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Naissances au plus bas depuis 1946: le gouvernement a-t-il des solutions pour enrayer la chute?

Alors que la natalité n'en finit pas de chuter, les propositions de l'exécutif pour enrayer la baisse tardent à émerger.

La situation commence à inquiéter au sommet de l’État. En mai dernier, Emmanuel Macron a tiré la sonnette d’alarme lors d’une réunion à l’Élysée. Il a même demandé à Alexis Kohler, le secrétaire général de la présidence, de faire remonter des propositions des ministères. Objectif: stopper l'hémorragie de naissances dans le pays.

Car il y a urgence. Ce jeudi, l’Insee a annoncé une nouvelle baisse du nombre de naissances dans le pays. -7,2% sur les huit premiers mois de l’année, soit 35.000 bébés en moins par rapport à la même période en 2022.

Depuis 2011, la chute est inexorable. Le pays est passé en une décennie de 830.000 naissances par an à 726.000 en 2022 et on va peut-être tomber sous les 700.000 cette année. Du jamais vu depuis 1946. À ce rythme là, ce n’est plus qu’une question d’années avant que le nombre de décès dépasse celui des naissances. Les démographes l'anticipent pour 2026.

Le nombre de naissances est passé de 830.000 à 726.000 en France selon l'Insee.
Le nombre de naissances est passé de 830.000 à 726.000 en France selon l'Insee. © BFMTV

Les démographes tâtonnent

Comment la France, relativement épargnée par ce phénomène et qui avait même connu un mini "baby boom" dans les années 2000, a-t-elle perdu le désir d'enfants?

Les démographes sont un peu démunis lorsqu'il s'agit d'expliquer ce phénomène de "baby crash". Ce qu’on peut dire c’est que l’âge moyen de la maternité n'a cessé d'augmenter ces deux dernières décennies. On est ainsi passé de 29,4 ans en 2003 à plus de 31 ans en 2022. C'est d'ailleurs auprès des femmes âgées de 25 à 34 ans que la natalité recule le plus fortement.

Un retard qui s'explique par l’allongement de la durée des études, le fait que les couples se forment plus tardivement, mettent plus de temps à se stabiliser dans leur vie professionnelle… Or, lorsque l'on fait des enfants plus tard, on raccourcit la période de fertilité et on a donc moins d'enfants.

À cela on peut ajouter des phénomènes psychologiques plus difficilement quantifiables comme l'éco-anxiété, la crainte en l'avenir ou la volonté de limiter son empreinte environnementale qui peuvent influencer le désir d'enfant.

"Nos enfants, nos retraites"

Mais un pays moins peuplé après tout est-ce si grave? A court terme non. Mais sur la durée, une population qui décline, cela peut avoir des conséquences économiques majeures sur le pays. Ce n’est d'ailleurs pas un hasard si de nombreux pays comme l’Italie ou la Corée du Sud confrontés au même problème multiplient les politiques natalistes.

Moins de naissances, c’est à terme un marché du travail qui se contracte (donc moins de richesses produites et moins de redistribution), un déclin potentiel du marché immobilier (on déménage et on fait construire à l’arrivée d’un enfant) mais c’est aussi un système des retraites en déséquilibre profond.

"Nous ne préparons pas nos retraites par nos cotisations, mais par nos enfants", avait coutume de dire le démographe français Alfred Sauvy.

À défaut d'avoir une pyramide des âges équilibrée, le pays aura davantage de difficultés à financer ses retraites à l'avenir. Si les individus ne font pas des enfants pour des raisons économiques, leurs choix de vie ont toutefois des conséquences parfois non désirées.

Des pistes timides

Le gouvernement a-t-il des pistes pour relancer la natalité? Les politiques en la matière portent rarement leurs fruits. Encourager la natalité revient à influencer les choix très intimes des individus et à faire évoluer des normes sociales sur le nombre d'enfants profondément ancrées dans l'inconscient collectif.

D'autant plus difficile que les propositions de l'exécutif paraissent pour l'heure très timides. Il y a bien une enveloppe de 6 milliards d'euros sur 6 ans pour notamment proposer 200.000 solutions de garde en plus d’ici 2030. Mais c’est à peu près tout.

Du côté de la ministre de la Solidarité et des Familles Aurore Bergé, on souhaiterait rendre plus attractif le congé parental en augmentant sensiblement la prestation (429 euros par mois) mais en en diminuant la durée. Une proposition qui fait l'objet de discussion mais qui n'est pas inscrite dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2024.

Baby Crash : que fait le gouvernement pour enrayer la baisse de la natalité au plus bas depuis l'après-guerre ?
Baby Crash : que fait le gouvernement pour enrayer la baisse de la natalité au plus bas depuis l'après-guerre ?
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On est donc loin de la mobilisation générale souhaité par Emmanuel Macron, avec par exemple des mesures d’incitation fiscale plus ambitieuses. Les politiques natalistes sont comme la volonté d'avoir un enfant; le risque c’est qu’à trop attendre il risque d’être trop tard.

Frédéric Bianchi
https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco