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Energie

Tableau de bord de l'énergie: EDF n'a plus de marge de manœuvre dans son calendrier de redémarrage des réacteurs

Si le niveau de ses barrages est plus que jamais proche des moyennes historiques, l'énergéticien n'a plus d'autre choix que de progresser dans son calendrier de relance du parc nucléaire après avoir retardé le redémarrage de quatre réacteurs la semaine dernière.

EDF est au pied du mur. Vendredi dernier, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a demandé à l'énergéticien de retarder de deux mois le démarrage de quatre réacteurs à Chooz, Penly et Cattenom. En cause, des contrôles qui ont révélé des indications liées à de la fissuration par corrosion sous contrainte (CSC) et qui nécessitent de réparer les soudures avant de relancer les infrastructures.

"L’ASN considère que, compte tenu des incertitudes sur les mesures de caractérisation des défauts ainsi que sur les hypothèses et les méthodes retenues dans les calculs mécaniques, la tenue des tuyauteries affectées par ces deux indications n’est pas acquise", a expliqué l'autorité administrative au sujet du réacteur 1 de Cattenom dont le redémarrage était initialement prévu pour le 17 novembre.

Encore 25 réacteurs à l'arrêt

Résultat: le calendrier de relance des réacteurs dérape complètement. Au 1er janvier, l'entreprise prévoit d'avoir encore 10 infrastructures à l'arrêt dans le meilleur des scénarios: Emmanuel Macron avait déjà fixé cet objectif à la mi-octobre. De même, alors que le réseau de transport d'électricité (RTE) réclame 45 gigawatts de capacité nucléaire au 1er janvier, EDF prévoit d'en avoir 48, ce qui représente une avance très réduite.

En d'autres termes, l'énergéticien n'a plus le droit à l'erreur et doit désormais tenir son planning, ce qui implique donc de relancer pas moins de 15 réacteurs en deux mois. Signe de ce retard accumulé par l'entreprise dans son calendrier: elle poursuit son quasi-surplace dans notre tableau de bord de l'énergie et ne compte ce lundi qu'un seul réacteur à l'arrêt en moins par rapport à la semaine dernière, c'est-à-dire 25 sur 56.

Toujours du mieux pour les réserves d'eau mais les précipitations se font attendre

Comme c'est le cas depuis déjà plusieurs semaines, la rare embellie se trouve du côté des réservoirs des barrages exploités par EDF. Leur taux de remplissage atteint désormais 65% et se situe seulement 3,5 points en dessous de la moyenne historique contre 5 la semaine dernière. Ce taux progresse dans les Alpes du Nord (84%) et du Sud (55%), stagne dans les Pyrénées (55%) et diminue dans le Massif Central (56%) mais se rapproche tout de même des niveaux habituellement observés à cette période de l'année. Mais les perspectives ne sont pas optimales puisque Météo France prévoit moins de pluie que d'habitude dans les trois prochains mois. Le niveau des barrages risque ainsi d'être bas pendant l'hiver, ce qui constituerait une difficulté supplémentaire pour passer les pics de consommation.

Du côté du gaz, les stocks restent à leur maximum technique, atteint depuis plusieurs semaines. En revanche, l'Agence internationale de l'énergie a alerté jeudi dernier sur le remplissage des stocks de gaz pour l'hiver 2023. En France, les arrivées de navires acheminant du gaz naturel liquéfié sont d'ores et déjà anticipées afin d'éviter de puiser dans les stocks de gaz pour qu'ils ne soient pas trop bas à la sortie de l'hiver. En effet, le probable arrêt des livraisons de gaz russe combiné au rebond significatif de la demande chinoise obscurcit sensiblement les prévisions pour l'hiver 2023-2024.

Timothée Talbi et Matthieu Pechberty