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"Ça peut faire de sacrés dégâts": le trafic de servals, un félin originaire d'Afrique, explose en France

Le refuge pour animaux sauvages Tonga Terre d'Accueil recueille de plus en plus de servals depuis deux ans. Un animal pouvant atteindre un mètre de long et peser 15 kilos dont la détention est interdite en France.

Un trafic qui ne cesse de croître. Sur les réseaux sociaux, de nombreuses vidéos circulent mettant en scène un animal sauvage, particulièrement prisé des stars et des influenceurs: le serval, un félin originaire d'Afrique. Leur détention en tant qu'animal domestique est pourtant interdite en France. La peine encourue pour le fait de porter atteinte à la conservation d'espèces animales non domestiques est de trois ans d'emprisonnement et de 150.000 euros d'amende, selon le Code de l'environnement.

Lorsqu'ils sont saisis par les autorités, les servals sont donc envoyés dans des refuges.

"Depuis deux ans qu'on voit que ce trafic existe, on a accueilli une trentaine de servals. Ce qui est énorme et on en a refusé une bonne dizaine par manque de place", s'alarme Jean-Christophe Gérard, vétérinaire au refuge pour animaux sauvages Tonga Terre d'Accueil, situé dans la Loire.

L’enquete choc sur le trafic d’animaux – 17/01
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Il précise auprès de BFMTV: "avant cette explosion du trafic, on en avait accueilli un ou deux en 16 ans d'existence de l'association".

Des chiffres alarmants qui illustrent le danger qui pèse sur cette espèce, pouvant atteindre un mètre de long et peser 15 kilos, et sur leurs propriétaires.

"Ils ne sont pas faits pour être câlinés sur des canapés"

"Les animaux sauvages ne sont pas faits pour vivre en appartement, ils ne sont pas faits pour être câlinés sur des canapés", martèle Jean-Christophe Gérard, révolté à la vue des nombreuses vidéos postées sur les réseaux sociaux.

Des vidéos qui incitent les particuliers à s'en procurer. "Ce qui n'est pas dit dans ces stories ou vidéos est que, soit ceci n’est pas fait dans un cadre légal, soit ces contacts particuliers sont réalisés ailleurs qu’en France où la loi peut être différente", est-il écrit sur le site Tonga Terre d'Accueil qui appelle le gouvernement à "agir" pour mettre fin à ces trafics.

Outre les réseaux sociaux, le refuge pointe également du doigt la télévision et les séries comme Tiger King, un programme diffusé sur Netflix qui met en scène "un monsieur détenant des tigres ou des lions dans un parc privé".

"Non, ce n'est pas intelligent de s'afficher avec un animal sauvage pour gagner des followers ou faire croire que votre vie est cool. Ce n'est pas non plus intelligent de favoriser de telles approches qu'elles soient en Afrique, en Amérique, à Dubaï ou en Asie car elles encouragent le trafic et la capture d'animaux dans la nature", s'indigne l'association.

Un rapport du collectif Smacc (Social media animal cruelty coalition, "Coalition contre la cruauté envers les animaux sur les réseaux sociaux"), publié en novembre 2022, déplore que ces animaux soient "maintenus dans des environnements qui ne peuvent répondre à leurs besoins fondamentaux". Ce qui se traduit notamment par "des manipulations inappropriées, une alimentation inadéquate et des soins vétérinaires inappropriés, ou même l'absence totale de soins vétérinaires".

Un félin vendu en tant que chat Savannah

Pour vendre des servals en France, les trafiquants jouent avec la loi. Depuis une quinzaine d'années, la détention d'un chat Savannah, une race créée dans les années 1980-1990 aux États-Unis en croisant un chat domestique et un Serval, est autorisée.

"Donc les gens utilisent la légalité de cette nouvelle race de chats pour avoir chez eux des servals sauvages", nous explique Jean-Christophe Gérard.

"C'est un animal qui reste sauvage. On voit déjà un chat domestique, quand il est énervé, les dégâts qu'il peut faire. Alors un serval qui fait entre 10 à 15kg, ça peut faire de sacrés dégâts", prévient-il.

Le refuge Tonga Terre d'Accueil s'occupe de ces animaux avant de leur trouver une place dans des zoos. Comme Thor, saisi dans une discothèque dans le nord de la France, qui va "désormais avoir une vraie vie de serval, et pas de chat d'appartement, ce qui est quand même une meilleure chose", conclut le vétérinaire.

Hugo Pouteau et Juliette Brossault