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Dans le sillage de la Chine, les prix du charbon sont au plus haut

À l'heure actuelle, la tendance est aux énergies renouvelables et moins polluantes. Cependant, les énergies fossiles restent majoritairement utilisées, notamment en Asie, car elles sont des atouts de taille dans les pays en développement pour favoriser la reprise économique.

À priori, tout le monde veut lui tourner le dos, mais il reste quand même prépondérant.

"Bien sûr, le recul du charbon va se produire, mais on part quand même d’une base qui fait qu’il ne va pas s’effondrer du jour au lendemain, résume sur BFM Business ce vendredi Francis Perrin, directeur de recherche à l'Institut de Relations Internationales et Stratégiques (Iris) et spécialiste des problématiques énergétiques. C’est aujourd’hui encore la deuxième source d’énergie dans le monde après le roi pétrole".

Et avec la reprise économique et la pénurie de gaz naturel, les prix du charbon atteignent actuellement un plus haut historique. En un an, les cours ont explosé: 166 dollars la tonne de charbon australien, une augmentation bien plus élevée que celle du pétrole sur la même période. Et la demande est avant tout tirée par l’Asie.

La Chine, très gourmande en charbon

"L’Asie c’est aujourd’hui 80% de la consommation mondiale en charbon", poursuit Francis Perrin. Et sur le continent, un pays se démarque: la Chine. À elle seule, elle représente 54% de la consommation mondiale de charbon. À titre de comparaison, l’Union Européenne et les États-Unis ne représentent que 10% de cette consommation.

Le pays a même remis en route des mines de charbon fermées. "Avec la forte reprise économique en 2021 et une terrible année 2020, on a besoin de beaucoup d’énergie pour faire tourner à plein régime la machine économique", explique le directeur de recherche à l'Iris.

Les autorités veulent à tout prix éviter des pénuries d’énergie ou d’électricité. "Si pour cela, il faut faire appel au charbon, et plus au charbon, dans une période considérée comme transitoire, et bien on le fera, et puis tant pis pour les beaux yeux de la planète", estime Francis Perrin.

Une autre raison explique aussi cette hausse des cours et la réouverture par la Chine de certaines mines: la guerre commerciale que se livre le pays avec l’Australie ces dernières semaines. La Chine ne veut plus avoir à importer du charbon australien et cherche donc d’autres sources d’approvisionnement, si possible sur son sol. Un moyen de garantir son indépendance énergétique mais surtout de faire baisser les prix.

La transition énergétique est-elle toujours possible?

Il n’est cependant pas certain que ces réouvertures suffisent à faire baisser les prix. Cette forte demande en charbon est en effet aussi tirée par un autre grand pays sur le continent: l'Inde. Comme en Chine, les dirigeants indiens veulent permettre au plus grand nombre d’avoir accès aux ressources et le charbon est le moyen le plus efficace d’y parvenir.

Une approche qui n’occulte pas forcément le tournant vers les renouvelables. "La Chine est le leader mondial en terme de production d’électricité à partir du solaire et de l’éolien", précise le spécialiste des problématiques énergétiques.

Au début du mois d’août, le GIEC, le groupe d’experts climat de l’ONU, publiait un rapport soulignant qu’il était impératif de réduire les émissions de gaz à effet de serre pour limiter les dégâts sur la planète. Un avertissement qui semble à contre-courant de la tendance de ces grands pays à recourir aux énergies fossiles.

Mais Francis Perrin reste toutefois optimiste et rappelle que la transition énergétique ne s’effectue pas du jour au lendemain: "il faut du temps pour que ça monte en puissance". La raréfaction des stocks de charbon fait également partie des critères qui amène la Chine à repenser son modèle énergétique.

"La Chine est le leader mondial en terme de production d’électricité à partir du solaire et de l’éolien", souligne ainsi le spécialiste des problématiques énergétiques.

"Il ne faut pas que ça enterre cette volonté de réduction des émissions, poursuit Francis Perrin. Mais il faut être réaliste et il ne faut pas penser que l’on peut faire disparaître trois énergies, dont le charbon, qui représentent plus de 80% de la consommation mondiale d’énergie".
Margot Hutton