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Climat

Le changement climatique, facteur souvent oublié de la crise migratoire

Chaque année, près de 20 millions de personnes migrent à cause des catastrophes climatiques. François Hollande a prévenu à l'ouverture de la COP 21 que le réchauffement climatique "annonce des conflits comme la nuée porte l'orage".

Une actualité en chasse une. L'été a été marqué par l'afflux de migrants prêt à tout pour arriver en Europe. La guerre en Syrie est revenue dans le débat après les attaques revendiquées par Daesh au Liban, en France, en Turquie et en Egypte. Et la COP21 qui se tient à Paris met en lumière le réchauffement climatique.

Si ces trois sujets apparaissent souvent déconnectés, ils sont pourtant reliés. La Syrie offre en effet l’exemple d’une société déstabilisée par l’aléas climatique. "Une partie de la crise syrienne trouve son origine dans une série de sécheresses qui a frappé le pays", expliquait au Monde en septembre dernier, François Gemenne, chercheur en sciences politiques et spécialiste des migrations environnementales.

"Il y a un faisceau de preuves que la sécheresse entre 2007 et 2010 qui a touché le Moyen Orient a contribué au conflit syrien. Cette sécheresse, la pire jamais relevée dans la région, a causé une généralisation des mauvaises récoltes et des migrations de masses des zones rurales vers les centres urbains", notaient des chercheurs dans une étude publiée en mars 2015 dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences.

Cette étude a également révélé que la sécheresse avait fait monter le prix des aliments et aggravé les maladies infantiles liées à la malnutrition, contribuant encore à l’instabilité qui a fini par mener la Syrie à la guerre civile. Presque cinq ans plus tard, les conséquences de cette guerre sur les migrations et l'essor de Daesh sont indéniables.

20 millions de déplacés par an

Ce phénomène est loin d'être isolé. Depuis 2008, chaque année 20 millions de personnes dans le monde sont contraintes de fuir des ouragans, des inondations ou des sécheresses. BFMTV s'est entretenu dans les allées de la COP21 avec Hindou Oumarou Ibrahim, négociatrice tchadienne et porte-voix des peuples sahéliens.

"La rareté des ressources naturelles fait que les populations se rabattent sur le peu de ressources qui restent et ça créé des conflits interhumains, des conflits intercommunautaires et des conflits inter-Etats", explique-t-elle.

"Ces familles qui vivaient de l'agriculture aujourd'hui ne peuvent plus vivre de l'agriculture a cause notamment de la dégradation des sols. Elles vont d'abord essayer de migrer vers les villes. Parfois, si elles ne trouvent pas un emploi ou des conditions de vue satisfaisantes en villes, elles vont tenter de migrer vers l'Europe pour celles qui ont le plus de moyens, ou vers des pays du Maghreb", développe François Gemenne.

Le réchauffement "annonce des conflits comme la nuée porte l'orage"

"D’ici à 2020, 60 millions de personnes pourraient migrer des parties dégradées de l’Afrique sub-saharienne vers l’Afrique du Nord et l’Europe", estime Monique Barbut, secrétaire exécutive de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la Désertification (CNULD). Une préoccupation qui est au cœur de la COP21.

"Ce qui est en cause avec cette conférence sur le climat, c'est la paix", a déclaré François Hollande dans son discours d'ouverture du sommet. Il a prévenu que le réchauffement "annonce des conflits comme la nuée porte l'orage" et "provoque des migrations qui jettent sur les routes plus de réfugiés que n'en génèrent les guerres ".
Karine Lambin avec Jean-Rémi Baudot