BFM Patrimoine
Passion

Œuvres d'art dégradées: comment sont assurés les tableaux célèbres?

Les "Tournesols de Van Gogh dégradés pour une action écologiste

Les "Tournesols de Van Gogh dégradés pour une action écologiste - Handout / Just Stop Oil / AFP

Ces derniers mois, plusieurs œuvres d'art ont été dégradées à travers le monde. Si ces actions ne se sont pas soldées par des dégradations des tableaux visés, elles posent tout de même la question du risque du vandalisme et de la manière dont il est assuré.

Dans le viseur des militants pour le climat et la protection de l'environnement, plusieurs œuvres d'art, à la valeur inestimable, ont fait l'objet d'actes de vandalisme ces derniers mois. Lors de la dernière action en date, jeudi 27 octobre, c'est La Jeune Fille à la Perle de Johannes Vermeer, qui a été prise pour cible, au musée Mauritshuis de La Haye.

"Une personne a collé sa tête au tableau, qui était protégé par une vitre, et l’autre personne a collé sa main au mur où est accroché le tableau", a rapporté l'établissement néerlandais. Une tierce personne a ensuite lancé une "substance inconnue" sur la toile. La toile, protégée par une vitre de verre, n'a toutefois pas été endommagée, a indiqué le musée Mauritshuis. Avant cela, Les Meules de Claude Monet à Postdam en Allemagne, Les Tournesols de Vincent Van Gogh à la National Gallery de Londres, et même La Joconde au Louvre avaient été ciblés par des jets de soupe à la tomate, de purée de pommes de terre ou encore de pâtisserie.

Une série d'actions qui pose la question de la prise en charge du risque de dégradation pour les œuvres d'art. En effet, en cas d'altération de ces ouvrages, comment seraient indemnisés les musées pour leur restauration et leur potentielle perte de valeur?

Le vandalisme inclus dans les garanties des assureurs

Comme pour tout objet de valeur, il existe des compagnies d'assurance spécialisées dans les objets d'art que peuvent solliciter les fondations ainsi que les musées privés et publics. Ces offres spécifiques assurent en théorie contre des dégâts des eaux, des incendies, des inondations, des cambriolages et même des actes de vandalisme.

"On accompagne en tous risques (par opposition au péril dénommé, ndlr) c'est à dire que tout est garanti sauf certaines exclusions du contrat", explique Daphné de Marolles, responsable souscription de la branche Art & Specie and Private Client chez AXA XL.

Mais la responsable pointe surtout l'importance du risque de dégradation pendant le transport des œuvres.

"On encourage nos clients à être attentifs dans le choix des transporteurs", ajoute-t-elle.

Ces derniers doivent en effet être habilités à manipuler et emballer ces objets fragiles.

La restauration et la dépréciation prises en charge

"En cas de sinistre sur une œuvre, l'assureur prend en charge ses frais de restauration", indique Daphné de Marolles. Au terme de cette "réparation", un expert doit ensuite déterminer s'il y a une dépréciation de l'ouvrage. "Dans ce cas, la compagnie indemnise son client à hauteur de la perte de sa valeur", précise-t-elle.

Si l'œuvre est perdue, en revanche, l'assurance base son indemnisation soit sur la valeur déclarée de l'objet, c'est à dire déterminée le jour du sinistre, soit sur sa valeur agréée, déterminée au moment de la souscription du contrat.

Mais ces garanties ont évidemment un coût, pour les musées, en partie corrélé à la valeur des collections assurées. Ainsi, pour les expositions temporaires, dont la valeur est estimée à moins de 1,5 million d'euros, les musées peuvent par exemple souscrire un contrat standard auprès d'AXA XL. Quant aux expositions abritant des objets évalués à plus de 1,5 million d'euros, l'assureur leur propose une solution "sur-mesure" et plus coûteuse.

Toutefois, "la prime d'assurance dont s'acquittent chaque année ces clients n'est pas seulement liée à la valeur des œuvres exposées", souligne Daphné de Marolles. Sont en effet pris en compte d'autres critères comme la nature des objets d'art et la façon dont ils sont stockés ou exposés.

Les collections permanentes moins assurées

Quant aux collections permanentes des musées, elles peuvent aussi être protégées par ce type de contrats "sur-mesure". "Mais ces souscriptions sont plus rares", indique Daphné de Marolles. Non seulement les inventaires ne sont pas toujours exhaustifs ce qui peut compliquer l'estimation de la valeur des œuvres. Mais le budget que représente ces garanties pour les institutions est aussi très conséquent.

Un tableau comme "La Joconde" parait en effet "inassurable" tant il est difficile d'évaluer sa valeur.

"Ces tableaux à la valeur inestimable sont d'ailleurs souvent assurés par l'Etat lui-même", précise la responsable.

Les maisons de ventes, les galeries et les restaurateurs font aussi partie des souscripteurs de ce type d'assurance. Comme pour les musées et les institutions, AXA XL propose deux gammes de contrat différents, selon la valeur du patrimoine concerné (inférieure ou supérieure à 500.000 euros).

Pour les collectionneurs particuliers, en revanche, AXA applique des primes forfaitaires annuelles. Pour une valeur patrimoniale comprise entre 0 et 200.000 euros, la prime est fixée à 500 euros. Pour des biens estimés entre 200.000 euros et 500 000 euros, son montant double. "Il existe par ailleurs une solution sur mesure pour les collections supérieures à 500.000 euros", détaille Daphné de Marolles.

Enfin, les particuliers, dont le capital mobilier est inférieur à 750.000 euros, peuvent se tourner vers un contrat d'assurance habitation tous risques "boosté".

Nina Le Clerre