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Transports

La SNCF condamnée à payer pour un TGV en retard

« De plus en plus de pannes, de retards, d’incidents techniques… et ça n’émeut ni la SNCF ni l’Etat ! », estime Jean-Claude Delarue, président de la Fédération des usagers des transports et services publics.

« De plus en plus de pannes, de retards, d’incidents techniques… et ça n’émeut ni la SNCF ni l’Etat ! », estime Jean-Claude Delarue, président de la Fédération des usagers des transports et services publics. - -

En janvier 2010, une acupunctrice de 33 ans rate des rendez-vous professionnels, son train Paris-Lyon ayant eu près de 7 heures de retard. Jugeant qu’elle a ainsi perdu une partie de son chiffre d’affaire, la justice a condamné ce vendredi la SNCF à lui verser des dommages et intérêts. Une décision qui pourrait faire jurisprudence...

Si votre train arrive en retard, vous pouvez vous retourner contre la SNCF et vous pouvez même gagner ! C'est ce qui est arrivé à Céline Claret-Coquet, une acupunctrice de 33 ans : en janvier 2010, elle devait voir un client à Paris, mais son train Paris-Lyon a eu 6 heures et demi de retard.
Elle considérait donc avoir perdu son chiffre d'affaire du jour, et la justice lui a donné raison vendredi dernier : la SNCF est condamnée à lui rembourser son billet et à lui verser 800€ de dommages et intérêts et de frais de justice.
La décision du tribunal d'instance de Paris pourrait faire jurisprudence, au moins pour les usagers qui voyagent, comme elle, dans le cadre professionnel.

« Ras-le-bol des retards permanents ! »

Céline Claret-Coquet explique pourquoi elle a attaqué la SNCF : « J’ai perdu une journée de travail, et surtout une clientèle puisque c’était la première fois que j’allais chez ce client ; donc c’était vraiment embêtant de ne pas pouvoir honorer mes rendez-vous. La moitié des gens que je devais voir ce jour-là n’ont pas voulu comprendre et la SNCF, quelque part, ils s’en fichent complètement. J’ai perdu la moitié de ma clientèle, qui n’est jamais revenue. C’est ça, entre autres, et une accumulation de choses : des retards permanents, un ras-le-bol, qui a fait que j’en ai eu marre et j’ai eu envie d’assigner la SNCF ».

« 3 messages en 7 heures… On n’a pas été considérés »

Et ce procès, Céline était « persuadée » qu’elle pouvait le gagner, tant son voyage ce jour-là s’est mal passé : « Ils auraient vraiment pu faire autrement, affréter un car. On est resté 7 heures dans un train à un quart d’heure de Lyon, il faisait froid, la moitié des passagers n’ont pas eu de plateau-repas, le stress, très peu d’information – 3 messages en 7 heures… On n’a pas été considérés ; c’est ça qui m’a vraiment décidée ».

« Un signe fort envoyé aux voyageurs et à la SNCF »

Ravi de cette victoire symbolique pour les usagers, David Metaxas, l'avocat de Céline Claret-Coquet, est persuadé qu’elle fera jurisprudence : « C’est le dogme de l’irresponsabilité de ces grandes sociétés, qui s’effondre. Elles s’estiment irresponsables et en réalité elles ne le sont pas. Les gens avaient peur, pensaient que les procédures, longues, n’aboutiraient pas ou tardivement… Le tribunal a jugé le contraire.
C’est un signe fort envoyé aux voyageurs, pour qu’ils comprennent qu’ils ont des droits et ne sont pas bons qu’à payer, et un signe fort envoyé à la SNCF, pour leur dire qu’à l’avenir, s’ils ne remplissent pas leurs obligations contractuelles, ils seront condamnés ».

« La SNCF et l’Etat se sentiront obligés d’entretenir le réseau »

Une décision « très importante » aussi du point de vue de Jean-Claude Delarue, président de la Fédération des usagers des transports et services publics : « C’est très important que les juges condamnent enfin la SNCF, parce que les usagers se rendent bien compte qu’il y a de plus en plus de pannes, de retards, d’incidents techniques, de caténaires qui s’envolent, de suppressions de trains, que ça n’émeut ni la SNCF ni l’Etat. Là, plus il y aura de décisions de justice qui vont coûter cher à la SNCF, plus la SNCF et l’Etat se sentiront obligés de moderniser le réseau et au moins de l’entretenir correctement pour qu’enfin les trains arrivent à l’heure ».

La SNCF a refusé de s'exprimer sur le sujet.

La Rédaction, avec Matthieu Moulin