BFM Business
Conso

La France, nouvel eldorado du fast-food américain?

Les chaînes de fast-food débarquent les unes après les autres en France, un marché porteur pour la restauration rapide.

Five Guys, Chipotle, Steak'n Shake ou Carl's Jr: les chaînes américaines de fast-food s'installent les unes après les autres en France. McDonald's, jusqu'au début des années 2000, a régné presque sans partage sur l'Hexagone. Les enseignes se bousculent désormais dans les rues des centres-villes et les allées des centres commerciaux. L'enseigne louisianaise Popeyes, et ses burgers au poulet frit, est la dernière en date à tenter l'aventure de notre côté de l'Atlantique. Même le géant Wendy's, grand rival de McDonald's et Burger King sur le sol américain, lorgne sur les consommateurs français.

Popeyes.
Popeyes. © AFP

La France, nouveau paradis du fast-food ? Si les enseignes semblent se presser aux portes de la France, c'est déjà parce qu'elles y sont moins nombreuses qu'ailleurs. Beaucoup sont déjà installées dans les pays voisins, comme l'Espagne ou le Royaume-Uni.

"La France rattrape son retard", confirme Clara Soppo Priso, spécialiste des stratégies de croissance dans la restauration au sein du cabinet Simon-Kucher.

Outre une petite réticence à la restauration rapide, c'est aussi l'hégémonie de McDonald's qui a freiné, un temps, le développement du secteur en France.

L'un des atouts les plus précieux du fast-food, "c'est un rapport qualité/quantité/prix inégalé" dans la tête du consommateur, complète Clara Soppo Priso. "McDonald's, par exemple, est perçu comme une enseigne moins chère, bien que ce ne soit pas forcément la réalité", ajoute-t-elle. Une force bien comprise par ces entreprises, qui multiplient les campagnes promotionnelles autour de leurs produits d'appel, les moins chers, même si ce ne sont pas forcément ceux qu'elles vendent le plus – à l'image des "petits plaisirs à moins de 2 euros" ou du menu "King Deal" à 5 euros chez Burger King.

Burgers et crèmes glacées

Avec leurs burgers, frites, nuggets de poulet et autres crèmes glacées, les chaînes de fast-food misent aussi sur des produits conventionnels et universels, faciles à consommer, que l'on peut manger à n'importe quel moment de la journée. En témoigne la multiplication des menus "petit déjeuner" ou des boissons chaudes, voire d'espaces dédiés comme les "McCafé", qui permettent à ces restaurants d'exploiter leurs heures creuses. C'est l'autre pilier de leur succès: une agilité sans pareille qui leur permet de s'adapter rapidement aux nouveaux modes de consommation.

Lorsque la crise sanitaire contraint les restaurants à fermer leurs portes, la restauration rapide s'est rapidement repliée sur le click-and-collect et la livraison, et était déjà rodée à l'utilisation du numérique pour la prise de commande. Sans l'épargner totalement, la crise sanitaire lui a finalement été profitable, lui permettant de grappiller encore davantage de parts de marché. "La fréquentation a baissé de 15% dans la restauration hors-domicile entre 2019 et 2022. La restauration rapide à elle seule, ce n'est qu'une baisse de 4%", souligne Maria Bertoch, experte au sein du cabinet NPD Group.

Rien ne semble arrêter la croissance du fast-food. Car, outre les grandes chaînes américaines, ce sont aussi des enseignes tricolores qui ont émergé (comme Big Fernand ou Bagelstein), sans compter la popularité actuelle des kebabs et tacos. Selon les chiffres de NPD Group, la restauration rapide représentait 34% de la fréquentation de la restauration hors-domicile (en comptant également les sandwicheries, les traiteurs et les boulangeries) en 2016, avant de grimper à 36% en 2019 puis à 41% en 2022. De quoi allécher les enseignes encore absentes du territoire français.

"Il y a encore de la place"

La restauration traditionnelle, elle, ne le voit pas d'un bon œil. Mais ce qui lui fait réellement du tort, "c'est la restauration rapide de qualité" plutôt que Burger King ou KFC, explique Nicolas El Hakim, à la tête de deux restaurants libanais à Paris et président des restaurateurs à l'Umih Île-de-France. Entre midi et deux, les clients ont moins de temps pour manger, sans compter qu'ils considèrent que l'addition sera plus élevée dans un restaurant classique, même si ce n'est pas le cas, et "nous n'avons pas le même budget marketing" pour y remédier, note-t-il.

D'autres grandes enseignes pourraient encore s'implanter dans les villes françaises dans les prochaines années, comme Wendy's. "Il y a encore de la place", mais le succès "n'est pas forcément assuré" pour tous les nouveaux arrivants, avance Clara Soppo Priso. Ce n'est parce que le marché est porteur que la route se déroulera sans encombre. Popeyes, par exemple, avait essuyé un premier échec dans le sud de la France, quelques années auparavant, qui l'avait contraint à fermer ses restaurants et à quitter le marché français.

Jérémy Bruno Journaliste BFMTV