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Flambée des prix des carburants: quelles pistes possibles pour le gouvernement?

Face à la hausse des prix à la pompe, Emmanuel Macron avait promis lundi d'"améliorer" les aides pour les ménages à travers une nouvelle mesure. Il s'agit aussi de soutenir les entreprises fortement consommatrices comme les transporteurs routiers. Reste que la marge de manoeuvre est étroite.

Avec un pétrole toujours plus haut, les prix des carburants continuent à s'envoler, dépassant allègrement les 2 euros du litre en moyenne. Et aucun retournement n'est à prévoir à court terme. Michel-Edouard Leclerc prédit même que le litre sera à 2,20 euros d'ici trois semaines.

Face à la hausse des prix à la pompe, Emmanuel Macron a promis lundi d'"améliorer" les aides, évoquant de possibles mesures autour de l'indemnité kilométrique et de l'indemnité inflation. Il s'agit aussi de soutenir les entreprises fortement consommatrices comme les transporteurs routiers.

Ce mardi, Jean Castex a organisé des réunions de concertations avec les acteurs économiques et sociaux. Après cette première réunion, Matignon l'affirme, le gouvernement veut aller vite.

"Nous interviendrons sur le prix des carburants la semaine prochaine", explique-t-on à Matignon.

• Un nouveau chèque inflation/carburants?

De sources gouvernementales concordantes, l'hypothèse d'une nouvelle indemnité inflation, plus resserrée que la précédente de 100 euros accordée à 38 millions de personnes, tient la corde.

On ne connaît pas encore les nouvelles limites de ce chèque. Rappelons que le précédent visait salariés, indépendants, retraités, chômeurs, allocataires des minima sociaux et encore étudiants boursiers percevant moins de 2000 euros nets mensuels.

Qu'ils aient une voiture ou pas. On peut imaginer que ce nouveau chèque resserré s'adresse uniquement à ceux qui roulent pour aller travailler. C'était d'ailleurs la philosophie du gouvernement en visant "ceux qui travaillent, ceux qui prennent leur voiture pour aller travailler", comme l'indiquait Bruno Le Maire en janvier dernier.

Mais l'exécutif s'était déjà heurté à l'automne à la problématique suivante: comment cibler finement les automobilistes les plus touchés?

"On n'a pas aujourd'hui, comme pour le chèque énergie, une base de données de toutes les personnes qui devront en avoir besoin, des gens qui ont besoin de leur voiture pour aller travailler par exemple", reconnaissait en octobre dernier, Barbara Pompili, la ministre de la Transition écologique.

Un point qui avait justement incité le gouvernement à opter pour le chèque inflation. Le ciblage et le calibrage de ce chèque carburant prendront du temps. Or, le gouvernement doit répondre à une urgence et agir vite.

• Relever à nouveau le barème kilométrique?

En janvier, le gouvernement annonçait le relèvement de 10% du barème de l'indemnité kilométrique. Une mesure efficace rapidement pour les foyers: "l'effet sera rapide et direct dès leur déclaration d'impôt sur les revenus 2021 ou les bénéfices de l'année dernière", assurait Jean Castex.

Dans le pays, 4,3 millions de foyers fiscaux déduisent les frais réels. Parmi eux, seulement 2,5 millions de foyers paient l'impôt. Ces foyers fiscaux vont donc bénéficier en moyenne d'une baisse de leur impôt de 150 euros, pour quelqu'un qui roule en moyenne 1000 kilomètres par mois.

Elle est ciblée car elle vise "ceux de nos concitoyens qui roulent beaucoup, c'est-à-dire ceux pour qui le véhicule est finalement un moyen de travail ou de recherche d'emploi", relevait Jean Castex, citant par exemple les "infirmières" ou "aides à domicile" en milieu rural.

En relevant encore le barème, l'Etat pourrait soulager ces populations mais la mesure a un coût: un manque à gagner de 400 millions d'euros en recettes fiscales, un montant qui pourrait donc encore augmenter si le gouvernement choisit cette piste.

• Baisser les taxes, la piste la moins probable

Pour le moment, le gouvernement écarte tout abaissement de la TVA sur les carburants à 5,5% (comme le préconisent certains candidats à l'élection présidentielle).

Ce "n'est pas la solution" car cette mesure "n'est pas ciblée sur ceux qui en ont le plus besoin", et elle "coûte des milliards avec le risque qu'elle soit immédiatement effacée si le cours du baril grimpe encore", a plaidé Jean Castex.

La baisse des taxes n'a pas non plus la faveur du gouvernement. Selon Bercy, 1 centime de baisse représente un coût d'un demi-milliard d'euros.

Un choix qui ulcère Philippe Martinez, patron de la CGT, interrogé ce matin sur RMC. "C'est un paradoxe parce qu'on nous annonce des baisses d'impôt dans tous les sens et sur l'impôt le plus injuste comme la TVA, qui pénalise tout le monde et surtout les petits salaires, on refuse de la baisser".

• Des mesures spécifiques pour les entreprises

Un certain nombre de secteurs est très sensible au prix de l'essence: les transporteurs routiers bien sûr (avec 25% de leurs coûts) mais aussi les taxis, les ambulanciers, les transporteurs scolaires... La flambée des prix les étranglent littéralement.

Toutes ces entreprises sont au bord du travail à perte. La CPME réclame ainsi des mesures d'urgence.

La confédération des PME propose ainsi que "le montant de récupération de la taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques (TICPE) sur le gasoil routier pourrait être augmenté et son remboursement, mensualisé plutôt que trimestriel, élargi aux véhicules professionnels de moins de 7,5 tonnes, selon des critères à déterminer".

La CPME souhaite que la taxe sur la taxe que constitue la TVA sur la TICPE soit supprimée et propose que le gazole non routier (GNR) soit maintenu au-delà de 2023, cela "donnerait de la visibilité aux professionnels des travaux publics, du bâtiment ou des matériaux et carrières".

Matignon indique que les filières "n'ont pas demandé de dispositifs transverses mais plutôt ciblés", appelant "des réponses diverses". Ces propositions devraient être dévoilées la semaine prochaine dans le "plan de résilience" pour les entreprises touchées par le conflit en Ukraine.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business