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Le gouvernement peut-il vraiment rendre le télétravail obligatoire?

Le gouvernement a annoncé lundi l'obligation du télétravail trois jours par semaine pour tous les salariés qui le peuvent. Il envisagent des sanctions administratives pour les entreprises récalcitrantes.

Face à la propagation du variant Omicron, le gouvernement serre la vis. Lundi, le Premier ministre Jean Castex a annoncé que le télétravail sera rendu "obligatoire" au minimum trois jours par semaine pour tous les salariés qui le peuvent, et même quatre jours lorsque "cela est possible".

Mais le gouvernement a-t-il réellement les moyens juridiques d'imposer le travail à domicile? Pas vraiment, à moins de l'inscrire dans la loi. Or, l'obligation du télétravail sera intégrée au protocole sanitaire en entreprise (PNE). Lequel n'est qu'un "ensemble de recommandations" expliquait le Conseil d'Etat dans deux ordonnances de référé des 19 octobre et 17 décembre 2020.

L'obligation de télétravail n'a donc pas de valeur règlementaire. Le Code du travail prévoit toutefois que l'employeur prenne "les mesures nécessaires pour protéger la santé de ses salariés".

Mais "la définition des mesures de nature à assurer la santé et la sécurité des salariés (...) relève du pouvoir de direction de l’employeur. Si l’employeur est en mesure d’assurer la santé et la sécurité de ses salariés par d’autres mesures que le télétravail, il ne devrait donc pas pouvoir être sanctionné si ces mesures alternatives sont efficaces et suffisantes", expliquait en mars à BFM Business Marion Kahn-Guerra, avocate associée chez Stas et Associés.

Quelles sanctions?

Reste qu'en ne respectant pas le protocole sanitaire, l'employeur court un risque. Si l'Inspection du travail considère que les mesures prises pour protéger les salariés sont insuffisantes, il peut s'exposer à une mise en demeure. Même si dans les faits, les inspecteurs du travail n'ont "ni les moyens humains, ni les moyens juridiques d'imposer le télétravail dans les entreprises", selon Cécile Clamme, secrétaire générale de la CGT Travail, interrogée sur France info.

Un salarié dont l'employeur ne respecte pas l'"obligation" de télétravail pourrait aussi décider de saisir la justice. Dans ce cas, comme le soulignait Marion Kahn-Guerra, "ce seront les juges qui trancheront et qui apprécieront si l'employeur a ou non, respecté son obligation d'assurer la santé et la sécurité des salariés. Et vu la jurisprudence en la matière, notamment dans le cadre du contentieux de la faute inexcusable, on ne peut cependant qu’inviter les employeurs à la plus grande prudence…"

Le gouvernement a également annoncé que des amendes administratives pour les entreprises récalcitrantes seront introduites par amendement dans le projet de loi transformant le pass sanitaire en pass vaccinal. "Quand les entreprises ne jouent pas le jeu, aujourd'hui, cela passe par des sanctions pénales. C'est long et, pour simplifier cela, des sanctions administratives vont êtres proposées. L'idée, c'est de le mettre en place pour les entreprises qui ne jouent vraiment pas le jeu du télétravail, pas quand il y a un désaccord sur telle ou telle fonction dans un service", a réagi Cyril Chabanier, président de la CFTC.

https://twitter.com/paul_louis_ Paul Louis Journaliste BFM Eco