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Transports

Brouillage GPS russe: deux avions de ligne finlandais contraints de faire demi-tour

Les vols assurés par la compagnie Finnair ont décollé d’Helsinki jeudi dernier et devaient atterrir à Tartu en Estonie.

Retour à l’envoyeur. Deux avions de ligne décollant d’Helsinki jeudi dernier ont été contraints de rebrousser chemin en plein vol, incapables d’atterrir en toute sécurité à l’aéroport de Tartu, en Estonie. La raison: le brouillage russe des ondes GPS en cours dans les pays Baltes a produit des interférences. Si la plupart des grands aéroports disposent d’installations permettant aux avions d’atterrir sans GPS, celui de la deuxième plus grande ville estonienne n’en serait pas encore équipé.

Les experts de l'aviation ont averti que les risques d'accidents aériens augmentent à mesure que les attaques contre les signaux GPS se poursuivent. Une analyse partagée par les ministres baltes: "Si quelqu'un éteint vos phares pendant que vous conduisez la nuit, cela devient dangereux, confirme Gabrielius Landsbergis, ministre lituanien des Affaires étrangères, au Financial Times. La situation dans la région baltique, proche des frontières russes, devient désormais trop dangereuse pour être ignorée".

"Attaque hybride russe"

La compagnie aérienne finlandaise Finnair a donc annoncé lundi qu'elle suspendait ses vols vers Tartu, en Estonie, pendant un mois à cause de ces interférences GPS. Aucun vol vers la ville estonienne ne sera assuré par Finnair entre le 29 avril et le 31 mai, jusqu'à ce qu'une solution "ne nécessitant pas de signal GPS puisse être mise en place à l'aéroport de Tartu", a précisé dans un communiqué la compagnie aérienne.

Le brouillage du signal GPS peut "empêcher l'avion de s'approcher et d'atterrir", précise-t-elle, ajoutant que ces interférences "sont assez courantes dans la région".

Ces interférences GPS sont le résultat d'"actions totalement délibérées" de la part de Moscou et constituent une "attaque hybride" russe, a dit Margus Tsahkna, le ministre estonien des Affaires étrangères, à la chaîne publique estonienne EER. "La Russie sait parfaitement que les interférences qu'elle provoque sont très dangereuses pour notre aviation et vont à l'encontre des conventions internationales" qu'elle a signées, a-t-il ajouté.

Un brouilleur de signaux qui inquiète l’Europe

La Russie n’en est pas à son coup d’essai en matière de brouillage radio mais ce système semble être monté en puissance depuis peu. C’est en tout cas ce que décrivait le site Intelligence Online le 18 janvier dernier, dévoilant en détail le fonctionnement du dispositif Tobol dans l’enclave de Kaliningrad destiné à perturber les signaux des avions et des bateaux.

L'Agence européenne de la sécurité aérienne a aussi averti en janvier que les autorités avaient constaté une “forte augmentation” des “attaques” de brouillage et d'usurpation d'identité. Le ministre estonien des Affaires étrangères, Margus Tsahkna, a décrit “une attaque hybride” qui constitue “une menace pour notre peuple et notre sécurité, et nous ne les tolérerons pas”.

Le niveau d'interférences en Europe analysé par GPSJAM
Le niveau d'interférences en Europe analysé par GPSJAM © GPSJAM

La semaine passée, plusieurs analyses du trafic aérien ont révélé certaines zones plus intenses de brouillage dans la région de la Baltique, de la mer Noire et de l'est de la Méditerranée, relate The Sun. Selon plusieurs chercheurs, le nombre de ces attaques russes via satellite a dépassé le seuil des 350 par semaine le mois dernier, contre une cinquantaine en moyenne l’an passé.

Au total entre août et mars, 46.000 vols auraient enregistré des problèmes de navigation par satellite (satnav) au-dessus de la région baltique. Dans le détail, on retrouve 2 309 vols Ryanair, 1 368 vols Wizz Air, 82 vols British Airways et quatre vols Easyjet.

En mars dernier, le gouvernement britannique a lui aussi connu un brouillage de signal d’un avion de la Royal Air Force transportant le secrétaire à la Défense Grant Shapps près de Kaliningrad. La Russie a été à nouveau blâmée pour une attaque “totalement irresponsable”.

Pierre Berthoux