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Restauration rapide: la street food cartonne, les chaînes françaises dégustent

La street food est la grande gagnante du boum de la restauration rapide.

La street food est la grande gagnante du boum de la restauration rapide. - Pexels

Sur un marché en pleine ébullition en hausse de 26% sur an, les chaînes historiques comme Paul et la Brioche Dorée subissent une concurrence accrue de la street food internationale et des boulangeries qui viennent remettre en cause leur hégémonie.

S'il est un marché qui ne paraît pas souffrir de l'inflation c'est bien celui de la restauration rapide. En 2022, le chiffre d'affaires du secteur a culminé à 23,4 milliards d'euros selon l’étude annuelle Speak Snacking de la société CHD Expert-Datassential. Comparée à un an plus tôt, la hausse est spectaculaire à plus de 26%.

Mais 2021 étant une année encore marquée par la crise sanitaire, les auteurs de l'étude préfèrent prendre 2019 comme élément de comparaison. La hausse est à peine moins conséquente puisque le chiffre d'affaires du secteur a bondi de 19% par rapport à l'avant-Covid. Le nombre de points de vente a lui aussi explosé avec une hausse de 17% par rapport à 2019 (51.500). En trois ans, ce sont 7500 points de restauration rapide qui ont ouvert dans l'Hexagone, soit près de 7 par jour, et ce malgré les contraintes liées à la crise sanitaire.

"La bonne reprise de l’activité du secteur de la restauration rapide a été boostée avant tout par le retour de cette notion de plaisir auprès des consommateurs, estime Nicolas Nouchi, le directeur des études de CHD Expert-Datassential. Les Français retournent au restaurant, même si ceux-ci font au final des arbitrages prix/plaisir pour alléger la note finale."

11,70 euros le ticket moyen

Les Français vont plus souvent dans la restauration rapide et y dépensent un peu plus. En deux ans, le prix moyen par personne est passé de 10,70 euros à 11,70 euros, soit une hausse de plus de 9%.

Si le secteur est dynamique dans son ensemble, les restaurants ne sont pas tous logés à la même enseigne. Sur un marché de plus en plus concurrentiel, les perdants se situent aux extrémités du spectre: le haut de gamme et le fast-food mal-bouffe. C'est ce que constate le spécialiste du secteur Bernard Boutboul de Gira Conseils.

"La restauration haut de gamme comme Ouest Express de Bocuse, les Bols de Jean de Jean Imbert ou Secret de Table de Jean Westermann n'a plus la cote, selon l'expert. Ce sont des restaurants jugés trop chers à 25 euros le prix moyen. Et encore, avec leur modèle économique, ils devraient vendre encore plus cher."

Nées de la volonté de stars de la cuisine ou de la boulangerie de proposer une offre de fast-food premium, ces chaînes sont en recul de 10%. Une tendance qui s'est accélérée avec l'inflation mais qui avait déjà débuté avant.

Preuve qu'il n'y a pas que le prix qui est en jeu, ce sont les fast-food mal-bouffe qui accusent le plus fort recul.

"Les kebabs du coin, les restaurants de tacos indépendants... On est sur des baisses de l'ordre de 20% avec des fermetures qui s'accélèrent, constate le spécialiste. Ce sont des restaurants mal fréquentés et finalement peu fréquentés."

Des petits restaurants qui ont aussi pâti de la forte expansion de la chaîne O'Tacos qui a ouvert 320 restaurants depuis 2015 en s'installant notamment devant les lycées ou les facs pour attirer les jeunes consommateurs.

La concurrence des boulangeries

Autre catégorie en difficulté: les chaînes de restauration françaises historiques.

"Les Paul et les Brioche Dorée ça chute fortement, de l'ordre de 10-15% de chiffre d'affaires, estime Bernard Boutboul. Ça n'a rien à voir avec le Covid et le pouvoir d'achat, la baisse avait déjà commencé avant. Ce sont des chaînes qui subissent la concurrence très forte de la grande distribution, de Picard ou même des boulangeries classiques. Aujourd'hui, le seul endroit où il y a la queue le midi, c'est devant les boulangeries."

La diversification des boulangeries vers le fast-food tirée notamment par des grandes chaînes comme Marie Blachère, Ange ou Louise leur a permis de grignoter des parts de marché aux enseignes historiques du jambon beurre à la française.

Trop industrielles, un certain immobilisme face aux nouvelles tendances du "manger sain" et pâtissant d'une fréquentation en baisse des centres commerciaux où elles sont fortement implantées, ces chaînes font moins recette.

A contrario de la street food qui elle ne cesse de progresser. Chaînes de burgers premium, cuisine mexicaine ou asiatique sur le pouce... Après avoir conquis les centres-villes des grandes métropoles, ces nouveaux concepts rencontrent aussi un grand succès dans les villes moyennes.

"C'est une street food très internationale (thaïlandais, mexicain ou asiatique en général...) avec des plats instagrammables, explique Bernard Boutboul. Les chaînes comme Krousty Sabaïdi, New School Tacos ou Nachos sont encore petites mais se développent très fortement."

Souvent inspirés de succès américains comme Chipotle ou Panda Express, ces nouvelles enseignes enregistrent des ventes en hausse de 40 à 50% pour un ticket moyen relativement élevé aux alentours de 15 euros. Elles attirent principalement une clientèle de centre-ville et de cols blancs pour la pause déjeuner.

Une concurrence accrue sur ce marché qui ne semble pas pour l'heure nuire au leader du marché McDonald's. Avec plus de 1520 restaurants en France (plus gros marché d'Europe), l'américain reste l'indéboulonnable référence du marché. Et ce malgré le fait que désormais 80% de la restauration classique propose désormais des hamburgers à sa carte.

"McDonald's a finalement moins de concurrents directs que la Brioche Dorée par exemple, estime Bernard Boutboul. Il a surtout su intelligemment élargir sa gamme en allant sur du premium avec sa gamme Signature. Je ne croyais pas trop à cette stratégie au départ mais elle a été gagnante. McDo n'est désormais plus trop considéré comme du fast-food mal-bouffe."
Frédéric Bianchi
https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco