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Face à la hausse des coûts, les chocolatiers contraints d'augmenter leurs prix à Noël

Noël est la saison incontournable pour les chocolatiers. Mais, cette année, le contexte inflationniste inquiète.

Sur la table de Noël, ne manqueront pas le foie gras, la bûche, le saumon fumé… et les incontournables chocolats. Pour les chocolatiers, c'est une période faste, souvent la saison la plus importante de l'année. Plus de 30.000 tonnes de chocolat ont été vendues en France lors des dernières fêtes de Noël, soit près de 700 millions d'euros de chiffre d'affaires, selon des chiffres du Syndicat du chocolat. Chocolats fourrés, alcoolisés, truffes ou encore moulages en forme de Père Noël: la production tourne à plein régime pour satisfaire les consommateurs.

"On multiplie par trois nos effectifs pour suivre la demande", explique Solène Roelandts, présidente de la chocolaterie de Puyricard. L'entreprise familiale fabrique la majeure partie de ses produits vendus à Noël au cours du mois de décembre. Ses ateliers de fabrication, au nord d'Aix-en-Provence, ne cessent de produire chocolats mais aussi calissons, pâtes de fruits et guimauves pour alimenter la vingtaine de boutiques que compte l'entreprise. Pas le droit à l'erreur: l'entreprise provençale réalise 45% de son chiffre d'affaires sur les trois semaines précédant Noël.

Dans le sud de l'Alsace, Abtey attend également le 25 décembre avec impatience. L'entreprise, familiale elle aussi, fonctionne sur un rythme uniquement saisonnier: ses chocolats sont vendus en grande distribution uniquement à Noël et à Pâques. Pas de moulages en décembre: la grande spécialité d'Abtey, ce sont les chocolats à l'alcool pour les adultes et les petits parapluies à accrocher au sapin pour les enfants. Avec 700 tonnes de chocolat en moyenne, Noël pèse 55% du chiffre d'affaires de la PME alsacienne, également tournée vers l'export.

"Nous n'avons jamais vu ça"

Mais l'inflation risque de gâcher la fête pour les chocolatiers, après avoir déjà connu des fêtes de Pâques compliquées. "Le chocolat a augmenté de 35%. C'est énorme, nous n'avons jamais vu ça", souligne Anne-Catherine Wagner, à la tête de la chocolaterie alsacienne. Matières premières, énergie, emballages… Les coûts de production grimpent dans tous les sens. "Il faut revoir toutes les recettes", explique le chocolatier parisien Jean-Paul Hévin. L'artisan évoque aussi la hausse des salaires, une augmentation conséquente dans un secteur qui réclame beaucoup de main d'œuvre.

"Il y aura forcément une hausse des prix de certains produits en fonction du coût de revient et du temps passé pour la production", note Jean-Paul Hévin.

Une hausse des prix semble effectivement inévitable. Presque tous les chocolatiers interrogés confirment avoir augmenté les prix d'une partie de leurs produits pour rester à flot. "Nous ne pouvons pas tout absorber sur nos marges", déjà étriquées, et "je ne veux pas acheter des matières premières de moins bonne qualité", confirme Solène Roelandts. Difficile également pour ces entreprises de revoir leur processus de fabrication. Après près de trois années de crise sanitaire, puis de flambée des coûts de production, l'optimisation a déjà été poussée à son maximum.

Du côté du chocolatier belge Leonidas, on assure qu'il n'y aura pas d'augmentation des prix de ses chocolats. "Nous avons décidé de ne pas répercuter nos hausses de coûts dans le prix de vente et de perdre de la marge", avance Philippe de Selliers, PDG de Leonidas. L'entreprise belge compte 300 boutiques en France et réalise un tiers de son chiffre d'affaires sur les deux derniers mois de l'année. "Mais nous espérons que le consommateur nous le rendra en retour en venant plus fréquemment dans nos boutiques", espère le dirigeant.

Inquiétude pour Pâques 2023

Car la consommation dans ce contexte inflationniste inquiète. Des premiers signaux négatifs avaient tracassé les fabricants: en cette période de hausse des prix, les Français pourraient être tentés de faire des arbitrages. Le budget n'est pas extensible et le chocolat risque d'en faire les frais. "Nos clients ne viennent pas moins souvent, mais ils achètent un peu moins que d'habitude", souligne Solène Roelandts. Tous se montrent néanmoins optimistes, misant sur les envies des consommateurs à mesure qu'approchera Noël, une période traditionnellement peu regardante sur les dépenses.

"C'est à Pâques que l'on ressentira l'inflation", prédit Anne-Catherine Wagner.

Si les Français préfèrent souvent se faire plaisir plutôt que de se restreindre à Noël, c'est moins évident à Pâques. L'inflation continuera probablement son chemin sur les premiers mois de l'année et, pour les chocolatiers, le contrecoup pourrait tomber à ce moment-là.

Jérémy Bruno Journaliste BFMTV