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Essai - EQA 250, Mercedes se lance sur le marché des SUV électriques compacts

Cette semaine à l'essai, un petit SUV électrique, le Mercedes EQA.

Cette semaine à l'essai, un petit SUV électrique, le Mercedes EQA. - Antoine Larigaudrie

Malgré des débuts commerciaux difficiles pour son SUV 100% électrique EQC, Mercedes retente le coup avec un modèle plus petit, censé intégrer toutes les tendances du moment. Avec de très sérieux atouts sur le papier.

La preuve est là, le premium automobile électrique a bien du mal à s’installer. La première génération de ces engins censés permettre aux grandes marques automobiles de luxe d’aller chasser sur les terres de Tesla n’est pas un succès commercial, loin de là.

Audi e-tron, Jaguar iPace et Mercedes EQC ne s’écoulent qu’à quelques dizaines de milliers d’exemplaires par an. La faute à un segment déjà très occupé par le champion américain, et aussi à des véhicules qui, malgré d’indéniables qualités, n’ont pas réussi à percer. La faute aussi à des problèmes de production dus à la pénurie de batteries qui a commencé à sévir dès le début de l’année 2020, avant même la crise des semi-conducteurs qui touche l’ensemble de l’industrie en ce moment.

Mercedes complète sa gamme électrique avec un petit SUV, l'EQA.
Mercedes complète sa gamme électrique avec un petit SUV, l'EQA. © Antoine Larigaudrie

L’autre problème principal est plus généralement lié à celui de l’émergence de l’automobile électrique de masse. Si les petites voitures, de type Zoé ou Smart, se sont rapidement intégrés au paysage urbain, par leur praticité et leur autonomie suffisante pour la circulation en ville ou périurbaine, les grosses voitures électriques ont plus de mal à s’imposer. Réticence des automobilistes à faire de longs trajets, réseau de recharge toujours insuffisant et pas forcément très économique à l’usage, nécessité d’investir dans des superchargeurs à domicile, praticité et temps de recharge…

Malgré des technologies de plus en plus innovantes et près de l’utilisateur, difficile de convaincre, d’autant qu’encore une fois Tesla s’est installé depuis longtemps, avec une logique de communauté qui capte énormément de clientèle potentielle aux grandes enseignes du haut de gamme.

Objectif: électrifier le GLA

D’où l’idée de changer de cible. Clairement, les SUV de segment B et C constituent le marché le plus dynamique du moment, théatre d’une offensive sans précédent entre constructeurs pour imposer de nouvelles références, et surtout mettre les bouchées doubles sur l’électrification. Si Mercedes a quasiment converti l’ensemble de sa gamme à l’hybridation (de l’hybridation légère à l’hybridation rechargeable, tout comme Audi et BMW), la marque avait à cœur de frapper fort sur ce segment porteur, avec un engin 100% électrique, plus adapté aux trajets quotidiens de la majeure partie des automobilistes.

Après l'EQC, le SUV familial, Mercedes attaque la gamme des SUV urbains, l'EQA.
Après l'EQC, le SUV familial, Mercedes attaque la gamme des SUV urbains, l'EQA. © Antoine Larigaudrie

C’est ainsi qu’est né l’EQA. Plutôt que de développer un engin entièrement nouveau avec sa propre technologie et sa plate-forme spécifique comme l’EQC, d’emblée le nouveau venu se présente comme une déclinaison électrique du SUV a succès GLA (56.000 exemplaires écoulés en Europe l’année dernière), en reprenant son châssis, et en l’équipant d’une batterie de 66,5kWh et d’un moteur électrique d’une puissance de 140kW (190ch). D’entrée de jeu, ce "petit" SUV (4,4 mètres) se trouve doté d’une autonomie finalement équivalente à celle de l’EQC, à 416 kilomètres contre 421, tout en étant plus léger de quasiment de 300 kilos (2,1t).

Le point fort: un vrai dynamisme

Extérieurement, hormis la teinte grise mate de cette finition AMG Line, une calandre pleine (modèle réduit de celle de l’EQC) et de jolies jantes semi-pleines, peu de détails séparent un EQA du GLA dont il est dérivé. A l’intérieur, même raffinement, même ambiance, avec d’excellents sièges baquets en alcantara devant, une banquette spacieuse et confortable à l’arrière, et un intérieur ou dominent les détails fins et chatoyants des meilleurs modèles du compartiment A de Mercedes.

L'EQA bénéficie de la jolie intégration développée par Mercedes pour ses écrans tactiles.
L'EQA bénéficie de la jolie intégration développée par Mercedes pour ses écrans tactiles. © Antoine Larigaudrie

Les affichages de bord numériques (HUD compris) sont bien présents sur la planche de bord, très élégante, et sur l’écran de l’infotainment, tout en évitant d’être trop envahissants. Beaucoup de commandes restent d’un accès classique à base de boutons élégants et de commandes simples.  Enfin, la conception intérieure des portes est absolument remarquable, avec une ergonomie et une impression de qualité et de solidité du domaine de l’exceptionnel.

La conception intérieure des portes est remarquable, avec une ergonomie et une impression de qualité et de solidité du domaine de l’exceptionnel.
La conception intérieure des portes est remarquable, avec une ergonomie et une impression de qualité et de solidité du domaine de l’exceptionnel. © Antoine Larigaudrie

Dès les premiers tours de roues, l’EQA se montre dynamique malgré son poids, même en mode normal. Doté d’un très bon rayon de braquage (11,4 mètres), il est très facile à prendre en mains, se faufile tranquillement dans la circulation et se gare avec beaucoup d’aisance.

En revanche, sélectionnez le mode sport, et vous bénéficierez d’accélérations assez décoiffantes! Même si son 0 à 100 km/h peut ne pas paraître exceptionnel (8,9 secondes), les mises en vitesse de 0 à 50 sont en revanche assez violentes si on a le pied droit lourd, occasionnant de jolis "burns" au démarrage pour un engin qui reste une simple traction avant. Sympathique et gratifiant!

Ce "petit" SUV (4,4m) se trouve doté d’une autonomie finalement équivalente à celle de l’EQC, pourtant plus grand, avec 416 kilomètres contre 421.
Ce "petit" SUV (4,4m) se trouve doté d’une autonomie finalement équivalente à celle de l’EQC, pourtant plus grand, avec 416 kilomètres contre 421. © Antoine Larigaudrie

Silence impressionnant et efficacité énergétique

Mais le principal atout de cet EQA est sans doute son silence, très impressionnant même pour un véhicule électrique. Très bien insonorisé, mieux que la plupart des premiums électriques existants (Tesla, Audi e-tron, Jaguar IPace et EQC compris), on n’entendra guère que le léger sifflement de roulage réglementaire à basse vitesse, et un calme olympien règnera même à des vitesses bien plus élevées. La monte pneumatique (Bridgestone Turanza sur ce modèle) arrive même à effacer une bonne partie des bruits de roulement, qui restent la signature parfois un peu gênante de certains modèles électriques. L’occasion de profiter de l’excellente installation hifi Burmester à 11 hauts-parleurs, dont la profondeur de son et la dynamique frôlent la perfection absolue, surtout dans cette ambiance sereine et silencieuse.

La chaine de traction électrique de cet EQA est d’une redoutable efficacité et s’avère très sobre à l’usage, surtout si on reste en mode normal ou éco et que l’on n’abuse pas de la climatisation. L’EQA arrive à rouler sur des distances assez impressionnantes sur l’inertie, sans consommer un kW. Une autonomie maitrisée d’ailleurs par l’excellent système de récupération d’énergie au freinage, peut-être moins pratique et instinctif que sur d’autres modèles similaires, mais le résultat est là: on conserve et on récupère des capacités à vue d’œil!

Notre modèle à l'essai: le Mercedes EQA AMG Line ici au tarif de 59.349 euros.
Notre modèle à l'essai: le Mercedes EQA AMG Line ici au tarif de 59.349 euros. © Antoine Larigaudrie

Le point noir: une recharge compliquée

Avec 421 kilomètres d’autonomie, qui permettent d’envisager sereinement des trajets urbains quotidiens et même quelques escapades ponctuelles, le tableau peut paraître idyllique. Reste tout de même le problème du temps de recharge. Même si l’EQA peut être rechargé à 80% sur des bornes très haute puissance de type Ionity ou DC en une demie-heure, 9 heures seront nécessaires sur une borne plus classique type 2. Et pas loin de 20 heures pour une prise domestique. Le problème du temps et de la praticité de la recharge reste entier, même si la vocation de l’engin, plus urbaine, semble plus en adéquation avec ces impondérables. Durant la semaine entière d’essai effectuée avec ce modèle, avec des trajets domicile-travail courts et quelques balades, aucune recharge ne s’est avérée nécessaire.

Certains automatismes et aides à la conduite (détection d’angles morts, lectures des panneaux de limitation de vitesse) peuvent s’avérer d’une intrusivité un peu agaçante, tout comme le toucher un peu inhabituel de la pédale de frein, surtout pour un engin de 2 tonnes. Et la direction, très légère et trop démutipliée, est assez peu informative.

Enfin, un vrai aspect de cet EQA pourra en dérouter certains: il passe totalement inaperçu! Il n’oublie pas d’être élégant et fluide, avec des optiques joliment dessinées et impressionnantes dans le noir, mais garé au milieu du flot actuel de SUV… personne ne le remarquera! Un aspect curieux pour une Mercedes… dont on aurait aimé peut-être un peu plus d’audace en termes de style, après un EQC déjà assez… quelconque. Mais ce "défaut" finalement peut constituer son meilleur atout: en effet on a précisément affaire à un engin de flux, censé conquérir des parts de marché sur le segment. Et là, en réalité, Mercedes a peut-être joué un coup de maître!

Mais à quel prix? Une bonne affaire

D’autant que le prix de cet EQA a de quoi surprendre, et en bien. A 49.899 euros prix de base, et même 44.900 euros pour la série limitée de lancement (300 exemplaires), on n’est qu’à quelques milliers d’euros d’une Kia E-Niro de gamme nettement inférieure. Et les concurrents sur le haut de gamme ne sont actuellement pas légion. Notre version d'essai reste cependant, comme souvent chez les marques allemandes, beaucoup plus onéreuses avec le jeu des options.

Le Volvo XC40 Recharge est facturé bien plus cher, à 56.150 euros. Un Lexus UX300e, aux performances équivalentes mais un peu plus petit, pourra éventuellement lui faire un peu d’ombre, à prix équivalent. Quant au Mazda MX-30, il est peut-être beaucoup moins coûteux (34.600 euros), mais il ne pourra pas rivaliser point de vue autonomie, puisque volontairement limité à 200 kilomètres.

L’EQA 250 sera bientôt épaulé de deux autres versions plus performantes à deux moteurs et traction intégrale cette fois, pour offrir de meilleures performances et ainsi offrir une mini-gamme dans la gamme. Mais cet EQA "de base" est sans doute le plus prometteur commercialement. En jouant la sécurité, avec un format à succès, une chaîne de traction efficace et sobre ainsi qu’un équilibre-prix vraiment bien étudié, il dispose de tous les ingrédients pour devenir un véritable succès, qui peut et doit enfin lancer la gamme électrique EQ au-delà de la simple expérimentation.

Modèle essayé: Mercedes EQA AMG Line, 59.349 euros
Antoine Larigaudrie