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Krach de 1847: quand le train boursier a déraillé

La gare d'Euston et ses marquises de fer forgé en 1837.

La gare d'Euston et ses marquises de fer forgé en 1837. - Wikipedia

Dans les années 1840, il semble que les chemins de fer français suscitent l'engouement national. Mais les rêves de fortune sur les rails se sont vite transformés en cauchemar économique.

Qui est la vedette de la révolution industrielle? Le chemin de fer. Les Français, intéressés par les trains, commencent à investir sur ce marché. Il faut seulement attendre le 8 décembre 1836 pour que la première société ferroviaire soit cotée en Bourse de Paris.

Cette frénésie draine également le marché de la sidérurgie, tant et si bien que son cours grimpe de 70% entre 1840 et 1847. Investisseurs et banques, tous avides de profits rapides, ne ratent pas le train de cette spéculation. Et pour cause, les trois plus importantes compagnies ferroviaires annoncent des dividendes particulièrement juteux, de l'ordre de 10%.

Concurrence sur le rail français, on est loin du compte dans En route pour demain - 02/12
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18:00

1840: début de la spéculation, le train accélère. Sous un fond de révolution industrielle, la demande de transport monte en flèche. La loi du 11 juin 1842 ouvre la porte à une bulle spéculative. Créer un réseau de chemin de fer à moindre coût devient alors un jeu d’enfant.

La machine est lancée. L’industrie ferroviaire se développe si bien que l’on répertorie déjà plus de 2.000 kilomètres concédés. Les capitalisations des chemins de fer représentent encore à elles seules la moitié du marché boursier français, évalué à 2,5 milliards de francs.

L’euphorie spéculative déraille

Mais le train de la spéculation finit par s'emballer. Comme dans tous les krach boursiers, l’euphorie des investisseurs finit par dérailler.

Dans ce contexte déjà fébrile, la suspension des travaux sur la ligne Paris-Lyon marque un tournant décisif. Prise au piège par des coûts sous-estimés, la compagnie se résout à lancer un nouvel emprunt colossal de 100 millions de francs. Pire encore, le dividende jadis prometteur de 7% chute à 4%, semant le doute parmi les actionnaires. Ils réalisent alors que les prévisions du secteur étaient surestimées. La conséquence? Une panique bancaire s'installe, inexorablement.

Cette situation s'envenime avec l'annonce simultanée de la Banque de France. Dans une tentative désespérée de sauvegarder son encaisse or, elle décide de remonter ses taux d'intérêt à 5%. De quoi exacerber davantage la panique financière.

Les dégâts des nouvelles technologies

Les actionnaires, pris de panique, se débarrassent en hâte de leurs actions ferroviaires. Entre 1846 et 1848, l’action de la Compagnie du Nord -une des principales composantes de la SNCF- chute de moitié et plafonne désormais à 250 francs. Sans surprise, le système bancaire jongle avec les faillites en chaîne des entreprises.

La France s’enfonce dans une récession historique avec un recul de la croissance de près de 22 points. En matière de péripéties ferroviaires, les Français ne sont pas au bout de leurs surprises. Prélude à de nombreux désagréments à venir sur les voies?

Romy Azoulay