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Députés et sénateurs s’accordent sur le projet de loi qui provoque la colère des distributeurs

Image d'illustration - Un supermarché à Balma, près de Toulouse, le 7 décembre 2022

Image d'illustration - Un supermarché à Balma, près de Toulouse, le 7 décembre 2022 - Lionel BONAVENTURE © 2019 AFP

Feu vert au projet de loi Descrozaille. Députés et sénateurs ont fini par s’accorder ce mercredi sur ce texte, qui provoque l’ire de la grande distribution.

Le député Frédéric Descrozaille souffle, en ce milieu d’après-midi. Après une matinée de discussions en Commission mixte paritaire, au Sénat, le groupe de députés et de sénateurs désigné s’est accordé sur un texte commun, qui vise à "renforcer l’équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs". À entendre Frédéric Descrozaille, les discussions se sont déroulées de manière constructive, sans anicroche, Sophie Primas, la Présidente de la Commission des Affaires économiques du Sénat, ayant "remarquablement piloté les échanges".

Un projet de loi contesté

Cela ne s’annonçait pourtant pas forcément évident, étant donné les différences de points de vue. Le projet de loi, d’ailleurs, a été plusieurs fois modifié, depuis sa première mouture, par les députés et les sénateurs.

Surtout le fameux article 3, qui définit ce qui se passe en cas de désaccord entre distributeurs et fournisseurs au terme de la période officielle de négociations commerciales le 1er mars. Là, le texte stipule qu’en cas de désaccord, "à titre expérimental", le fournisseur aura le choix entre: faire courir le préavis légal, pour avoir le temps de se retourner ou mettre fin au contrat et cesser les livraisons. Mais ce cas de figure "arrive très peu", estime Fréderic Descrozaille.

Les deux parties sont aussi libres de saisir un médiateur pour lancer un préavis de rupture, explique le député, pour qui ce nouveau texte, issu de la Commission mixte paritaire, satisfait désormais tous les acteurs industriels, y compris les petites et les moyennes entreprises, qui craignaient d’être lésées dans les rapports de force par rapport aux multinationales. 

D’autre part, la Commission mixte paritaire a globalement entériné ce qui avait été acté par les sénateurs, sur l’encadrement des promotions sur les produits non alimentaires, la non-négociabilité des matières premières agricoles dans les produits vendus sous marques distributeurs ou le raccourcissement de 2026 à 2025 de la prolongation de l‘expérimentation de l’encadrement du seuil de revente à perte, qui arrive à échéance en avril.  Les fruits et légumes ne sont pas inclus dans ce dispositif.

"Un accord impensable et inflationniste!"

Ont aussi été adoptées des mesures sur l’encadrement des pénalités logistiques et sur les centrales d’achats à l’étranger, qui seront soumises à la règlementation française.

Enfin, l’amende infligée aux distributeurs qui ne concluraient pas les négociations commerciales en temps voulu - au 1er mars - est fixée à un million d’euros et peut monter jusqu’à deux millions d’euros, en cas de récidive.

Sans grande surprise, la grande distribution prend extrêmement mal cet accord conclu entre les députés et les sénateurs. Contacté par BFM Business, Jacques Creyssel, patron de la Fédération du Commerce et de la Distribution (FCD), dénonce "un accord complètement impensable et inflationniste (…) très clairement fait pour augmenter les marges des grands industriels étrangers, alors même que ces marges n’ont jamais été aussi élevées depuis quinze ans".

"On a l’impression, lance Jacques Creyssel, que le pouvoir d’achat est un sujet qui n’intéresse pas les parlementaires".

Il s’étonne de la tournure qu’a pris les choses en Commission mixte paritaire, alors que le gouvernement lui avait donné l’impression de vouloir arriver à "un compromis". Il s’interroge, aussi, sur la faisabilité, juridiquement parlant, de certains points, notamment sur les centrales d’achats européennes.

Avec ce texte, qui sera soumis au vote le 22 mars, députés et sénateurs souhaitent rééquilibrer les négociations commerciales entre distributeurs et fournisseurs. Il paraît peu probable, en revanche, qu’elles soient davantage apaisées. 

Pauline Tattevin