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"Drinkflation": ces brasseurs qui réduisent la teneur en alcool de leurs bières face à l'inflation

Face à l'envolée de leurs coûts, plusieurs brasseurs britanniques ont décidé de réduire le degré d'alcool de leurs boissons sans baisser leurs prix. Une pratique qui permet de faire des économies, notamment en payant moins de taxes.

C'est une pratique de plus en plus répandue outre-Manche. Dans un contexte d'inflation persistante, plusieurs brasseurs britanniques ont décidé ces derniers mois de réduire la teneur en alcool de leurs bières sans pour autant baisser leurs prix, rapporte une enquête du Daily Mail.

Cette tendance a été baptisée "drinkflation" (contraction de "drink" (boire) et d'"inflation"), un néologisme cousin de la "shrinkflation" (du verbe "shrink", rétrécir), autre pratique qui consiste pour les industriels à dissimuler les hausses de prix de leurs produits en réduisant la quantité proposée.

Des millions de livres d'économies

La "drinkflation", elle, ne se traduit pas par une réduction du format des bouteilles qui conservent la même contenance. Seule la teneur en alcool est abaissée, ce qui permet aux brasseurs de payer moins de droits d'accises sur les boissons alcoolisées. Un tour de passe-passe d'autant plus intéressant financièrement pour les producteurs qu'une refonte profonde du système de taxation sur l'alcool, plus avantageuse pour les boissons avec un faible degré d'alcool, va entrer en vigueur en août au Royaume-Uni.

L'enquête du Daily Mail montre que la bière Foster's, commercialisée par Heineken outre-Manche, a vu sa teneur en alcool passé de 4 à 3,7% depuis le début de l'année. Tandis que la bière Old Speckeld Hen est passée de 5 à 4,8%, la Spitfire Amber Ale de 4,5 à 4,2% et la Bishops Finger de 5,4 à 5,2%.

D'après le journal britannique, ces réductions permettre d'économiser environ 2 à 3 pence par bouteille. Chercheur à l'Université de Sheffield, Colin Angus, affirme pour sa part que les fabricants pourraient économiser collectivement 250 millions de livres sterling de droits d'accises si chacun d'entre eux réduisait la teneur en alcool de ses produits de seulement 0,3%.

Hausse des coûts et santé publique

Accusés d'augmenter discrètement leurs marges, les brasseurs se défendent et assurent que cette pratique leur permet seulement de se protéger face à l'envolée des coûts: "Les événements de ces dernières années ont considérablement augmenté les coûts", a déclaré Greene King, producteur de la bière Old Speckled Hen, assurant vouloir "continuer de chercher des moyens d'absorber ces coûts croissants pour s'assurer que nous continuons d'offrir à nos clients la même valeur et le même goût de Old Speckled Hen".

"Les brasseurs ont été confrontés à des augmentations de coûts croissantes et, dans la mesure du possible, ont absorbé les coûts pour éviter que les clients ne paient trop", a confirmé Emma McClarkin, directrice générale de la British Beer and Pub Association.

D'autres entreprises du secteur sont allées jusqu'à dire qu'elles avaient décidé de réduire le degré d'alcool de leurs produits pour des raisons de santé publique.

La "drinkflation" s'observe au-delà des frontières du Royaume-Uni. En France, cette pratique a été au coeur d'un litige entre Carrefour, Système U et le groupe Bacardi-Martini qui avait décidé fin 2022 de réduire la teneur en alcool du Get 27 et 21 à 17,9% sans faire baisser son prix. Quelques mois plus tôt, c'était Aperol qui faisait évoluer son degré d'alcool, de 15 à 12,5%.

https://twitter.com/paul_louis_ Paul Louis Journaliste BFM Eco