BFM Business
International

T-shirts, autocollants, mugs: comment les "goodies" financent les candidats à l'élection présidentielle américaine

Le premier "goodie" de l’histoire de la démocratie américaine aurait été le pin “GW” distribué par Georges Washington lors de sa campagne en 1789.

Une tasse avec la photo d'identité judiciaire de Donald Trump, un body pour bébé "Joe Biden me fait pleurer", un blouson en cuir "anti-woke"… Les candidats à la présidentielle américaine de 2024 proposent à la vente une collection de "goodies", qui rapportent gros à leurs campagnes.

En moins d'une semaine, l'équipe de campagne de Donald Trump, candidat aux primaires républicaines, se targue ainsi d'avoir levé près de 3 millions de dollars grâce à la vente de produits dérivés du "mugshot" déjà célèbre de l'ancien dirigeant en Géorgie.

Une casquette rouge devenue culte

Le septuagénaire républicain, connu pour être un as de la communication, avait déjà marqué les deux dernières présidentielles en commercialisant ses casquettes rouges "Make America Great Again" -grâce auxquelles on reconnaît encore aujourd'hui ses partisans à travers les États-Unis.

Une casquette Make America Great Again
Une casquette Make America Great Again © Mark Makela / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP

La vente de ces "goodies" représente une manne intéressante pour le milliardaire comme pour ses rivaux, dans un pays où les campagnes électorales se jouent à coup de milliards de dollars. L'élection de 2020 fut la plus chère de l'histoire des États-Unis, et celle de 2024 pourrait sans grande surprise dépasser ce record.

Les t-shirts, affiches et pin's proposés par les candidats permettent aussi "d'impliquer bien plus leurs partisans", qui deviennent des sortes de "panneaux publicitaires ambulants" pour leurs campagnes, note Peter Loge, de l'université George Washington.

Les supporters de Joe Biden, président octogénaire candidat à sa réélection, peuvent ainsi se procurer un crop top, un haut laissant voir le bas du ventre, à 32 dollars avec "Dark Brandon" - une sorte d'alias virtuel du dirigeant au regard laser, un "mème" populaire dans le camp démocrate.

Dark Brandon, l'alias virtuel de Joe Biden au regard laser.
Dark Brandon, l'alias virtuel de Joe Biden au regard laser. © Wikimedia Commons

Une longue tradition des “goodies”

L'histoire des "goodies" de campagne est intimement liée à celle de la démocratie en Amérique: des pin's "GW" étaient déjà distribués pour l'élection du premier président, George Washington, en 1789.

"Ça a commencé avec des affiches et des broches, fabriquées par les partisans" des candidats, souligne Jon Grinspan, commissaire chargé de l'histoire politique au Musée national d'histoire américaine du Smithsonian. Puis "au 20ème siècle, les partis se sont emparés du concept et on a vu arriver beaucoup de produits plutôt légers et farfelus", affirme l'expert.

Des gants de cuisine pour Mitt Romney, des préservatifs anti-Bush... Les partis politiques rivalisent d'originalité dans leurs produits dérivés qui deviennent de nouvelles sources de financement.

Les tapettes à mouche de Biden

Jamais un candidat ne pourrait financer sa campagne par la seule vente de ces marchandises. Mais ces produits, souvent un peu loufoques, donnent aux politiques l'occasion d'exister dans un monde rythmé par des moments viraux et des petites phrases qui font le tour des réseaux sociaux, argue le professeur Peter Loge.

"Tout en politique va plus vite aujourd'hui", analyse-t-il. "Et c'est tellement facile et peu cher de produire des choses."

Comme lorsque Nikki Haley, la seule femme dans la course à l'investiture républicaine, a décliné en quelques heures t-shirts, autocollants et affiches en réponse au commentaire d'un présentateur de CNN, qui estimait que la candidate quinquagénaire n'était "plus dans la fleur de l'âge".

Ou quand, en octobre 2020, une mouche était venue se poser sur la chevelure blanche du vice-président de Donald Trump, Mike Pence, lors d'un débat télévisé -une scène qui avait fait les choux gras de la campagne de Joe Biden, alors candidat démocrate à la Maison Blanche.

L'équipe de campagne du démocrate avait immédiatement mis à la vente des tapettes à mouche "Truth over Flies" ("La vérité plus forte que les mouches"), pour 10 dollars l'unité, levant quelque 350.000 dollars en 24 heures.

"C'est ce qu'on fait nous les Américains", s'amuse le professeur Peter Loge. "On invente toujours de nouvelles façons saugrenues de se faire de l'argent... y compris avec la fonction présidentielle."

P. B. avec AFP