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A quoi ressemblera le "chèque alimentaire" promis par Emmanuel Macron?

Si la création d'un chèque alimentaire est acté, Bercy et le ministère de l'Agriculture sont en désaccord sur les modalités d'application de cette aide destinée aux plus modestes.

"Je suis d'accord, donc il faut qu'on le fasse. Vous avez raison, on va le faire". En décembre, Emmanuel Macron répondait favorablement à la demande des membres de la convention citoyenne pour le climat de créer un chèque alimentaire à destination des familles modestes.

Objectif: permettre aux populations précaires d'avoir accès à des produits alimentaires de bonne qualité, bio ou répondant à une logique de circuit court tout en assurant la bonne rétribution des agriculteurs. Mais depuis l’annonce du chef de l’Etat, le dispositif n’a toujours pas vu le jour alors que certains espéraient le voir figurer dans le projet de loi climat présenté il y a peu, en vain.

Pour autant, l’exécutif souhaite respecter sa promesse. "Le président s'est engagé à donner suite" à cette mesure, "mais ça ne veut pas dire forcément de passer par la loi". expliquait Matignon à BFMTV. Invité sur BFM Business vendredi dernier, le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie, a lui aussi confirmé la création d'un chèque alimentaire, déplorant "une inégalité alimentaire dans notre pays".

Désaccord

Si le principe du chèque alimentaire semble bien acté, ce sont ses modalités d’application qui freine son lancement en coulisses. D’un côté, le ministère de l’Agriculture plaide pour des chèques alimentaires qui pourraient être utilisés dans les petits commerces, voire en grande surface pour les aliments frais et locaux. Une proposition semblable à celle défendue par les parlementaires de la majorité qui préconisent des chèques d'une valeur comprise entre 30 et 60 euros pour les familles modestes et les jeunes.

"Ils permettraient d’acquérir des produits vertueux tels que précisés dans la loi Egalim: des produits frais à signe de qualité – type bio ou labels – avec une priorité sur les fruits et légumes", a expliqué le député LaREM Mounir Mahjoubi dans les colonnes de Ouest-France. Et d’indiquer que "85 % de l’argent investi devra ensuite revenir aux agriculteurs".

Seulement voilà, de l’autre côté, Bercy estime ce dispositif trop coûteux (entre 2 et 4 milliards d’euros) et trop complexe à mettre en œuvre. Les services de Bruno Le Maire préféreraient une application plus restreinte et éviter l'usine à gaz avec un outil confié aux centres communaux d’action sociale (CCAS) qui pourrait bénéficier à 5 millions de personnes pour un coût d’environ 200 millions d’euros.

Lancement prévu en septembre

Premier syndicat agricole, la FNSEA propose quant à elle une "carte à puce" ou un "chèque" distribué par les CCAS permettant de dépenser 5 euros par jour dans des magasins de producteurs, des marchés locaux et dans les rayons de produits régionaux des supermarchés, pour des produits de base.

La Confédération paysanne rejette pour sa part l’idée d’un chèque alimentaire, arguant qu’elle "encourage l’agriculture industrielle", selon son porte-parole, Nicolas Girod. Ce dernier préconise à la place "la création d’une branche de la Sécurité sociale garantissant un accès universel à l’alimentation –produits locaux, restauration collective" ainsi que la création de "caisses locales d’alimentation".

Matignon devrait se prononcer dans les prochains jours sur la forme que prendra le chèque alimentaire. Le lancement du dispositif, lui, est espéré pour le mois de septembre. Il devra répondre aux effets de la crise sanitaire qui s’est déclinée en crise sociale. En 2020, le Secours populaire a recensé une hausse de 45% des demandes d’aide alimentaire par rapport à 2019, tandis que les Restos du Cœur prévoient d’accueillir plus d’un million de personnes cet hiver, contre 875.000 en 2019-2020. Au total, quelque 8 millions de personnes auraient désormais besoin de l’aide alimentaire pour vire, selon le Secours catholique, contre 5 millions en 2018.

https://twitter.com/paul_louis_ Paul Louis avec AFP Journaliste BFM Eco