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Electricité: RTE confirme une situation actuelle favorable mais appelle à maintenir la vigilance

Dans ses perspectives actualisées pour l'hiver 2022-2023, le gestionnaire du réseau de transport d'électricité maintient un risque moyen pour le système électrique, grâce à la baisse continue de la consommation et au renforcement du potentiel de production.

Les températures douces des dernières semaines le laissaient présager, RTE vient de le confirmer: le système électrique français est dans une situation favorable. Après avoir réduit le risque du niveau 4 à 3 sur 5, le gestionnaire du réseau de transport d'électricité maintient ce niveau de risque moyen avec une probabilité d'activation du signal Ecowatt rouge qui s'en trouve réduite.

"L’essentiel du risque est derrière nous, résume Thomas Veyrenc, directeur exécutif Stratégie, prospective et évaluation de RTE.

"On a passé une grande partie des situations de risque sur l’ensemble de l’hiver mais risque moyen ne veut pas dire risque 0, c’est sous réserve qu’on garde cette vigilance, poursuit-il."

Une baisse de 8,5% de la consommation sur le mois passé

Ce sont toujours les deux mêmes leviers qui permettent au réseau électrique français de rester éloigné d'une situation critique: la consommation et la production. Comme depuis la rentrée, la première reste significativement en-dessous des moyennes historiques sur la période 2014-2019. Sur les quatre dernières semaines, elle a ainsi enregistré une diminution de 8,5% en corrigeant les effets météorologiques. Une baisse qui concerne aussi bien l'industrie que les secteurs tertiaire et résidentiel. Deux facteurs participent à orienter la consommation d'électricité à la baisse à savoir les effets économiques de l'augmentation des prix et autres matières premières ainsi que les campagnes de sensibilisation sur les économies d'énergie.

Pour illustrer cet écart, la différence entre la consommation réalisée en moyenne lors de la dernière semaine de l'année 2022 et une consommation typique du mois de décembre a ainsi dépassé les 20 GW (50 GW contre 70 habituellement). Trois effets ont accentué ce delta, notamment la baisse d'activité et donc de consommation, qui est traditionnellement observée entre Noël et le Nouvel An, mais surtout les conditions météorologiques, en l'occurence des températures anormalement hautes pour la saison.

La disponibilité du parc nucléaire pourrait tendre vers 40 GW fin février

Pour ce qui est de la production d'électricité, les capacités sont renforcées sur tous les fronts à commencer par le parc nucléaire qui est désormais disponible à plus des trois quarts avec 43 réacteurs couplés au réseau qui correspondent à une disponibilité de 45GW. "La baisse du nucléaire à la fin du mois de décembre était une modulation faite pour des raisons d’optimisation du parc, plus précisément pour des maintenances préventives et des économies de combustibles, explique Thomas Veyrenc. On est remonté sur une disponibilité en janvier qui conduit à atteindre le planning fixé."

Le représentant de RTE indique cependant que la disponibilité du parc nucléaire pourrait tendre vers 40 GW à la fin du mois de février, sous la combinaison de deux effets: l'arrêt de 9 réacteurs dans le cadre de la campagne de maintenance de 2023 qui va contre-balancer la remise en service des premiers gros réacteurs affectés par la corrosion sous contrainte (CSC) du palier N4 puis les deux d'une puissance de 1.300 MW.

"Cette amélioration demeure dépendante des travaux de CSC et de la bonne exécution du programme de maintenance prévu, y compris en cas d’un éventuel mouvement social dans le cadre de la réforme des retraites", souligne Thomas Veyrenc.

La progression est encore plus marquée pour les réserves hydrauliques qui sont désormais au-delà des moyennes historiques grâce à une gestion prudente des exploitants. Du côté, des stocks de gaz, ils restent élevés en France comme ailleurs en Europe et même au-dessus des moyennes sur la période 2015-2021. "On déstocke du gaz mais à un rythme plutôt lent, constate Thomas Veyrenc. De manière générique, on peut dire que l'hiver 2023-2024 sera moins risqué que l'hiver 2022-2023."

Depuis mi-décembre, la situation a tellement été favorable que la France a fini par redevenir exportatrice avec 2 TWh destinés à nos voisins sur le seul mois de janvier même si l'Hexagone restera importateur sur la globalité de la période hivernale.

Alors que le mercure est orienté à la baisse dans les jours à venir, le gestionnaire du réseau de transport d'électricité qualifie cette vague de froid de "modérée". Cela n'implique donc pas de risque immédiat d'autant plus que RTE s'attend à ce que les températures rejoignent les normales de saison d'ici une semaine à dix jours.

"Il reste encore une période que nous allons localiser autour de la seconde quinzaine de février, il reste à ce moment-là quelques risques seulement si on traversait une vague de froid importante et longue parce que le parc nucléaire va commencer à décroitre", confiait sur France Info ce mercredi Xavier Piechaczyk, le président du directoire du gestionnaire du réseau d'électricité RTE.

Des dispositions pour limiter l'effet des grèves sur la production

En ce qui concerne les prix, ils sont "redevenus cohérents avec les fondamentaux économiques", explique-t-on chez RTE.

"La prime de risque s’est effondrée au cours des dernières semaines ce qui a conduit à une forte baisse des prix français de l’électricité sur les marchés à terme", précise RTE qui rappelle que les consommateurs ne devraient pas bénéficier immédiatement de cette diminution, la plupart des prix étant basés sur des contrats de 2022.

"Les mouvements de grève peuvent conduire à une baisse de la production d’électricité dans le cas où les agents de conduite des centrales seraient grévistes", admet Jean-Paul Roubin, directeur exécutif Clients, marchés et exploitation.

Le secteur de l'énergie devrait être particulièrement actif dans le cadre de la mobilisation contre la réforme des retraites demain. Si le gestionnaire n'est pas en mesure de chiffrer les conséquences sur la production d'électricité, Jean-Paul Roubin évoque l'existence de mesures pour empêcher toute réduction trop importante: "Il existe des dispositions réglementaires et légaux qui permettent à RTE d’adresser à l’ensemble des moyens de production un ordre d’arrêt des baisses. C’est mis en œuvre lorsque les baisses sont assez profondes et induisent un risque vis-à-vis la sécurité de l’alimentation sur l’ensemble du territoire."

Timothée Talbi