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Défense

Guerre en Ukraine: ce que va impliquer pour l'Europe l'envoi des Leopard 2

Olaf Scholz a confirmé la livraison de chars Leopard à l'Ukraine et permet à la Pologne, la Finlande, la Suède, les Pays-Bas, la Norvège, Portugal, le Danemark et l'Espagne d'en fournir aussi.

Le temps presse pour le président ukrainien Volodymyr Zelensky qui réclame depuis plusieurs semaines des centaines de chars lourds pour se protéger d'une probable offensive russe dans l'est du pays. Après des longues hésitations, l'Allemagne a répondu à cette demande.

Le chancelier Allemand Olaf Scholz a donné le feu vert pour donner 14 Leopard 2 A6 et permettre à la Pologne, à la Finlande et à d'autres pays européens et membres de l'Otan d'en livrer aussi à Kiev. L'objectif est de constituer deux bataillons de chars Leopard 2, soit 80 chars. Ce chiffre pourrait être atteint voire dépassé avec l'envoi par l'Allemagne, la Pologne, la Finlande, la Suède, les Pays-Bas, la Norvège, Portugal, le Danemark et l'Espagne.

Le Leopard 2 qui a été développé depuis 1979 en de nombreuses versions depuis les années 70 est un panzer rapide (75 km/h), puissant (canon lisse de 120 mm avec une portée de 4 km) et son blindage fait d'acier et de céramique protège efficacement son équipage de 4 personnes, dont un chargeur d'obus. La Bundeswehr a publié hier une vidéo pour montrer l'efficacité de ce blindé produit depuis la fin des années 70 par l'industriel Krauss-Maffei qui en a construit 3500 exemplaires.

Le défaut de la cuirasse

Mais sa puissance peut être le défaut de sa cuirasse dans certaines situations et dans une période où les cours d'eau à franchir sont à leur niveau le plus haut en Ukraine.

"Avec un poids de 60 tonnes et ses dimensions [10 m de long avec le canon et près de 4 mètres de large, NDLR], ça peut poser des problèmes par exemple pour le franchissement des nombreux ponts", note le colonel Goya, consultant défense pour BFMTV.

Mais ce qui fait un atout, par rapport aux modèles occidentaux équivalents (Leclerc français, Challenger britannique et Abrams américains) est qu'il est toujours en production et que des centaines d'unités sont disponibles en Allemagne et dans les autres pays européens ou membres de l'Otan. Ainsi, un important stock de pièces détachées et de munitions est disponible à proximité de l'Ukraine.

"Les chars nécessitent une bonne logistique, un entretien régulier et la guerre en Ukraine a montré qu'il en faut beaucoup pour tenir longtemps. Kiev avait environ 900 chars au début du conflit et en a perdu 600. Ils ont été recomplétés par les prises russes et par plusieurs pays européens qui ont donné des T72 russes. Le Maroc pourrait aussi en fournir", explique le colonel Goya.

Des milliers de litres de carburant

Il faudra donc à l'Ukraine plusieurs centaines de ces chars pour être efficace sur le champ de bataille face aux T62, T72, T80 et même T90 russes. Un bataillon se compose de 3 compagnies de 13 chars, soit une quarantaine de chars. Il en faut trois pour former une brigade qui nécessite aussi 3000 hommes, un bataillon d'infanterie et un d'artillerie, sans compter les unités de logistiques et de maintenance qui réparent et entretiennent tous ces engins sur le terrain.

A ajouter aussi, des réserves de carburant monumentales. Pour faire tourner son moteur de 1500 ch, un Leopard 2 dispose d'un réservoir de 1200 litres et consomme entre 300 et 400 litres au 100 km selon le terrain. Une nouvelle contribution européenne et américaine notamment financière semble incontournable.

L'autre contrainte inévitable est l'entrainement et la formation des équipages. Le Leopard est un char modernisé dont le cockpit est presque aussi complexe que celui d'un avion de chasse.

"Pour un tankiste expérimenté, et ils sont nombreux en Ukraine, ça ira assez vite. Mais ils devront être formés sur des terrains adaptés à ce type d'engin. On ne peut pas s'entrainer partout au tir à 4 km", rappelle le colonel Goya.

Il existe des centres d'entrainement dans les pays baltes, notamment en Roumanie, mais l'un des terrains les plus adaptés à ces formations est en France, dans le Var. C'est le camp de Canjuers qui avec 35.000 ha est le plus grand champ de tir d'Europe où s'entrainent déjà de nombreuses armées européennes et où ont été formés les artilleurs ukrainiens sur les canons Caesar. Mais, "au vu de la masse des Léopards partout en Europe, il sera plus simple de les former proche de l’Ukraine", nous a précisé le ministère des Armées.

Le porte-parole du chancelier Steffen Hebestreit a indiqué que la formation des soldats ukrainiens à l'utilisation de ces blindés allait commencer "rapidement" en Allemagne.

Pascal Samama
https://twitter.com/PascalSamama Pascal Samama Journaliste BFM Éco