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TOUT COMPRENDRE - Les conséquences de l'abaissement de la note de la France par l'agence Fitch

Redoutée par le gouvernement, la dégradation de la note de crédit de la France opérée vendredi par l'agence Fitch devrait avoir peu de conséquences immédiates pour Paris, dont la dette reste recherchée par les investisseurs.

L'agence de notation financière internationale Fitch a annoncé ce vendredi avoir abaissé la note de la France à "AA-", qualifiant les tensions sociales autour de la réforme des retraites comme un "risque pour le programme des réformes" en cours. Dans la foulée, ce samedi, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a donc tenu à rassurer en réaffirmant la volonté du gouvernement "à faire passer des réformes structurantes pour le pays". Retour sur les conséquences économiques que la dégradation de la note française peut engendrer.

• Qu'a décidé l'agence Fitch?

Comme les deux autres grandes agences de notation (S&P et Moody's), la principale activité de Fitch consiste à évaluer la capacité des Etats à rembourser leur dette, en leur attribuant une note matérialisée par des lettres. La meilleure note étant AAA (crédit de qualité optimale), la pire étant C ou D (défaut de paiement) selon les agences.

Vendredi, la note de la France a été dégradée d'un cran, à "AA-", contre "AA" précédemment. Pour justifier sa décision, l'agence évoque notamment "des déficits budgétaires importants et des progrès modestes" concernant leur réduction, après trois ans d'abondantes dépenses publiques destinées à amortir le choc du Covid et de l'inflation.

Avec un double A, la dette française est encore jugée de "très bonne qualité" par Fitch et reste plus généralement prisée des investisseurs, qui apprécient sa sécurité. Mais elle a été dégradée au dernier échelon avant le simple A, qui correspond à un crédit de "bonne qualité".

• Quels précédents en France?

Certes désagréable, l'épisode de vendredi est moins marquant que la perte par la France de son triple A au début des années 2010 (S&P et Moody's ont privé Paris de ce sésame en 2012, Fitch en 2013).

"C'était le saut dans l'inconnu", racontait début mars Anne-Laure Kiechel. "À ce moment-là, on se dit qu'on peut avoir certains investisseurs qui vont moins participer" à l'achat de la dette française sur les marchés, ajoute la fondatrice du cabinet Global Sovereign Advisory, spécialisé dans la dette des Etats.

À l'heure actuelle, les agences S&P (AA avec perspective négative) et Moody's (Aa2, perspective stable) attribuent toutes deux la troisième meilleure note possible à la France. La première doit actualiser sa notation le 2 juin.

• Quelles conséquences pour l'économie française?

L'abaissement de la note de la France n'a pas pris les investisseurs totalement de court, Fitch ayant assorti le double A jusqu'ici détenu par Paris d'une "perspective négative", ce qui ouvrait la voie à une dégradation.

Samedi, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a cherché à rassurer en réaffirmant la volonté du gouvernement "à faire passer des réformes structurantes pour le pays". Dans son évaluation, Fitch avait qualifié les fortes tensions sociales autour de la réforme des retraites de "risque pour le programme de réformes" du président Emmanuel Macron.

Sur la question de la dette, "ne doutez pas de notre détermination totale à rétablir les finances publiques de la nation (...) à accélérer le désendettement du pays, à réduire les déficits et à accélérer la réduction des dépenses publiques", a insisté samedi Bruno Le Maire.

Lors de la perte du triple A en 2012-2013, la France "n'a pas perdu d'investisseurs" sur sa dette, assure Anne-Laure Kiechel. En effet, plusieurs autres pays européens avaient également été dégradés par les agences de notation, ce qui a relativisé la gravité de l'épisode pour les marchés.

"Par contre, on sait qu'il y a des notations plus critiques: si on passait en catégorie simple A, là il est possible que certains investisseurs" achètent moins de dette française, avertit Anne-Laure Kiechel.

• Pourquoi cette baisse de la note financière de la France est à relativiser?

Parmi les grands pays européens, la France est moins bien notée que l'Allemagne (triple A chez les trois grandes agences). Mais Berlin fait figure d'exception, à l'heure où Moody's menace de dégrader l'Italie d'un échelon pour classer sa dette dans la catégorie peu enviable des investissements spéculatifs.

Autre poids lourd de l'économie européenne, l'Espagne est également moins bien notée que la France, au contraire des Pays-Bas qui jouissent toujours de la meilleure note possible auprès de Moody's, Fitch et S&P.

Quel que soit leur profil, tous les pays européens sont confrontés depuis 2022 au même défi, à savoir la remontée des taux d'intérêt, qui renchérit le coût des dettes souveraines.

P. B. avec AFP