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Pourquoi TotalEnergies n'a pas payé d'impôt sur les sociétés pour 2021 (mais en paiera pour 2022)

Après l'annonce des derniers résultats du pétrolier, l'opposition de gauche a appelé à une taxe sur les super-profits, rappelant que TotalEnergies n'a que très rarement payé l'impôt sur les sociétés en France.

Les chiffres sont vertigineux: 10,6 milliards de dollars de résultat net sur les 6 premiers mois de 2022. Grâce à ce premier semestre, TotalEnergies est bien parti pour dépasser cette année les résultats de 2021 (16 milliards de bénéfices).

De quoi relancer le débat sur les super-profits des groupes énergétiques, accusés par l'opposition de gauche de profiter de la crise pour emmagasiner des profits énormes. Si le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a encore fermé la porte à cette éventualité, lors d'une conférence de presse vendredi, la question de la taxation des groupes énergétiques, en particulier TotalEnergies, reste vive.

D'autant que le groupe français paie rarement l'impôt sur les sociétés dans l'Hexagone. Ce n'était pas le cas par exemple sur son exercice 2019, ni sur son exercice 2020 ni sur son exercice 2021.

Du tertiaire peu rentable

Comment est-ce possible? Car les activités en France du pétrolier ne sont pas suffisamment rentables. Concrètement, les marges du pétrolier se font principalement grâce à l'extraction et la vente du pétrole et ce sont dans les pays de production que TotalEnergies paie d'ailleurs le plus d'impôts. Dans son rapport "Tax Transparency 2019-2020", le groupe affiche par exemple 500 millions de dollars de taxes en Angola, 616 millions au Nigéria, 500 millions en Norvège…

En revanche, les activités en France sont avant tout du tertiaire (siège du groupe, centre de R&D...) qui génère peu ou pas de rentabilité.

L'autre activité très visible, ce sont les stations-service. Le groupe en possède près de 3300 en France, généralement des franchisés. Mais là encore, l'activité n'est pas réellement une manne pour le groupe car les stations-service, très concurrencées par les hypermarchés très agressifs depuis plusieurs décennies, ont réduit leurs marges sur le carburant.

Ce n'est d'ailleurs pas nouveau et les autres pétroliers historiques comme BP ou Esso ont revendu leur service de distribution (avec l'autorisation d'exploiter leur nom) faute de rentabilité.

Pour TotalEnergies, ce n'est pas non plus avec cette activité qu'il peut générer de confortables revenus.

Le boum du raffinage

Reste finalement les activités de raffinage. TotalEnergies possède 5 raffineries en France et là encore, l'activité était considérée comme peu rentable ces dernières années. En 2021, les marges de raffinage étaient autour de 10 dollars par tonne de pétrole, pas suffisant pour en faire une vache à lait...

Voilà pourquoi TotalEnergies ne payait pas d'impôts sur les sociétés en France ces dernières années même si seul un regard sur les comptes détaillés en France (non communiqués par le groupe) permettrait de savoir quelles activités sont tout de même légèrement rentables et celles qui ne le sont pas voire sont déficitaires.

Une chose est sûre, cela devrait changer pour 2022 car les marges de raffinage ont explosé. Pour le mois de juin, la marge brute atteint 146 dollars par tonne de pétrole!

"Il est probable que le résultat de nos activités en France sera bénéficiaire cette année et que notre compagnie payera donc de l’impôt sur les sociétés au titre de ses résultats 2022" indique d'ailleurs TotalEnergies dans un billet publié sur LinkedIn ce vendredi.

Contacté par BFM Business, le groupe précise aussi avoir versé en 2021 environ 1,9 milliard d'euros d’impôts, taxes et cotisations sociales en France.

Dans les détails, 1 milliard d'euros correspond aux cotisations sociales et patronales, 500 millions d'euros correspondent à la retenue à la source sur les dividendes versés aux actionnaires étrangers et 850 millions d'euros englobent diverses taxes comme le forfait social, des impôts locaux ou la contribution sociale de solidarité des sociétés.

Au niveau mondial, le groupe annonce avoir versé 6,2 milliards de dollars de taxes en 2020 et 16 milliards de dollars en 2021.

Thomas Leroy Journaliste BFM Business