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La Chambre régionale des comptes fustige la gestion financière du Mulhouse Olympic Natation

Natation (illustration)

Natation (illustration) - ICON SPORT

Notes de frais sans justificatifs, voitures privées pris en charge... Le Mulhouse Olympic Natation est dans le viseur de la chambre régionale des comptes.

La Chambre régionale des comptes du Grand Est fustige, dans un rapport consulté par l'AFP jeudi, la gestion financière du Mulhouse Olympic Natation, interrogeant l'usage des subventions accordées par l'agglomération de Mulhouse, et pointant les lacunes des contrôles effectués par la collectivité.

Club très identifié de la natation française, aussi bien pour ses résultats sportifs que pour ses déboires, le Mulhouse Olympic Natation (MON) est indissociable de la famille Horter: Lionel Horter, ex-directeur technique national de la Fédération française de natation (FFN), a été l'entraîneur de Roxana Maracineanu, première championne du monde française et ex-ministre des Sports.

Sa mère, Marie-Octavie Horter, membre du comité directeur, est l'ancienne vice-présidente de la FFN, tandis que son frère, Franck Horter, président du club, a été le gérant de Tyr Retails, équipementier de l'équipe de France, dont il reste l'un des cadres dirigeants.

Dans son rapport portant sur les différents exercices comptables depuis 2015, la Chambre régionale des comptes (CRC) souligne que Lionel Horter assume des fonctions de "directeur général", non prévues et non définies dans les statuts du club, mais qui lui apportent une rémunération brute mensuelle de 5435 euros.

Cumulées avec ses fonctions de "directeur sportif technique", Lionel Horter touche ainsi un salaire dépassant régulièrement les 100.000 euros bruts annuels, quand la masse salariale totale du club, qui emploie "une quinzaine" de personnes, atteint au maximum 346.000 euros. En 2019, le salaire de l'entraîneur a ainsi représenté plus d'un tiers de la masse salariale.

Enfin, Lionel Horter a régulièrement perçu des remboursements de frais sous forme "d'avances forfaitaires" de 1.000 euros. Une pratique "contestable" selon la CRC puisque l'entraîneur "dispose des cartes bancaires de l'association établies à son nom", et que le club règle directement "certains frais de déplacement significatifs"

Par ailleurs, la Chambre épingle la rémunération de membres du comité directeur via diverses notes de frais, dépourvues "de tout justificatif", ou encore via des prestations facturées. Ces pratiques, pour plusieurs dizaines de milliers d'euros annuels, ont permis au club "de s'affranchir du règlement de charges sociales ou fiscales".

Prolongeant la confusion, le club a pris en charge l'assurance de différents véhicules privés appartenant à la famille Horter.

Sur un autre aspect, la CRC déplore la trop grande "proximité" entre l'association MON, chargée des activités de haut niveau, et la société commerciale "MON Club", chargée des activités commerciales de loisirs, placée en liquidation judiciaire depuis mars 2022. 

Ainsi, certaines subventions de l'association sont venues "alimenter le compte courant" de la société commerciale, dont sont actionnaires Marie Octavie Horter et ses deux fils.

D'une manière générale, la CRC déplore des retards dans la publication des comptes, l'absence de publication de la rémunération des dirigeants, pourtant exigée par la loi, ou encore la régulière "surestimation du résultat".

Concernant la gestion, elle pointe la "démarche peu prudente de l'association pour financer ses équipements", s'inquiète de sa "forte dépendance" aux subventions (62% de ses ressources, contre 22% en moyenne nationale des associations sportives), et explicite l'existence d'une "menace pesant sur la continuité de l'exploitation".

Vis-à-vis de l'agglomération de Mulhouse, principal financeur du club (490.000 euros annuels entre 2015 et 2019), le rapport pointe des relations "équivoques et confuses" entre les deux parties, un usage "contestable" d'une partie des subventions, et l'absence de "contrôle", par l'agglomération, "de la bonne utilisation des fonds versés". Depuis 2020 cependant, l'agglomération a réduit son soutien financier.

En plus de quatre "rappels du droit" formulés au vu des irrégularités, la CRC émet trois "recommandations" pour une gestion clarifiée du club.

Sollicitées par l'AFP, ni la famille Horter, ni l'agglomération de Mulhouse n'ont donné suite.

Parallèlement, à l'issue d'une enquête judiciaire par la brigade financière de Mulhouse, quatre membres de la famille Horter seront jugés pour abus de biens sociaux, abus de confiance, présentation de bilans inexacts et recel de ces délits dans le cadre de la gestion du MON.

A.F avec AFP