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Des milliers de feuillets inédits de Louis-Ferdinand Céline retrouvés

Des oeuvres de Louis-Ferdinand Céline, lors d'une vente aux enchères en 2011 (photo d'illustration)

Des oeuvres de Louis-Ferdinand Céline, lors d'une vente aux enchères en 2011 (photo d'illustration) - Lionel Bonaventure - AFP

Des écrits de l'auteur qui avaient mystérieusement disparu viennent de ressurgir. Une enquête du Monde, qui révèle cette découverte, relate le parcours chaotique de ces feuillets.

Louis-Ferdinand Céline, mort en 1961, avait laissé derrière lui tout un pan de son oeuvre jamais édité. Disparus depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, ces écrits viennent de réapparaître, comme le révèle Le Monde. D'après le quotidien, ce trésor est constitué de milliers de feuillets, soit des centaines de pages, qui viennent de ressurgir dans des circonstances dignes d'un roman.

Concrètement, ces archives contiennent 240 feuillets inédits sur la guerre. On y retrouve Ferdinand, alter-ego littéraire de l'auteur. Un manuscrit de mille feuillets intitulé Londres a lui aussi été exhumé. Toujours d'après Le Monde, il sert de préface au roman Guignol's Band (1944) et "pourrait être considéré comme un roman inédit". Le roman largement autobiographique Casse-pipe, dont seule une partie était connue, vient s'étoffer de 600 feuillets inédits. On y trouve également le manuscrit de La Volonté du roi Krogold, une nouvelle de jeunesse, des manuscrits de romans déjà connus et des souvenirs personnels.

Comment ces écrits de celui qui est considéré comme l'un des plus gands auteurs du XXe siècle ont-ils été retrouvés? Dans une longue enquête, Le Monde retrace le parcours chaotique et mystérieux de ces feuillets, dont Louis-Ferdinand Céline avait lui même déploré la disparition en accusant les "épurateurs" de l'après-guerre.

L'élément déclencheur

Ils viennent de Jean-Pierre Thibaudat, critique dramatique qui a travaillé pour Libération. Il raconte qu'un lecteur du journal l'a contacté pour les lui confier "il y a plus de quinze ans":

"Il me les a remis en ne posant qu’une seule condition: ne pas les rendre publics avant la mort de Lucette Destouches, car, étant de gauche, il ne voulait pas 'enrichir' la veuve de l’écrivain", confie-t-il au quotidien.

Celle-ci est morte en novembre 2019 à l'âge de 107 ans. C'est alors que Jean-Pierre Thibaudat s'est manifesté auprès de l'avocat parisien Emmanuel Pierrat.

Des écrits perdus dans la fuite

Louis-Ferdinand Céline, auteur de pamphlets antisémites connu pour sa sympathie pour le nazisme, a senti le vent tourner alors que la fin de la guerre approchait. Avec son épouse, il a fui la Fance en juin 1944 pour l'Allemagne puis le Danemark, laissant ses écrits dans son appartement de la rue Girardon.

D'après Le Monde, ils auraient sans doute été dérobés par un résistant, après son départ. L'incertitude demeure quant à l'identité de ce dernier. Une piste privilégiée serait celle d'Oscar Rosembly: le biographe de Céline Emile Brami et le journaliste du Monde ont tous les deux été en contact avec la fille de ce dernier, qui leur aurait fait part d'archives de son père, qu'elle a toujours refusé de leur montrer. Celle-ci est morte en novembre dernier. Une autre théorie concerne le résistant Yvon Morandat, qui a vécu dans l'appartement de Céline après son départ, et que l'auteur avait lui-même accusé dans une lettre. Morandat avait pourtant proposé de les rendre à Céline à son retour en France, ce que celui-ci avait refusé, persuadé que les manuscrits importants avaient été emportés.

Vers une parution?

L'identité de la personne qui a remis les écrits à Jean-Pierre Thibaudat n'a pas été divulguée par ce dernier. On ignore, de fait, où ces manuscrits ont passé les 80 dernières années, et comment ils se sont retrouvés en sa possession.

Lorsque l'avocat Emmanuel Pierrat a été contacté par Jean-Pierre Thibaudat, il a fait part de la découverte aux ayants droit de Lucette Destouches, qui ont porté plainte pour recel de vol. Convoqué en mars dernier au siège de l’Office central de lutte contre le trafic de biens culturels (OCBC) à Nanterre, l'ancien critique les remet à la justice. Ils sont alors expertisés avant d'être remis aux ayants droit. Ces manuscrits devraient être publiés chez Gallimard.

B.P.