions annuelles de 20 millions de voitures dans l'Union Européenne".

Ces estimations restent pour le moment suspendues à la potentielle fermeture de ces fuites. L'impact écologique "va dépendre de la durée de la fuite, et de sa taille", explique Anna-Lena Rebaud. Mais "on estime que cette fuite pourrait être deux fois pire que la pire fuite de l'histoire, qui avait lieu aux États-Unis entre 2015 et 2016 et avait duré quatre mois".

La fuite n'avait cette fois pas eu lieu au large, mais près de Los Angeles, en Californie, donc à proximité d'habitations. Des habitants du quartier de Porter Ranch avaient alors dû déménager, "plusieurs d’entre eux ont subi des nausées aigues, des céphalées, des saignements de nez et d’autres effets liés au mercaptan, au benzène et aux autres composants chimiques contenus dans le gaz", expliquait alors Greenpeace.

"Une semaine ou deux" avant une intervention

Les vannes de méthane en mer Baltique devraient rester ouvertes encore plusieurs jours, selon les données actuelles. En raison des vastes bouillonnements provoqués par les trois fuites, "cela peut facilement prendre une semaine ou deux avant que la zone soit suffisamment calme pour simplement voir ce qui s'est passé", a ainsi affirmé Morten Bødskov, ministre danois de la Défense.

"C'est une très grosse explosion qui s'est produite, et il faudra donc du temps avant que nous puissions y descendre", a souligné le ministre à propos des gazoducs, qui sont situés à environ 80 mètres de profondeur.

"Ce gazoduc est au fond de la mer, donc cela rend l'intervention très difficile, ce qui fait que cela peut prendre plusieurs jours, voire plusieurs semaines", explique également Anna-Lena Rebaud. "On a peur que le temps que l'on répare la fuite, la majorité du gaz contenu actuellement dans le gazoduc ait déjà fui dans l'atmosphère."

"Le méthane ne se dissout pas dans l'eau"

Outre l'évasion dramatique du méthane, tant que les fuites ne sont pas réparées, il existe également des risques d'explosion à la surface de l'eau: les autorités ont pour cette raison pris des interdictions de naviguer et de voler dans les zones concernées.

Pour la faune et la flore maritimes, en revanche, les conséquences sont limitées. "Le méthane ne se dissout pas non plus dans l'eau, il n'y a donc heureusement rien à craindre", affirme à l'AFP le ministère de l'Environnement.

"La majorité du gaz va aller dans l'atmosphère, mais il y a aussi une partie qui se dissout dans l'eau et qui peut avoir un impact sur la biodiversité", déclare Anna-Lena Rebaud, "mais comparé à l'impact que cela va avoir sur le climat, c'est presque minime."

Les organisations de protection de l'environnement pointent en tout cas du doigt cet épisode pour rappeler l'importance de sortir des énergies fossiles. "Les sources d'énergies renouvelables ne sont pas seulement respectueuses du climat, elles sont également sûres", déclare Mads Flarup Christensen, à la tête de Greenpeace Nordic.

Salomé Vincendon
Salomé Vincendon Journaliste BFMTV