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Burgers et kebabs: les augmentations de prix sont déjà là dans la restauration rapide

La flambée du coût de certaines matières comme l'huile de friture ou encore les emballages forcent les petits commerçants et les géants du fast-food à augmenter sensiblement leurs tarifs.

C'est l'un des "döner kebab" le plus couru du 18e arrondissement de Paris. Tous les jours, des dizaines de personnes font la queue devant "Gemüse" pour déguster un de leur "kebap". Mais depuis quelques jours, les clients sont informés d'une mauvaise nouvelle: une affichette annonce une augmentation sensible et quasi généralisée des prix.

Le restaurant explique ne plus pouvoir encaisser seul les hausses de prix sur certaines matières, notamment "200% sur l'huile de friture" (évidemment très utilisée) ou encore "les emballages" en carton. Conséquence, il est obligé d'augmenter de quelques dizaines de centimes ses plats, frites et formules pour "préserver" son modèle économique.

"On ne peut pas faire autrement", indiquent d'autres propriétaires de ce type de restaurants à nos confrères de France Bleu. Tous ont dû augmenter leurs prix de quelques dizaines de centimes pour faire face.

Huile, sauces, emballages

La flambée du prix de l'huile de tournesol tourne au cauchemar pour ce type de restauration rapide. Elle est l'une des nombreuses conséquences de la guerre entre l'Ukraine et la Russie, les deux pays représentant 78% des exportations mondiales d'huile de tournesol. Vendue 640 euros la tonne mi-février, elle se négocie plus de 1000 euros aujourd'hui.

Et non seulement cette inflation se répercute sur l'huile de friture, mais aussi sur les sauces qui sont notamment confectionnées avec cette huile.

Cette problématique n'épargne pas les géants des fast-foods. A l'image de McDonald's. Aux Etats-Unis, malgré l'empreinte colossale de la chaîne qui lui permet d'absorber une partie de cette inflation, les prix des menus ont augmenté de 2,7% au cours des trois derniers mois, selon les analystes de Gordon Haskett après avoir augmenté de 6% en 2021.

Il faut dire que l'enseigne a dû également consentir une hausse moyenne de 10% des salaires outre-Atlantique.

Aux Etats-Unis, augmentations chez McDo et Burger King

Chez Chipotle (nourriture mexicaine), les prix ont augmenté de 10% sur un an. Même chose chez Burger King en Amérique du Nord. "Nous prévoyons des augmentations de prix supplémentaires en 2022 et travaillons en étroite collaboration avec les franchisés pour prendre la meilleure décision pour les clients", expliquait en février dernier, José Cil, PDG de Restaurant Brand International.

Plus globalement, les prix des menus dans la restauration rapide pourraient encore augmenter de 6 à 8% en 2022, selon Wedbush Securities.

En France, la tendance est similaire même si elle est encore difficile à évaluer précisément car dans la plupart des cas, les restaurants sont franchisés et sont libres de leurs prix.

Contacté, Burger King France explique: "Aujourd’hui, face à la hausse constante des matières premières, nous avons réalisé quelques ajustements de prix dans nos restaurants mais ils restent inférieurs à l’inflation que nous subissons et qui concerne la grande majorité de nos ingrédients. Nous réalisons des recommandations auprès de nos franchisés (85% de nos restaurants sont opérés par des franchisés) mais ils sont ensuite libres de fixer eux-mêmes leurs prix de ventes aux clients".

"Nous maintenons (et recommandons à nos franchisés de maintenir) les prix de certains produits iconiques au niveau national comme le menu enfants King Junior qui est à 4 euros ou notre Menu Menu King Deal (Burger Frites et Boisson) qui est à 5 euros dans la majorité de nos restaurants en France", ajoute le groupe.

Contacté, McDonald's n'a pas encore retourné nos demandes de commentaires.

Interrogé par BFM Business, Bernard Boutboul, président de Gira Conseil (spécialisé dans le secteur de l'industrie de la restauration hors domicile) explique qu'il y a aujourd'hui deux "camps" chez les exploitants.

"Seuil psychologique"

"Les premiers ne veulent absolument pas appliquer des augmentations de prix par peur du décrochage de fréquentation. Les seconds cherchent des solutions pour atténuer ou contourner ces augmentations en réduisant leurs coûts, notamment en effectuant des modifications sur leurs recettes".
Pour les franchisés, "certains suivront les recommandations du franchiseur, d'autres non, ils n'ont pas d'obligation. Donc il y aura des disproportions de prix incompréhensibles pour le consommateur sur le territoire", ajoute l'expert.

Mais dans le cas des McDonald's (83% des 1500 restaurants sont franchisés), Bernard Boutboul estime que les augmentations seront homogènes. "Les franchisés font généralement confiance aux recommandations du franchiseur".

"On est coincé"

Problème, il y aura un seuil psychologique à ne pas dépasser. Selon une enquête de l'analyste indépendant Mark Kalinowski menée auprès de franchisés (qui appliquent ou non les hausses de prix recommandés par la maison mère), l'augmentation des prix commence déjà à peser sur les ventes aux Etats-Unis.

"Y a-t-il un point d'inflexion à partir duquel les clients commencent à décider qu'il ne vaut pas la peine de payer 9,50 dollars pour un burrito, qu'il ne vaut pas la peine de payer 7 dollars pour un hamburger?", a ainsi déclaré Sean Dunlop, analyste chez Morningstar.

"Nous ne sommes plus très loin de ce point de rupture en France", ajoute Bernard Boutboul, "nous avons déjà une des restaurations la plus chère au monde, on est coincé". D'autant plus que les prix des matières premières, des produits de base ou encore des emballages ne sont pas près de se retourner. "Ce n'est pas fini, on peut s'attendre à une nouvelle flambée cet automne", prévient l'expert.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business