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Hausse des prix de l'énergie: les artisans-bouchers tirent la sonnette d'alarme

Les professionnels du secteur de la boucherie se réunissent devant l'Assemblée nationale afin de faire entendre leurs difficultés face à l'explosion des factures d'énergie. Alors que ces dernières pourraient tripler, de nombreux établissements sont menacés de faillite alertent-ils.

Les artisans-bouchers vont donner de la voix ce mardi devant le palais Bourbon. Victimes de la flambée des prix de l'énergie qui multiplient leurs factures, un grand nombre ne sont pas éligibles aux dispositifs d'aides aux entreprises mis en place par l'Etat dont les critères sont particulièrement recessérés. "Aujourd’hui un professionnel qui paye 1.000 euros [pour se fournir en énergie chaque mois] peut très bien avoir une facture multipliée par 3 ou 4, explique Jean-François Guilhard sur le plateau de BFM TV. En gros, il va passer de 15.000 à 60.000 euros [par an]. Même s’il y a une aide de l’Etat, il va lui rester 40.000 euros à charge et c’est peut-être le résultat de son entreprise qui va passer dans l’électricité."

« Le coût de l’énergie va être tel que ce sera très difficile de l’appliquer sur nos produits finis, notre prix de vente donc on va automatiquement perdre de la marge", témoigne de son côté Sébastien Rambaud, à la tête d'un établissement à Cholet (Maine-et-Loire).

Selon les différentes fédérations d'artisans-bouchers, la hausse du coût de l'énergie fait passer leur facture annuelle de 20.000 à 40.000 euros. Un ordre de grandeur qui bouleverse le modèle économique des boucheries qui sont bien souvent des petites structures. "Il ne peut plus investir, il ne pourra plus embaucher, poursuit Jean-François Guilhard. Déjà que les prix des matières premières ont augmenté de 12% en moyenne en 2022 et que les prix en magasin n’ont augmenté que de 7-8%. Les professionnels ont déjà pris sur leurs marges, ils ne peuvent plus prendre."

Une vague de défaillances redoutée début 2023

Face à cette situation critique, des artisans-bouchers sont contraints de trouver des solutions. "Un restaurateur passe de 76 à 404 euros du kilowattheure, évoque Coralie Denoues, présidente du département des Deux-Sèvres qui a adressé une lettre à Bruno Le Maire à ce sujet. Son expert-comptable disait qu’il devait augmenter ses plats de 10 euros. Au final, c’est le consommateur qui va subir toutes ses hausses et sans que le chef d’entreprise puisse être rémunéré."

De son côté, Mohamed Kilouli ne souhaite pas répercuter complètement cette hausse des prix de l'énergie sur ses tarifs : "On essaye de pas le répercuter sur les clients mais c’est assez compliqué. On pense à ouvrir tous les jours pour faire plus de chiffre d’affaires concrètement. C’est la seule solution qu’on a parce qu’on ne veut pas trop augmenter les prix." Sur un an, le tarif de la volaille a augmenté de 20%, celui du boeuf de 14% et celui du veau et de l'agneau d'un peu moins de 7%.

Pour ne rien arranger, les 80.000 artisans professionnels du secteur sont confrontés à une baisse structurelle de la consommation annuelle de viande des Français: de 94 kilos par personne en 1998, elle est aujourd'hui de 85 kilos. Sans action ciblée de l'Etat, les 18.000 boucheries françaises pourraient voir leur nombre se réduire décroître dans les prochains mois. Un mouvement qui a d'ores et déjà commencé selon Jean-François Guilhard:

"Il y a déjà des faillites qui ne sont peut-être pas uniquement dues à l’énergie mais c’est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Sur le premier semestre, on risque d’avoir beaucoup de défaillances d’entreprises. On en a chez nos collègues boulangers, on va en avoir dans les boucheries et charcuteries. On veut pas qu’il se passe la même chose qu’en Irlande ou en Belgique où les rideaux tombent. S'ils tombent, c’est tout un pan de l’économie qui s’en va derrière.
Timothée Talbi