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Carburant durable, e-fuel, nouvelle flotte: comment Air France veut réduire ses émissions carbone

Air France-KLM rebondit en Bourse (©Ramon van Flymen / ANP / AFP)

Air France-KLM rebondit en Bourse (©Ramon van Flymen / ANP / AFP) - Ramon van Flymen / ANP / AFP

Afin de réduire ses émissions de CO2 de 30%, la patronne d’Air France Anne Rigail annonce dans un entretien à Ouest France que la compagnie aérienne vise "l’incorporation d’au moins 10 % de carburant durable" sur tous ses vols. Elle mise aussi sur des technologies de carburants synthétiques.

Air France doit réduire son impact sur l'environnement. Pour cela, la compagnie aérienne s'est fixé l'objectif d'incorporer "au moins 10 % de carburant durable" sur tous ses vols, a annoncé sa directrice générale, Anne Rigail, dans un entretien à Ouest France samedi 6 avril.

Ces biocarburants sont fabriqués à partir de matières organiques. Actuellement, Air France en incorpore 1% dans le réservoir de ses avions, selon sa directrice, pour "un coup supplémentaire de 100 millions d'euros par an", par rapport à du kérosène.

Air France espère ainsi tenir ses objectifs climatiques. L'entreprise veut réduire de 30 % ses émissions de CO2 par passager-kilomètre d’ici à 2030 par rapport à 2019.

L'aviation reste un des secteurs d'activité les plus polluants. À l’échelle mondiale, elle serait à l’origine de 5 % du réchauffement climatique des vingt dernières années, selon le cabinet Carbone4.

Le groupe a aussi commencé le renouvellement de sa flotte, avec des nouveaux avions commandés auprès d'Airbus. "Ces appareils de dernière génération, A350 en long-courrier et A220 en moyen-courrier pour Air France, émettent entre 20 % et 25 % de CO2 en moins que les avions dont ils prennent la suite", assure Anne Rigail auprès du quotidien régional.

Passer de 1 à 10%

La patronne d'Air France cite aussi l'éco-pilotage, qui "permet de réduire de 4 à 5 % la consommation de kérosène". "Nos avions roulent sur un seul moteur au sol, nous utilisons des trajectoires de vol optimisées, calculées par l’intelligence artificielle. Nous optimisons les descentes pour l’atterrissage en évitant les paliers", détaille-t-elle.

S'agissant du biocarburant, la réglementation européenne prévoit d’imposer 6 % de carburant durable en 2030. Air France veut donc passer de 1% actuellement à 10% dans six ans.

"En 2023, nous avons utilisé 16 % du carburant durable produit dans le monde alors que nous ne représentons que 3 % de la consommation mondiale de kérosène", vante Anne Rigail dans l'entretien.

"L’un des principaux avantages est le fait qu’ils ne nécessitent pas de modification des avions ou des moteurs", poursuit la directrice générale.

Mais ce carburant présente l'inconvénient d'être "rare et cher" avec un prix à la tonne d'environ 5.000 euros en France, contre 1.000 euros pour le kérosène, toujours selon Anne Rigail.

Des matières premières insuffisantes

Si la compagnie veut accélérer sur ce carburant, elle va aussi se confronter au problème de la disponibilité. Car si l'aviation continue son développement, il n'y aura pas assez de matières premières pour fabriquer assez de biocarburant.

Selon l’ONG Transports et environnement, citée par franceinfo, la totalité de la biomasse disponible aujourd’hui en Europe ne pourra fournir que 11% du carburant durable à l’aviation dans son format prévisionnel de 2050.

Le risque serait alors de développer l'agriculture, un autre secteur très émetteur de carbone, afin de fabriquer du biocarburant. Même si, comme le souligne Anne Rigail, "la réglementation européenne (...) impose – et c’est une bonne chose – que ce carburant durable n’entre pas en compétition avec l’alimentation humaine ou animale".

La piste du e-fuel, une solution énergivore

Enfin, la patronne d'Air France compte miser sur le carburant synthétique (aussi appelé e-fuel ou électrocarburant), afin de réduire les émissions de CO2. "Nous avons par exemple investi dans DG Fuels, un fabricant de fuel synthétique aux États-Unis. Au Havre, nous sommes partenaire d’Engie dans le cadre du projet KerEAUzen", développe-t-elle dans les colonnes de Ouest France.

"Les carburants synthétiques, eux, sont produits à base d’hydrogène. Du CO2 capté en sortie d’usine est ensuite ajouté, permettant de produire une molécule très proche du kérosène", explique Anne Rigail.

Problème, cette technologie n'est pas encore mature car "les électrocarburants sont plus complexes à produire que les biocarburants", explique Maxence Cordiez, ingénieur au Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) interrogé par franceinfo. La production de ces carburants nécessite par ailleurs beaucoup d'électricité.

Marine Cardot